Les
minorités nationales en Croatie
La
legislation relative aux droits des minorités en Croatie
a fait l'objet de nombreuses réformes depuis la Loi constitutionnelle
du 4 décembre 1991, alors jugée conforme aux
standards européens par la Commission Badinter. La nouvelle
Loi constitutionnelle adoptée le 13 décembre
en décembre 2002, constitue à cet égard un
progrès significatif, la Croatie disposant désormais
de l'une des législations européennes les plus libérales
en la matière.
Avant
la reconnaissance de l’indépendance croate
La première Constitution croate adoptée
au lendemain des premières élections libres, promulguée
le 22 décembre 1990, ne prévoyait aucune disposition
spéciale ni discrimination positive à l’égard
des minorités, et notamment de la minorité serbe
(12 % de la population), se
cantonnant à garantir l’égalité de
tous les citoyens croates, sans aucune discrimination.
Une Charte des droits des Serbes et des autres minorités
nationales de la République de Croatie fut néanmoins
adoptée le 25 juin 1991, c’est-à-dire en même
temps que la Déclaration sur la souveraineté et
l’indépendance de la République de Croatie
qui marqua son émancipation politique de la fédération
yougoslave. Entre-temps une rébellion armée des
éléments les plus radicaux de la minorité
serbe de Croatie, soutenue par l’armée yougoslave
aux ordres de Belgrade, avait soustrait à l’autorité
de Zagreb près d’un quart du territoire croate. Il
s’agissait donc pour le gouvernement croate de donner des
gages à la minorité serbe par une Charte qui garantisse
leur autonomie culturelle, prévoie une organisation territoriale
adaptée et pose les principes de leur représentation
proportionnelle dans les assemblées des collectivités
territoriales, dispositions censées pouvoir désamorcer
le conflit. Il n’en fut rien.
Afin d’obtenir la reconnaissance internationale de son indépendance,
et compte tenu de la pression internationale, notamment européenne,
la Croatie fut amenée à adopter le 4 décembre
1991 une Loi constitutionnelle qui précise les principes
énoncés par la Charte.
En
vertu de celle-là, il était reconnu aux minorités
de Croatie notamment le droit:
- d’utiliser leur langue et leur alphabet comme langue officielle
aux côtés du croate dans les municipalités
où ils constituent la majorité de la population
;
- d’arborer leurs symboles nationaux aux côtés
des symboles nationaux croates dans les municipalités où
ils constituent la majorité de la population ;
- à l’enseignement maternel, primaire, secondaire
et supérieur dans leur langue maternelle ;
- à une représentation proportionnelle au Sabor
(Parlement), au Gouvernement et au sein des plus hautes instances
judiciaires pour les minorités représentant plus
de 8 % de la population (en l’occurrence la minorité
serbe) ;
- à 5 députés pour l’ensemble des minorités
ne dépassant pas, séparément, ce seuil (Italiens,
Hongrois, Tchèques, Slovaques, Ukrainiens, Allemands, Autrichiens,
toute l’ancienne mosaïque ethnique héritée
de l’Empire austro-hongrois) ;
- à un statut d’autonomie particulier accordé
aux onze municipalités (opcine) où les minorités
– la minorité serbe en l’occurrence –
représentent plus de la moitié de la population.
Ce statut prévoit notamment la représentation proportionnelle
des minorités au sein des conseils municipaux, des fonctionnaires
territoriaux, des instances judiciaires autonomes, des commissariats
de police municipaux, des établissements scolaires.
La
Croatie indépendante mais partiellement occupée
Ces dispositions, jugées conformes par la Commission d’arbitrage
présidée par M.
Robert Badinter aux standards européens en matière
de protection des droits des minorités, ouvrirent la voie
à la reconnaissance
de l’indépendance de la Croatie par la Communauté
européenne, officialisée dès le mois suivant,
le 15 janvier 1992.
Un amendement voté le 8 mai 1992 autorisa ensuite le regroupement
des municipalités autonomes en districts autonomes (kotarevi),
afin de prendre en compte le fait que les onze municipalités
à population à majorité serbe constituaient
deux espaces connexes, de respectivement cinq et six municipalités.
Il prévoyait également des mesures complémentaires
qui visaient à faciliter aux citoyens croates de souche
serbe l’accès aux postes de responsabilité
sur l’ensemble du territoire croate, en dehors des deux
districts, eu égard au fait que ceux-ci n’abritaient
en 1991 que 145 000 Serbes, c’est-à-dire un
quart de la minorité serbe de Croatie, tandis que la grande
majorité de celle-ci résidait dans les principales
villes de Croatie, où elle constituait une population très
minoritaire.
