11/02/2005
MONDIAUX
2005
Slalom dames :
troisième médaille d'or pour Kostelic
SANTA
CATERINA (Italie), 11 fév (AFP) - La Croate Janica Kostelic
a remporté sa troisième médaille d'or des
Mondiaux-2005 et conservé son titre de championne
du monde à l'issue du slalom disputé vendredi
à Santa Caterina.
En 1 min 47 sec 98/100, la Croate âgée
de 23 ans, déjà médaillée d'or en
combiné et descente, a devancé de 18/100 la Finlandaise
Tanja Poutiainen, en tête à l'issue de la première
manche, et de 67/100 la Tchèque Sarka Zahrobska.
Kostelic, 3e à l'issue du premier tracé,
a bénéficié des erreurs de Poutiainen et
de la sortie de piste de la double championne du monde suédoise
(géant, super-G) Anja Paerson, 2e avant la manche décisive.
La Croate, également triple
championne olympique, remporte là le cinquième
titre mondial de sa carrière après ses deux victoires
de l'édition 2003, en slalom et combiné. Grippée
ces derniers jours, elle a dû être soutenue dans l'aire
d'arrivée par deux personnes.
Les Françaises Christel Pascal, Florine
de Leymarie et Vanessa Vidal terminent respectivement 12e, 15e
et 17e.
12/02/2005
L'EQUIPE
Kostelic, la fièvre de l'or
Comme aux JO
2002, la Croate, grippée hier, quitte les Mondiaux avec
trois médailles d'or, en slalom, en descente et en combiné.
Santa
Caterina (ITA),
Envoyé spécial
Même
lui ne sait plus trop que dire, qu’ajouter. Si
ce n’est s'incliner. Même Ante Kostelic, paternel
buriné par les ans et la vie croquée sans compter,
entraîneur comblé depuis longtemps par le talent
de sa surdouée de fille, ne trouve plus les mots. «
Elle a bien skié, d’autant qu'elle a été
malade », se contente-t-il de constater dans un doux
sourire. Mais, même patraque, Janica reste unique. Presque
surhumaine. La meilleure slalomeuse du monde. La meilleure tout
court. Imbattable. Invaincue en Italie. La Croate a en effet pris
trois départs depuis le début de ces Mondiaux, préférant
zapper le super-G en ouverture pour se reposer et oublier le géant
mardi à cause de la fièvre. Elle les quitte donc
avec trois titres. Triplé rare qui la laisse en si bonne
compagnie, près des Hess, Goitschel, Killy,
Sailer. Sacrées références. Triplé
magique qui en rappelle un autre qui, déjà, lui
avait permis de côtoyer Jean-Claude Killy et Toni Sailer.
JANICA KOSTELIC |
- Croatie
- 23 ans, née le 5 janvier, 1982 à Zagreb
- 1,74 m ; 70 kg
Skis, fixations, chaussures Salomon
- JO :
1re (géant, slalom et combiné, 2002) ; 2e
(super-G, 2002) ; 8e (combiné, 1998) ; 24e (géant,
1998) ; 25e (descente, 1998) ; 26e (super-G, 1998)
- CM : 1re (descente,
2005 ; slalom, 2003 et 2005 ; combiné, 2003 et 2005)
5e (slalom, 2001) ;
7e (combiné, 1999) ; 13e (géant, 2003) ; 13e
(super-G, 2001) ; 22e (super-G, 1999) ; 23e (slalom, 1999)
; 29e (descente, 1999)
- Coupe du monde : 20
victoires (17 slaloms, 3 combinés)
- Classement général
: 1re (2001 et
2003)
11e (1999) ; 14e (2002) ; 22e (2000)
- Classement slalom :
4e (2005, en cours) ; 1re (2003) ; 2e (2002) ; 1re (2001)
; 10e (2000) ; 11e (1999)
- Site officiel : www.janica.hr |
C’était
aux Jeux en 2002 et «
JK » de Zagreb y était devenue triple
championne olympique. Comme « JCK » de
Val-d’Isère en 1968 et comme le plus célèbre
des Kitzbüheler en 1956. Et si, à Salt Lake City,
la demoiselle avait eu la délicatesse d’ajouter l’argent
du super-G à ses ors du slalom, du géant et du combiné,
son voyage lombard en serait presque plus beau parce que plus
varié.
Sorte
de sublime grand écart. De la descente au slalom (en passant
par le combiné), une première dans les mêmes
Mondiaux dont Bode Miller pourrait s’inspirer.
De
2002 à 2005 en passant par Saint-Moritz en 2003 pour d’autres
Mondiaux. Trois dates pour huit ors planétaires, un record
du genre (depuis l’après-guerre) qu’elle partage
avec le Norvégien Aamodt. Trois ans, surtout, qui ressemblent
à une éternité quand il aura été
rappelé les tourments traversés. Les séjours
à l’hôpital pour soigner des genoux si souvent
cabossés et surtout l’ablation de la thyroïde
fin janvier 2004, en plein milieu d’une saison blanche.
Janica n’a évidemment pas oublié. «
Il y a un an, j’étais si loin du ski, des courses
» dit-elle. Mais comme toujours, Kostelic est revenue. À
force de courage et de volonté, indispensable compagnons.
À force de dévorante passion puisqu’elle ne
peut « imaginer sa vie sans le ski ».
