lequipe.fr,
09/07/2001

WIMBLEDON
Le
miracle Ivanisevic
Maxime
DEGBO
Après
ses échecs en 92, 94 et 98, Goran Ivanisevic
triomphe enfin à Wimbledon. En battant Patrick
Rafter au terme d'un combat homérique long de
cinq sets (6-3, 3-6, 6-3, 2-6, 9-7), le Croate, classé
125e au classement technique, devient la première
wild card à s'imposer au All England Club et
dans un des quatre tournois majeurs. A 29 ans, Goran
Ivanisevic, après deux années noires,
à cause d'une blessure récurrente à
l'épaule, remporte son premier titre en Grand
Chelem.
 |
Goran
Ivanisevic s'adjuge enfin le titre à Wimbledon
après ses échecs en 92, 94 et 98.
(Photo AFP). |
Une
finale à couper le souffle
Quel spectacle ! Jamais deux joueurs n'avaient disputé
autant de jeux dans l'ultime set. En 1980 lors de la
fameuse finale opposant Björn Borg à John
McEnroe, quatorze jeux avaient été disputés.
Cette année là, le Suédois triomphait
pour la cinquième fois consécutive au
All England Club en s'adjugeant le dernier set 8-6.
Ivanisevic et Rafter ont donc fait mieux puisque le
Croate a eu besoin de seize jeux, deux de plus que
Borg, pour remporter enfin son premier titre à
Wimbledon.
Jamais une wild card n'avait été couronnée
à Wimbledon. Avec l'as des aces c'est chose
faite. Un titre qui tient du miracle. A 29 ans, Goran
Ivanisevic, après deux années noires,
à cause d'une blessure récurrente à
l'épaule, remporte son premier titre majeur.
En Grand Chelem, il n'avait pas fait mieux qu'un deuxième
tour en Australie l'an dernier, depuis Roland Garros
en 1999.
Et pourtant, le combat l'opposant à Rafter ne
fut pas des plus faciles (6-3, 3-6, 6-3, 2-6, 9-7).
Car même s'il débutait son match en s'appuyant
sur son service de poids lourds, en produisant des
retours exceptionnels lors du deuxième jeu,
très vite l'Australien le mettait en difficulté
en rehaussant son niveau de jeu.
Après la perte du premier set 6-3, l'Aussie
portait l'estocade dès le début du deuxième
set, au même moment que le Croate lors de la
manche précédente. Menant 1-0, Rafter
mettait la pression sur Ivanisevic. Ce dernier craquait
et commettait deux doubles fautes. Il était
ensuite transpercé par un passing plongeant
en coup droit de l'Australien. Celui-ci s'octroyait
le set, 6-3.
GORAN,
CE HÉROS ! |

Après son exploit à Wimbledon et
sa victoire en 5 sets lundi face à Patrick
Rafter en finale, Goran Ivanisevic a débarqué
mardi à Split, sa ville natale en Croatie.
Les membres de sa famille l'ont accueilli à
sa descente d'avion. Plus tard, 150 000 personnes
s'étaient donné rendez-vous pour
rendre hommage à leur nouveau héros
national.
Tout était prévu. La mairie de Split
avaient invité les habitants de la deuxième
ville du pays à se rendre au port, et à
le décorer avec leurs embarcations pour
accueillir Goran Ivanisevic. Un feu d'artifice,
des sauts en parachute et plusieurs concerts devaient
également marquer le retour au pays du gaucher
croate. 
Déjà lundi dans la soirée,
des jeunes avaient commencé les festivités.
Ils étaient nombreux torse nu à sillonner
les rues de Zagreb et de Split, et à crier
leur joie. Nombreux sont ceux également
qui avaient suivi le match avec attention et pleuré
avec l'homme aux 213 aces à Wimbledon.
Le
président croate, Stipe Mesic, fut l'un
des premiers lundi à s'adresser au joueur.
"Bravo Goran, et merci, au nom de toute la
Croatie !" Le Premier ministre, Ivica Racan,
y ajouta également son compliment, soulignant
l'attitude combative d'Ivanisevic durant toute
la quinzaine.
A
son arrivée "le Dieu du tennis",
pour les commentateurs croates, a déclaré
: "Hier, c'était le plus grand jour
de ma vie et aujourd'hui ça continue."
Il a ensuite indiqué qu'il allait terminer
la soirée en discothèque avec ses
meilleurs amis et les footballeurs de l'Hadjuk
Split, dont il est un fidèle supporter.