Ces districts ayant été occupés par l’armée
serbe de 1991 à 1995 et soustraits de fait à la
juridiction croate, la Loi constitutionnelle relative au statut
des minorités n’a toutefois pu y être appliquée.
Après
la reconquête de 1995
Au lendemain de la reconquête militaire de ces territoires
par l’armée croate, en août 1995, la quasi
totalité des Serbes de souche a fui dans le sillage des
troupes serbes vaincues. D’autre part, le retour des 120 000
Croates et autres minorités chassés de cette région
par les milices serbes en 1991 nécessitait du temps et
la mise en place dans vaste programme de reconstruction et de
déminage. Aussi le gouvernement croate en a-t-il provisoirement
suspendu l’application, le 20 septembre 1995, faute de pouvoir
la mettre en œuvre dans une région sinistrée
et désormais quasiment inhabitée.
Selon les amendements à la loi électorale en date
du 21 septembre 1995, sur l’ensemble de 127 députés
élus au Sabor, 8 députés sont appelés
à représenter les minorités nationales, soit
3 députés pour la minorité serbe, 1 député
pour la minorité hongroise, ainsi que pour la minorité
italienne, et enfin trois député répartis
à raison de un pour chacun des trois groupes de minorités
suivantes : tchèque et slovaque, ruthène et ukrainienne,
et, enfin, allemande et autrichienne.
Une
nouvelle loi électorale votée le 29 octobre 1999
a de nouveau modifié cette répartition. Ainsi le
Sabor (Parlement) est désormais
composé de 151 membres élus pour 4 ans au suffrage
universel direct (scrutin proportionnel) : 140 députés
représentent les Croates de Croatie, 5 députés
les minorités ethniques (1 serbe, 1 italien,
1 hongrois, 1 tchèque et slovaque et 1 représentant
d’autres minorités) et 6 députés
représentent les Croates de l'étranger (ce nombre,
variable, est fixé proportionnellement, en divisant le
nombre de votants par le nombre moyen de suffrages obtenu en métropole
par député, permettant ainsi une égale représentation
au Parlement des Croates de métropole et de ceux de l’étranger).
Le
tournant démocratique de 2000
Après la défaite aux élections législatives
de janvier 2000 et la victoire de la coalition de centre-gauche
conduite par le SDP et le HSLS, la Loi constitutionnelle de 1991
relative au statut des minorités fut amendée le
11 mai 2000, en attendant d’être révisée.
Ces modifications supprimèrent définitivement les
districts et municipalités autonomes, et par voie de conséquence,
le régime territorial de représentation proportionnelle
des minorités, aussi bien dans les instances politiques
et judiciaires locales, les administrations que dans l’enseignement.
Il fut cependant décidé que soit rétabli,
après publication des résultats du recensement de
la population de 2001, le seuil de 8 % au-delà duquel le
poids d’une minorité nationale lui donne le droit
à une représentation proportionnelle au Sabor. L’ensemble
des minorités représentant séparément
moins de 8 % de la population obtenaient, quant à elles,
un nombre de député compris entre cinq et sept,
selon les dispositions de la loi électorale.
De même les deux lois votées le 6 avril 2001, l’une,
relative au statut des collectivités territoriales (municipalités
et régions), l’autre, relative aux élections
municipales et régionales, ont-elles pris acte de cette
harmonisation administrative, fixant les mêmes règles
sur l’ensemble du territoire.
2002
: une nouvelle Loi constitutionnelle sur les droits des minorités
Au terme de vifs débats, le Sabor, résolu à
se conformer aux exigences de l'UE et de l’OSCE, est parvenu
à voter, le 13 décembre 2002, une nouvelle Loi constitutionnelle
relative aux droits des minorités nationales, publiée
dans le Journal officiel du 19 décembre 2002. A l’instar
de la loi constitutionnelle de 1991, celle-ci reprend également
à son compte la plupart des textes fondamentaux en la matière
(Charte de l’ONU, Déclaration universelle des droits
de l’homme, Acte final de l’OSCE, Convention du Conseil
de l’Europe sur la protection des droits de l’homme
et des libertés fondamentales, etc.) – (Art. 1).
