12/03/2003
LE
MOT DE L'AMBASSADEUR
Un bon bilan
qui reste à équilibrer
La relance des
échanges
commerciaux franco-croates tarde à profiter
aux exportations croates
L'année
2002 a été marquée par une relance des échanges économiques
franco-croates, une forte augmentation des investissements français en
Croatie, à quoi s'ajoute le retour massif des touristes français
sur la côte dalmate. Mais cette tendance favorable masque une stagnation
des exportations croates qui pourrait s'avérer dangereuse si elle devait
se prolonger.
L'année
dernière ici-même
j'appelai de mes vux à la relance des échanges
économiques bilatéraux. On ne peut donc que se réjouir
de la nette amélioration enregistrée depuis, même
s'il faut constater qu'elle s'accompagne d'un déséquilibre
au détriment de la Croatie. Comme par le passé,
forums économiques, séminaires spécialisés,
salons et rencontres politiques seront donc plus que jamais appelés
à soutenir et à harmoniser la dynamique enclenchée.
Il y va de la compétitivité de l'économie
croate, qui passe par le rééquilibrage de sa balance
commerciale.
Selon
les chiffres qui viennent d'être publiés, les échanges
commerciaux entre la France et la Croatie ont enregistré en 2002 une
augmentation de 27,3 %, pour atteindre un volume de quelque 758 millions d'euros.
Après presque trois ans de piétinement, cette reprise est un signe
encourageant. Parallèlement, les investissements
français en Croatie, qui cumulés depuis 1995 s'élèvent
à quelque 177 millions d'euros, ont presque triplé en un an :
passant de 22,4 millions d'euros en 2001 à 49,1 millions pour les neuf
premiers mois de 2002, ils devraient selon les premières estimations avoisiner
les 60 millions d'euros pour l'ensemble de l'année. Contribuant à
ce climat propice, le tourisme croate continue
de gagner du terrain en France : 135 000 visiteurs français se
sont rendus en Croatie en 2002, contre 75 000 l'année précédente,
ce qui représente une progression de 80 %, voire de 86 % en terme
de nuitées, qui atteignent le chiffre de 420 000. Et tout laisse penser
que cette tendance se poursuivra. Pour autant tout n'est pas en rose, loin s'en
faut.
Avec un
volume de marchandises en 2002 représentant 589 millions d'euros à
l'exportation et 169 millions d'euros à l'importation, la France est
le 6e fournisseur de la Croatie et son 8e client.
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En premier
lieu, le déficit commercial croate a continué de se creuser en 2002.
Si les exportations françaises en Croatie ont progressé de 39,5 %
pour atteindre 589 millions d'euros, les exportations croates vers l'Hexagone
se sont contractées de 2,5 %, et n'atteignent que 169 millions
d'euros, soit moins du tiers des exportations françaises. La France se
place ainsi au 6e rang des fournisseurs de la Croatie et au 8e rang de ses clients.
Bien que les statistiques françaises, qui tiennent compte non pas du pays
d'importation mais du pays d'origine des marchandises, puissent légèrement
corriger ce constat, l'écart reste préoccupant et peut, à
terme, contrarier le dynamisme des échanges.
Par ailleurs,
force est de constater que, sur le plan structurel, l'analyse des échanges
commerciaux franco-croates que nous avons faite voilà un an reste fondamentalement
pertinente. Malgré un réel potentiel et des opportunités
en nombre croissant, la France et la Croatie continuent de se chercher sur le
plan économique. On note une activité non négligeable donnant
des résultats plutôt probants, mais qui reste handicapée par
un déséquilibre chronique.
Opportunités
commerciales
Aussi
est-ce une même volonté partagée de Paris à Zagreb
et visant à promouvoir les échanges commerciaux franco-croates qui
fut à l'origine de deux forums économiques mis sur pied en 2002.
Le premier fut organisé fin mars à Zagreb, à l'invitation
de la Chambre de commerce de Croatie ; le second s'est
tenu en mai à Paris sous l'égide du Centre français du Commerce
extérieur (CFCE). On en retiendra l'intérêt réel manifesté
par les entreprises croates pour le marché français qui reste encore
globalement mal exploré, d'autant plus qu'à défaut de contacts
systématiques avec les partenaires français ceux-ci sont parfois
mal connus en Croatie. Sans doute cela explique-t-il aussi qu'on ne trouve en
France que deux bureaux de représentation d'entreprises croates (l'une
spécialisée dans la fabrication de meubles, l'autre dans la pharmaceutique).