« Je ne pouvais demander mieux »
Et la p’tite sœur d’Ivica,
en piste pour conserver son titre
entre les piquets ce matin, avait ciblé ses objectifs pour
ce énième retour. « Je savais que je manquerais
d’entraînement pour prétendre viser la Coupe
du monde générale, raconte Janica, déjà
double vainqueur du gros globe (2001
et 2003) et pourtant toujours
en course pour un troisième. Les Championnats du monde
étaient donc mon principal objectif. Ce qui m’arrive
est vraiment incroyable. Je ne pouvais demander mieux ! »
QUEL GRAND ÉCART ! |
CHAMPIONNE
DU MONDE de descente et de slalom. C’est un génial
inédit des temps modernes. Et ce n’est surtout pas une surprise
que Janica Kostelic en devienne l’auteur. D’abord parce
que la prodige de Zagreb a depuis toujours été élevée par
Ante, son père et son coach, dans le culte de la polyvalence.
Ante, fun de Killy, de Sailer mais également de Girardelli
(le seul avec Bode Miller à avoir gagné dans les quatre
disciplines en Coupe du monde durant le même hiver), n’envisage
le ski que comme ça. Et Janica aussi, évidemment. «
Mon rêve a toujours été de gagner partout, d’être également
performante en vitesse », dit la slalomeuse d’origine.
Du coup, depuis qu’elle est sur le circuit, Kostelic s’aligne
en descente et en super-G. Et si, parfois, la Croate s’est
contentée du slalom et du géant, c’est que son corps l’y
a obligée, notamment après son énorme chute en descente
en décembre 1999 à Saint Moritz. Qu’elle revienne d’abord,
qu’elle se remette à la vitesse ensuite rappelle les qualités
mentales exceptionnelles de cette championne. Arme essentielle
pour tout visiter. Derrière la réussite se dessine également
le travail pour, d’abord, asseoir sa technique en slalom
et, ensuite, le transférer ailleurs. Janica bosse plus que
tellement d’autres.
Et
surtout, surtout, il y a le talent. « Une technique
magnifique, des qualités naturelles », comme le souligne
Lionel Finance, le patron des Françaises, admiratif. « Une
intelligence de course poussée à l’extrême, un toucher de
neige et une conduite incroyables, un sens de la glisse
inné, une gestion des appuis toujours juste », détaille
le technicien tricolore. Avec l’expérience acquise durant
ces derniers hivers, Janica est également plus sûre, elle
craint moins la vitesse, les sauts. « Elle a énormément
progressé dans la sécurité », abonde Finance. Du coup,
Janica se sait, se sent capable du meilleur en descente
et en super-G. Elle ose prendre des risques dans la pente
pour ensuite être capable, comme si peu d’autres, d’aller
chercher de la vitesse sur les plats. Revient, évidemment
aussi, sa dernière recette. Le désormais fameux «
avoir un gros cul ». Puisque ça aide...
B.L. |
D’autant,
donc, que Janica Kostelic se remettait juste de cette grosse fièvre
qui décime la vallée et s’était posée
depuis deux jours sur Anja Paerson, sa grande rivale. Anja-Janica,
le duel de stars de ce slalom, dernière épreuve
féminine de ces Mondiaux, qui devait désigner la
Miss de la quinzaine puisque la Suédoise et la Croate,
deux ors chacune, avaient jusque-là trusté toutes
les unes. Vaillante, Anja résista en première manche
quand tant d’autres tombèrent dans l’une ou
l’autre des deux doubles piégeuses du tracé.
Schild, Koznick, Pequegnot, Görgl, Zuzulova, si longue liste
de prétendantes dépitées. Deuxième
à la mi-temps, à 0"16 devant Kostelic et à
0"40 de la Finladaise Tanja Poutiainen, leader provisoire,
Paerson y crut encore un moment en seconde manche. Avant d’enfourcher.
La voisine de Stenmark, furieuse de ce contrecoup, repart tout
de même de Santa Caterina avec deux titres.
Mais
sur les deux épreuves boudées par Kostelic, à
qui elle doit se résoudre à laisser toute la lumière.
Janica
la maligne avait parfaitement géré cette seconde
manche tracée par papa, donc tortueuse et serrée.
Prenant soin d’être la plus incisive, offensive sur
le haut, quitte à se mettre à la faute et manquer
de tomber, puisque, comme le glisse la convalescente, «
je savais que je n’aurais plus d’énergie
sur le bas, que j’aurais du mal à terminer ».
Mais même diminuée, son touché de neige et
son art de garder le plus souvent possible ses skis en contact
avec la neige restent inimitables entre les piquets. Même
Poutiainen, « un peu trop prudente », dut
céder, se contenter de l’argent, comme en géant.
Quand la Pragoise Sarka Zahrobska, surprise de bronze, exultait
d’offrir à la République tchèque sa
première médaille mondiale. Oui, même les
Tchèques sont invités à ce banquet qui se
refuse obstinément à la France (Pascal, 12e et De
Leymarie 15e), mais également à la Suisse ou à
l’Allemagne.
Voilà
Janica Kostelic double championne du monde de slalom. Une discipline
qu’elle assure pourtant « ne pas aimer ».
« Je n’ai pas envie d’être seulement
slalomeuse, confiait-elle encore en octobre. Je suis
simplement douée pour cela et je ne peux lutter contre.
» Elle tente simplement d’élargir avec
bonheur ses perspectives. Car ni cet or, ni les deux autres de
ces Mondiaux, ni les précédents ailleurs n’ont
entamé son appétit. Janica a tout gagné mais
elle a encore faim. « Je veux être une skieuse
polyvalente, assure-t-elle. J’ai donc envie de gagner dans
le quatre disciplines. Or il me manque par exemple un grand titre
en super-G » C’est le seul. Et elle n’a
que vingt-trois ans. Il n’y a rien d’autre à
dire…
Benoît
Lallemand
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