La Loi réaffirme que la Croatie rejette (Art. 2) et interdit
(Art. 4) toute forme de discrimination et précise que la
protection des minorités fait partie intégrante
de l’ordre démocratique établi en Croatie
(Art. 3), ce que garantissent la Constitution et la Loi constitutionnelle
(Art. 4).
Les minorités nationales jouissent notamment du
droit :
- d’utiliser leur langue et leur alphabet, en
privé, en public ainsi qu’en tant que langue officielle
(dans les documents d’état civil, lorsque la minorité
concernée représente plus du tiers de la population
municipale ou sur les panneaux d’indication publics [toponymes,
noms de rues] dans les localités où les minorités
constituent une population « importante ») ;
- à l’enseignement et à l’éducation
dans leur langue maternelle (programmes et établissements
scolaires spécifiques, personnel enseignant spécialisé)
;
- à l’usage de leurs symboles nationaux (drapeau,
armoiries, hymne) aux côtés des symboles nationaux
croates dans les municipalités où ils constituent
la majorité de la population ;
- à l’autonomie culturelle ;
- à affirmer leur appartenance religieuse notamment au
travers d’associations à caractère religieux
;
- à être représentées dans les instances
représentatives au niveau local et national, ainsi que
dans l’administration et les instances judiciaires ;
- à prendre une part active dans la vie publique par le
biais des Comités et des représentants des minorités
nationales ;
- d’entretenir librement toute relation avec leur mère
patrie ;
- à être préservés de toute menace
qui viserait à restreindre ces droits.
Le service audiovisuel public veillera à diffuser des émissions
permettant à un large public de mieux connaître les
us et coutumes des différentes minorités nationales
(Art. 18).
LES
MINORITÉS NATIONALES
EN CROATIE |
Population
|
Nbre
d'hab. |
% |
Croates |
3 977 171 |
89,63 |
Serbes |
201 631 |
4,54 |
Bosniaques |
20 755 |
0,47 |
Italiens |
19 635 |
0,44 |
Hongrois |
15 595 |
0,37 |
Albanais |
15 082 |
0,34 |
Slovènes |
13 137 |
0,30 |
Autres
|
174 454 |
3,93 |
TOTAL |
4 437 460 |
100 |
|
Il
est garantit aux membres des minorités nationales (331 000
personnes, soit 7,5 % de la population croate) une représentation
au Parlement, comprise entre cinq et huit députés.
Les minorités nationales qui constituent plus de 1,5 %
de la population (en l’occurrence
uniquement la minorité serbe) sont représentées
par au moins un et au plus trois députés, étant
entendu que les minorités nationales qui constituent séparément
moins de 1,5 % de la population (soit toutes les autres minorités)
doivent être représentées par au moins quatre
députés (Art. 19).
Il est par ailleurs garanti aux membres des minorités
nationales une représentation au niveau des collectivités
territoriales (conseils municipaux et assemblées régionales)
– Art. 20.
Dans les municipalités où une minorité
nationale au moins représente entre 5 % et 15 % de la population,
la loi électorale veillera, si la condition n’est
pas remplie après les élections, à ce qu’au
minimum un représentant de l’une de ces minorités
entre au conseil municipal.
Dans les municipalités où une minorité
nationale dépasse le seuil de 15 % de la population, la
loi électorale veillera, si la condition n’est pas
remplie après les élections, à ce qu’il
entre au conseil municipal autant de représentants que
nécessaire de chacune des minorités concernées
jusqu’à ce soit reflété leur poids
respectif dans la population municipale.
Dans les régions où une minorité
nationale dépasse le seuil de 5 % de la population, la
loi électorale veillera, si la condition n’est pas
remplie après les élections, à ce qu’il
entre à l’assemblée régionale autant
de représentants que nécessaire de chacune des minorités
concernées jusqu’à ce soit reflété
leur poids respectif dans la population de la région. Le
dernier recensement de la population étant le document
de référence (Art. 20).
Dans les collectivités
territoriales où les minorités nationales bénéficient
d’une représentation proportionnelle dans les conseils
municipaux ou assemblées régionales, ce droit s’étend
également aux instances exécutives.
Au niveau national, on veillera à une
représentation adéquate des minorités nationales
dans l’administration et les instances judiciaires, ainsi
que dans les services déconcentrés et décentralisés.
A compétences égales, priorité est donnée
aux membres des minorités nationales (Art. 23).
