12/10/
2000
Conclusions du gouvernement
croate sur la situation post-électorale en RFY
Après
la victoire du candidat de lopposition serbe saluée par les dirigeants
croates, Zagreb a exposé ses attentes vis-à-vis de la nouvelle direction
à Belgrade dans un document en onze points. La Croatie espère surtout
voir accomplis des progrès dans le domaine politique (succession de lancienne
Yougoslavie, égalité des critères internationaux), des droits
de lhomme (crimes de guerre, disparus, prisonniers, réfugiés,
minorités) et de la sécurité régionale (rejet de la
politique de Milosevic, presquîle de Prevlaka, soutien aux accords
de Dayton en Bosnie-Herzégovine).
Le
gouvernement de la République de Croatie exprime le vu
quaprès treize années de dictature, la victoire
électorale du candidat présidentiel de lopposition
démocratique serbe, Vojislav Kostunica, ouvre désormais
la voie à la consolidation et la stabilisation de la situation
politique. Le gouvernement croate rappelle que la politique antidémocratique,
expansionniste et
agressive de lancien régime en place à Belgrade
entraîna de grandes souffrances et dimportants dégâts
matériels en Croatie, avec de lourdes conséquences
sur la paix et la sécurité régionales, un
nombre élevé de victimes et de réfugiés,
ainsi que de nombreuses destructions. Aussi le gouvernement croate
saisit-il cette occasion pour souligner une nouvelle fois que
le développement de relations de bon voisinage reste, en
matière de politique étrangère, une priorité
à ses yeux.
La complète
mise en uvre de lAccord de normalisation des relations entre la République
de Croatie et la République fédérale de Yougoslavie ne sera
toutefois possible que si elle saccompagne parallèlement dun
processus de démocratisation en RFY. Il est jusquà présent
apparu que les principales questions toujours ouvertes entre les deux pays
notamment celles résultant de la décomposition de lancienne
Yougoslavie et de lagression menée à lencontre de la
Croatie ne pouvaient être résolues sans un respect mutuel
des normes communes aux pays démocratiques, y compris de celles relatives
à la reconnaissance de lintégrité et de la souveraineté
territoriales.
Le
gouvernement de la République de Croatie comprend pour
sa part la volonté et le besoin de lUnion européenne
de soutenir activement la consolidation du processus démocratique
récemment entamé en RFY et douvrir ainsi la
voie à la mise à profit progressive des instruments
du Processus de stabilisation et dassociation et du Pacte
de Stabilité, cela afin dencourager en RFY les réformes
démocratiques, économiques et autres. Ayant à
lesprit lactuelle politique de lUnion européenne
à légard des pays engagés dans le Processus
de Stabilisation et dAssociation, laquelle a été
rappelée dans toutes les conclusions établies sur
la question par le Conseil européen et le Conseil des ministres,
le gouvernement de la République de Croatie souligne la
nécessité dapprécier selon des critères
communs les résultats de chacun des États. Il insiste
également sur limportance à poursuivre la
politique dincitation conditionnée appliquée
par lUnion européenne depuis avril 1997. Cette politique
prévoit notamment lobligation dune pleine protection
des droits de lhomme et des minorités,
autant que la mise en uvre du retour des réfugiés
et des personnes déplacées, le développement
de relations de bon voisinage, le respect de toutes les résolutions
pertinentes du Conseil de sécurité de lONU
et des processus de paix régionaux, ainsi que la collaboration
avec le Tribunal de La Haye.
Le
gouvernement croate souligne également limpératif
que représente à ses yeux lapproche individuelle
à légard de chacun des États de la
région dans le cadre du processus de rapprochement avec
lUnion européenne, afin que chaque pays puisse progresser
à son rythme, indépendamment des résultats
des États voisins. La République de Croatie, en
tant quÉtat membre du Conseil de lEurope, partage
lavis de lensemble des organes de celui-ci selon lequel
les événements intervenus en RFY ouvrent un nouveau
chapitre dans le développement démocratique de ce
pays et de la région dans son ensemble. La Croatie soutient
également louverture du dialogue
avec les nouvelles autorités en place à Belgrade
dans lespoir quelles sauront mettre à profit
l'occasion qui leur est donnée dadopter les normes
démocratiques lesquelles permettront, le jour venu, douvrir
à la RFY les portes du Conseil de lEurope, sous réserve
que celle-ci remplisse les conditions posées aux autres
États membres et candidats.