D'aucuns pourront regretter que ni le rendez-vous de Zagreb, tourné principalement
vers les entrepreneurs croates, ni celui de Paris, destiné à sensibiliser
les milieux d'affaires français, n'aient débouché sur la
mise en uvre de projets concrets. Ceux-ci ne manquent pas d'ailleurs quand
on sait que pas moins d'une centaine d'opportunités commerciales en Croatie
fut proposée aux partenaires ou investisseurs transalpins lors d'un forum
similaire organisé à Udine, dans le Frioul.
Les échanges
commerciaux entre la France et la Croatie ont progressé en 2002 de 27,3 %,
atteignant 758 millions d'euros. Parallèlement, les investissements
français en Croatie ont presque triplé, passant de 22,4 millions
d'euros en 2001 à 49,1 millions pour les neuf premiers mois de 2002,
et devraient avoisiner les 60 millions d'euros pour l'ensemble de l'année.
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Toujours
est-il que les représentants d'entreprises françaises, encouragés
par le Poste d'expansion
économique français de Zagreb, fort d'une équipe de huit
personnes, se font de plus en plus nombreux en Croatie. Ce qui ne pourra qu'aller
croissant sur un marché où les lois de la concurrence sont chaque
jour mieux établies et mieux respectées. Dans le même temps,
on note un net regain d'intérêt des entreprises croates pour les
salons professionnels en France. En outre, en réévaluant la Croatie,
désormais notée "A4" à l'instar de quatre futurs
membres de l'Union européenne (Lettonie, Lituanie, Pologne et Slovaquie),
la COFACE a également contribué à instaurer un climat propice
au développement des échanges commerciaux.
On peut
en revanche déplorer l'absence, ces derniers temps, de rencontres bilatérales
au niveau ministériel, ce qui s'explique en partie par un calendrier électoral
français particulièrement chargé. Une visite à Paris
du vice-premier ministre croate en charge du secteur économique, programmée
pour le mois de novembre dernier, a finalement dû être ajournée
au dernier moment, retardant par la même occasion la signature de deux accords
bilatéraux qui attendent d'être signés : l'un destiné
à prévenir la double imposition, l'autre, à développer
la coopération des petites et moyennes entreprises.
Lois
du marché
En attendant
la visite d'une délégation du MEDEF en Croatie, qui pourrait s'associer
à celle du ministre français du commerce extérieur, le CFCE
organisera comme l'an passé un forum économique au mois de juin
prochain. Ce sera là pour les représentants des ministères
concernés et des organismes croates spécialisés une nouvelle
occasion d'illustrer leur volonté de renforcer le partenariat économique
avec la France, en s'inspirant de l'excellent climat qui caractérise les
relations politiques entre les deux pays.
On peut espérer que cette rencontre contribuera non seulement à
soutenir la dynamique générale enclenchée l'année
dernière, mais aussi à faire un pas en direction du rééquilibrage
des échanges commerciaux.
|
LES
INVESTISSEMENTS FRANÇAIS
EN CROATIE (1995- 2002) |
|
(en
millions d'euros)
|
|
1995
|
0,12 |
1996
|
4,6 |
1997
|
22,3 |
1998
|
25,4 |
1999
|
22,9 |
2000
|
20,1 |
2001
|
22,4 |
2002
|
59 (estimation) |
TOTAL
|
177 (est.) |
|
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Pour l'économie
croate, accroître ses exportations est devenu un impératif. Loin
d'être une simple question de bilan équilibré et de balance
commerciale, son aptitude à développer ses exportations est étroitement
liée à son degré de restructuration, de mise à niveau
et d'adaptation aux lois du marché. Cette nécessité est d'autant
plus accrue que la Croatie est depuis 2000 membre de l'OMC et qu'elle a rejoint
l'Association centre-européenne de libre-échange (ACELE) en décembre
2002. Qui plus est, le 21 février dernier, elle s'est officiellement portée
candidate à l'adhésion
à l'Union européenne, affirmant ainsi sa détermination à
vouloir faire partie de la deuxième vague d'élargissement prévue
pour 2007. Avec un taux de croissance de 5 %, le plus élevé
parmi les pays en transition, une inflation de 1,6 %, une main d'uvre
qualifiée et la mise en uvre accélérée de l'accord
conclu avec les Quinze, on estime à Zagreb que d'ici la fin 2006 la Croatie
aura satisfait aux critères d'adhésion et achevé d'intégrer
à sa législation les 31 chapitres de l'acquis communautaire.
Mais pour la Croatie, réussir ce pari suppose aussi de relancer sa production
industrielle et d'accroître ses exportations. En d'autres termes, la simple
augmentation du volume de nos échanges commerciaux ne saurait donner matière
à un satisfecit, encore faut-il que cela traduise l'accroissement de nos
exportations.
Bozidar
GAGRO
Ambassadeur de Croatie en France
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