Dans les municipalités où les minorités
nationales représentent plus de 1,5 % de la population
ou plus de 200 personnes, ainsi que dans les régions où
elles représentent plus de 500 personnes, il est institué
un Comité de la minorité nationale. Dans les collectivités
territoriales où résident au moins 100 membres de
minorités nationales, il est procédé à
l’élection d’un représentant de la minorité
nationale. Le Comité ou le représentant représentent
la minorité nationale auprès des instances locales
et peuvent leur soumettre leurs avis, propositions ou doléances.
Au niveau national, plusieurs Conseils peuvent
instituer une Coordination nationale.
Il est créé au niveau national
un Conseil des minorités nationales dont la mission consiste
à promouvoir le rôle des minorités nationales
dans la vie publique de la République de Croatie. Le Conseil,
composé douze membres (sept proposés par les Comités
des minorités et cinq personnalités éminentes
représentatives de ces minorités) peut soumettre
ses avis, propositions ou doléances au gouvernement. Il
gère et distribue les fonds publics alloués aux
minorités nationales. Les Comités, les représentants
des minorités nationales ainsi que Conseil des minorités
nationales peut saisir le Conseil constitutionnel s’il le
juge nécessaire.
Au moins une fois par an le gouvernement soumet
au Parlement un rapport sur la mise en œuvre des dispositions
de la Loi constitutionnelle sur les minorités ; le Conseil
des minorités nationales soumet quant à lui un rapport
semestriel au Parlement.
La
loi électorale
Afin d’achever l’harmonisation législative,
le Parlement a voté le 2 avril 1993 des amendements à
la loi électorale relative aux élections législatives.
Ceux-ci précisent les dispositions de l’article 19
de la Loi constitutionnelle sur les minorités nationales
qui fixent le nombre des représentants parlementaires des
minorités nationales au Sabor. Dorénavant le nombre
de députés représentant les minorités
nationales au Parlement est fixé à 8 :
- 3 députés représentant la minorité
serbe ;
- 1 député représentant la minorité
hongroise ;
- 1 député représentant la minorité
italienne ;
- 1 député représentant les minorités
tchèque et slovaque ;
- 1 député représentant les minorités
autrichienne, bulgare, allemande, polonaise, rom, roumaine, ruthène,
russe, turque, ukrainienne, valaque et la communauté juive
;
- 1 député représentant les minorités
albanaise, bosniaque, monténégrine, macédonienne
et slovène ;
Les
minorités et la question des réfugiés
La question des minorités est indirectement
liée à celle des réfugiés et des déplacés
(voir la définition
de ces termes). Elle se complique du fait des mouvements
de populations consécutifs à la guerre : la question
du retour des derniers réfugiés serbes est ralentie
par le fait que leurs maisons nécessitent pour partie d’être
reconstruites lorsqu’elles ne sont pas occupées à
titre provisoire par les réfugiés croates chassés
de Bosnie qu’il faut reloger, faute d’espoir de retour
en zone serbe de Bosnie.
Le gouvernement croate a d’ores et déjà
accompli beaucoup d’efforts sur cette question qui est à
présent en grande partie résolue. A l'été
2003, plus de 309 000 réfugiés ou déplacés
ont pu retourner chez eux, en Croatie, dont un tiers, soit près
de 101 000 personnes, sont des citoyens croates de souche
serbe. Sur l'ensemble des personnes rentrées, en juin 2003,
5180 d'entre elles bénéficiaient encore du statut
intermédiaire et temporaire de "personne réinstallée",
d'une durée de six mois.
Les déplacés. Sur
un total de 221 000 déplacés,
quelque 205 500 personnes, des Croates pour la plupart, sont
d'ores et déjà retourné vivre dans les territoires
désormais libérés d'où elles avaient
été chassées en 1991, tandis que 12 600
attendent encore la remise en état de leur habitation pour
pouvoir rentrer chez eux.
Les réfugiés.
Sur les 101 000 réfugiés serbes retournés
chez eux, près de 72 000 sont rentrés de Serbie-Monténégro
et 6400 de Bosnie-Herzégovine, tandis que 22 700 n'avaient
pas quitté le territoire croate. En outre, environ 13 550
citoyens croates de souche serbe, réfugiés en Serbie-Monténégro
ou en Bosnie-Herzégovine, ont fait une demande de retour
en Croatie,
qu'il ne reste plus qu'à mettre en oeuvre. Les demandes
de retour pouvant toujours être déposées,
ce nombre est susceptible de modification. S'y ajoutent également
environ 3300 personnes déplacées, provisoirement
établies en Slavonie orientale (région de Vukovar,
en Croatie), qui attendent de rentrer chez elles.