Conscient
des efforts déployés par la communauté internationale en
vue de stabiliser la situation en RFY, le gouvernement de la République
de Croatie apporte son plein soutien à lapplication scrupuleuse de
la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations unies
portant sur le Kosovo. Dans le même temps le gouvernement croate encourage
les autorités compétentes de Belgrade et de Podgorica à trouver
au plus tôt un terrain dentente sur les questions constitutionnelles
qui doivent définir les relations entre les républiques de Serbie
et du Monténégro. Cela constituerait une contribution significative
à la stabilisation globale aux frontières méridionales de
la Croatie. Considérant la situation actuelle dans chacune des deux républiques
de la RFY et écartant toute intention de simmiscer dans les affaires
intérieures de cet État tout en recherchant lintérêt
commun, le gouvernement de la République de Croatie entend poursuivre avec
la république du Monténégro sa politique de collaboration
dans le domaine économique ou tout autre, notamment celui des transports.
Compte
tenu des appréciations précédemment exposées et des
événements actuels en RFY, et eu égard à la possibilité
autant quà la nécessité de développer ses liens
bilatéraux avec la RFY, le gouvernement de la République de Croatie
a adopté les conclusions suivantes :
1.
SUCCESSION DE LANCIENNE RSF DE YOUGOSLAVIE.
Fidèle à ses convictions, le gouvernement de la
République de Croatie entend souligner la nécessité
de sen tenir au principe dégalité de
tous les pays successeurs de lancienne RSFY, lequel principe
doit servir de base à ladmission de la RFY au sein
dorganisations internationales. Le gouvernement croate sattend
aussi que la RFY soumette prochainement, en tant que nouvel État,
sa candidature à ladhésion aux Nations unies
et à lOSCE, ce que la Croatie est disposée
à soutenir. Le gouvernement croate continuera à
coopérer étroitement dans ce cadre avec les autres
États successeurs de la RSFY. Il demande aussi que lon
sattèle à résoudre avec plus de diligence
la question de la succession matérielle et financière
de lancienne RSFY, et cela en insistant sur légalité
de tous les États successeurs.
2. APPLICATION
DES MÊMES CRITÈRES. Le gouvernement de
la République de Croatie mettra tout en uvre pour
que la communauté internationale applique, dans le cadre
de sa politique dincitation conditionnée, les mêmes
critères à lensemble des pays de la région,
faute de quoi elle remettrait en question toute la crédibilité
des processus de démocratisation engagés autant
que la stabilisation de lensemble du sud-est de lEurope. 3.
ATTITUDE À LEGARD DES CRIMINELS
DE GUERRE. Il est parfaitement inacceptable pour le
gouvernement de la République de Croatie que Slobodan Milosevic
puisse continuer dagir de quelque manière sur la
scène politique en RFY. La République de Croatie
considère que Milosevic et les autres inculpés ou
condamnés pour crimes de guerre en Croatie, en Bosnie-Herzégovine
et au Kosovo qui ont trouvé refuge sur le territoire de
la RFY, doivent personnellement répondre de leurs actes
et être extradés au Tribunal pénal international
pour les crimes de guerre commis sur le territoire de lancienne
Yougoslavie. Dans lintérêt de la justice et
de lindividualisation des responsabilités, le gouvernement
croate en appelle à la RFY afin quelle satisfasse
aux exigences posées par le Conseil de sécurité
des Nations unies et le Tribunal de La Haye. Le gouvernement croate
appelle également la RFY à une coopération
active avec la Croatie afin que soient appréhendés
et jugés les criminels de guerre tels que Mile Martic,
Ratko Mladic, Veselin Sljivancanin et dautres.