Bilan
des retours. Ainsi, en prenant pour référence
le nombre de réfugiés ayant effectivement fait connaître
leur désir de rentrer en Croatie, ce sont en tout quelque
309 000 réfugiés ou déplacés
qui sont déjà revenus chez eux,
sur un total de 339 000.
Parmi
les 29 500 personnes qui attendent encore de pouvoir rentrer,
on compte 15 900 déplacés (dont 3300
en Slavonie orientale) et
13 550 réfugiés. Si environ la
moitié d'entre eux, soit quelque 15 000,
sont d'origine serbe, beaucoup d'autres Serbes n’ont pas
déposé de demande de retour et n'envisagent pas
de le faire. Il serait en effet illusoire d’espérer
que tous les réfugiés serbes de Croatie aspirent
au retour : avec
la disparition de la Yougoslavie, la jeune génération
a le plus souvent déjà opté pour une installation
en République serbe de Bosnie ou en Serbie même,
et si les plus âgés sont les plus nombreux parmi
les candidats au retour, peu sont enchantés à l'idée
de retourner dans une région dévastée par
la guerre. L'intérêt extrêmement variable à
l'égard de leur droit au retour est peut-être aussi
à rapprocher du fait que, selon le recensement de la population
croate de 1991, un tiers des chefs de famille d'origine serbe
n'étaient pas nés en République de Croatie.
Ceci peut également expliquer le manque d'interêt
manifesté par bon nombre de réfugiés à
l'égard de toute perspective de retour.
Les réfugiés de Bosnie et
de Serbie. Enfin, la Croatie a accueilli près
de 160 000 réfugiés originaires de pays voisins :
parmi eux, quelque 120 000 réfugiés de Bosnie-Herzégovine
et 30 000 de Serbie-Monténégro, croates de
souche pour la plupart, sont aujourd'hui
établis en Croatie, mais ayant
obtenu la citoyenneté croate, ils ne bénéficient
plus du statut de réfugiés. En revanche,
près de 7000 autres personnes qui ont trouvé asile
en Croatie, dont 6350 réfugiés de Bosnie-Herzégovine
(dont 3757 Croates de Bosnie et 2186 Bosniaques) et 600 de Serbie-Monténégro,
bénéficient toujours du statut de réfugiés.
Cette situation est sensiblement compliquée par le fait
que parmi ces 157 000 anciens et actuels réfugiés
de
Bosnie ou de Serbie, quelque 15 000 personnes, soit
4200 familles, sont aujourd'hui tenues de libérer les maisons
qu'elles occupent à titre provisoire, afin d'en permettre
la restitution à leur propriétaires réfugiés
hors de Croatie. Pour que le processus des retours s'achève
au plus vite, il est toutefois nécessaire qu'elles soient
auparavant relogées, faute de pouvoir à leur tour
retourner chez elles et reprendre possession de leurs biens, souvent
occupés ou détruits. Ainsi, sur
les quelque 70 000 Croates chassés de
Bosnie occidentale en 1992-1995 (aujourd'hui en République
serbe de Bosnie, région de Banja Luka) et réfugiés
en Croatie, seuls environ 2 000 avaient jusqu'en 2003 pu
regagner leurs foyers.
En dépit des difficultés rencontrées,
et des questions complexes que soulève la question du retour
des réfugiés et des déplacés, le gouvernement
croate est en fin de compte parvenu à adopter une loi extrêmement
libérale sur la protection des minorités. Celle-ci
prévoit en effet un dispositif leur permettant d’être
représentées non seulement au Sabor et, à
l'échelon local, au sein des assemblées délibérantes
et de l’exécutif des collectivités territoriales,
mais aussi dans les administrations centrale
et les services déconcentrés.
(*) On distingue les réfugiés
des déplacés. Les réfugiés sont des
personnes ayant trouvé refuge hors de leur pays d'origine,
tandis que les déplacés n'ont pas quitté
le territoire de leur pays d'origine. Enfin, un troisième
terme, returnee en anglais, ou "personne réinstallée",
désigne ceux des réfugiés ou des déplacés
qui sont rentrés chez eux.
Mis à jour en juin 2003
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