4. ATTITUDE
DE LA NOUVELLE DIRECTION YOUGOSLAVE À LÉGARD DE LA POLITIQUE
AGRESSIVE DE MILOSEVIC. A linstar de lattitude quil
jusquà présent adoptée, le gouvernement de la République
de Croatie continuera, en fonction de ses moyens, à soutenir le processus
de démocratisation aujourdhui à luvre en RFY,
et sefforcera dy encourager le développement de la démocratie
et létablissement dune société civile multi-ethnique.
Il est à cet égard dune importance cruciale que les nouvelles
autorités yougoslaves reconnaissent, dune part la responsabilité
du régime de Milosevic dans lagression et les crimes commis durant
les guerres menées en Croatie et ailleurs, attisées voilà
dix ans par Belgrade, et, dautre part, il est tout aussi nécessaire
quelles permettent à lopinion publique yougoslave de se confronter
à la réalité des crimes et des horreurs perpétrés
au cours de ces conflits.
5. SORT
DES DISPARUS ET DES PRISONNIERS. Afin de contribuer dans ce nouveau
contexte à la normalisation de leurs relations bilatérales, il appartient
aux autorités de la RFY de fournir à la République de Croatie
une information complète à propos du sort des disparus et des personnes
retenues en captivité depuis lagression contre la Croatie.
6. PROTECTION
DES MINORITÉS. Le gouvernement de la République de Croatie
exprime sa conviction que les nouvelles autorités yougoslaves reconnaîtront,
conformément aux standards démocratiques européens, le statut
de la minorité croate en RFY, et il se trouve tout à fait disposé
à conclure un accord sur la protection mutuelle des minorités.
7.
RETOUR DES PERSONNES DÉPLACÉES
ET DES RÉFUGIÉS. Le gouvernement de la
République de Croatie poursuivra sa mise en uvre
du programme de retour des personnes déplacées et
des réfugiés et il appelle de ses vux les
nouvelles autorités de la RFY à coopérer
sur ce plan tant dans un cadre bilatéral que régional,
cela afin deffacer les traces laissées par la guerre
et de normaliser la situation dans les régions ravagées
par le conflit.
8. RESTITUTION
DU PATRIMOINE CULTUREL ET DES BIENS DÉROBÉS. Le gouvernement
croate souligne que la restitution du patrimoine culturel et des biens dérobés
pendant lagression menée contre la République de Croatie,
puis transférés en RFY, constitue une condition importante à
la normalisation complète des relations entre les deux États.
9. RÉGLEMENTATION
DES RELATIONS JURIDIQUES ET PATRIMONIALES. Le processus de démocratisation
attendu en RFY ouvre également la possibilité à une intensification
de la collaboration dans le domaine économique et de celui des transports,
dont la réglementation bilatérale des relations juridiques et patrimoniales
représente un des aspects.
10. RÉSOLUTION
DE LA QUESTION DE PREVLAKA. Se fondant sur linviolabilité
des frontières internationales de la Croatie et du plein respect de son
intégrité territoriale, le gouvernement croate est disposé
à rechercher une solution à toutes les questions restées
encore ouvertes, notamment à celle de la presquîle de Prevlaka.
A cet égard, la République de Croatie insiste sur le fait quil
sagit là dune question uniquement de sécurité
et aucunement dune question territoriale. En outre, la Croatie insiste pour
quil soit tenu compte du régime existant aux postes-frontières
internationaux de Debeli Brijeg et de Konfin, autant que des accords conclus en
ce sens avec les autorités du Monténégro.
11. LES
RELATIONS AVEC LA BOSNIE-HERZÉGOVINE. Le gouvernement de la
République de Croatie en appelle à la RFY, en qualité de
cosignataire des Accords de paix de Dayton, afin quelle contribue à
leur application et quelle soutienne ainsi, dans le respect de lindépendance
et de lintégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine,
les efforts que celle-ci déploie en vue dassurer sa stabilité,
ainsi que sa prospérité économique et sociale.
Traduit
par le service de presse
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