Sport O'FM |
Dès
lors, la rencontre montait en intensité. Les
spectateurs, en majorité Croates et Australiens,
chauffaient le court. Goran Ivanisevic était
bouillant. Mais il parvenait à contrôler
ses nerfs, le troisième Goran, mettait le bon
et le mauvais d'accord. Lors du sixième jeu,
sur un passing de revers, les trois Goran prenait le
jeu de service de l'Australien (4-2). Le tryptique
concluait le set sur une deuxième balle gagnante
culminant à 186 km/h !
A ce moment, Rafter se devait de réagir. Menant
3-2, dans la quatrième manche, il déployait
toute son énergie dans le sixième jeu.
Il revenait à 30-30, après une volée
amortie, à 40-40 après une double faute
du Croate. Par la suite, il obtenait deux balles de
break, il convertissait la seconde après une
nouvelle double faute du Croate. Sur son premier service,
le juge de ligne signalait une faute de pied, sur le
deuxième la balle tombait de quelques centimètres
dans le carré voisin. Une balle que le Croate
apercevait sans doute pleine ligne. Enervé,
le mauvais Goran surgissait, explosait, jetait sa raquette,
donnait un coup de pied dans le filet, contestait à
n'en plus finir. Pour rien. L'arbitre confirmait la
décision de son assistant. Ivanisevic était
atteint psychologiquement. Il concèdait le set,
6-2.
Un cinquième set exceptionnel
Calmé, maître de ses nerfs à l'entame
de l'ultime set, Ivanisevic, mis sous pression, 40-40,
parvenait à remporter son engagement. Il égalisait
à 1-1. Dès lors les deux joueurs offraient
au public survolté un chapelet de points gagnants,
un récital au filet, volée amortie, basse,
haute, claquée. Grandiose ! Les deux joueurs
ne concédaient ni l'un ni l'autre leur engagement
jusqu'au quatorzième jeu.
Goran Ivanisevic décidait alors d'en finir au
quinzième jeu. Il portait l'estocade en dispatchant
sur le court des retours de services exceptionnels.
A 15-30, d'un coup de poignet il transperçait
Rafter, sur le point suivant, toujours en retour, il
se décalait sur son coup droit et renvoyait
Rafter sur sa chaise. Mais l'Aussie n'avait pas capitulé.
Loin de là.
Mené 15-30, le Croate décochait un ace
en deuxième balle puis un autre en première
balle. Balle de match. Il était prêt à
s'effondrer, à pleurer. Mais il lui manquait
un point, celui du titre. Un point qui aura du mal
à sortir de sa raquette. La peur au ventre,
Goran commettait une double faute sur la première
balle de match. Même scénario sur la deuxième.
Sur celle qui suivait, Rafter le lobait.
Enfin à la quatrième tentative, c'était
la libération, il pouvait enfin s'étendre
de son long corps sur le Centre Court, fondre en larmes
rejoindre son père dans les tribunes... Rafter
venait d'envoyer son retour de coup droit dans la bande.
Goran Ivanisevic triomphait enfin à Wimbledon,
après trois échecs en 1992, 1994 et 1998.
lequipe.fr,
09/07/2001

TENNIS
Goran
porté par les anges
Incontestablement
le fait marquant de ce 115e Wimbledon est la victoire
du Croate Goran Ivanisevic, 125e au classement technique,
sur l'Australien Patrick Rafter, tête de série
n°3, (6-3, 3-6, 6-3, 2-6, 9-7). Qui aurait pensé
en début de tournoi que le natif de Split, finaliste
à trois reprises (92, 94, 98), invité
par les organisateurs du tournoi, en plein désarroi
depuis deux ans en raison d'une blessure récurrente
à l'épaule gauche, allait enfin s'adjuger
le titre dont il rêvait tant ? Qui ? Exceptés
ses fervents supporters. Et aussi Dieu et les anges
dont il parle tant. Ses prières, sa foi, ses
superstitions l'ont certainement aidé dans sa
conquête.
Certes sa croix était lourde. Mais il l'a brillamment
portée. Battre successivement Roddick, Rusedski,
Safin, Henman, Rafter, il faut le faire. Roddick venait
de sortir Thomas Johansson, un des outsiders de l'épreuve,
il était bouillant. Mais le Croate s'est empressé
de le refroidir. Ses travaux d'Hercule débutaient.
Rusedski, le half-Brit, qui ne l'a jamais battu en
huit confrontations, a encore perdu. Face à
Safin, quatre sets et deux tie-break ont été
nécessaires. Contre Henman, il a eu besoin de
trois jours et de cinq sets pour mettre fin aux espoirs
de tout un pays qui attend toujours un successeur à
Fred Perry, dernier Anglais à s'être imposé
sur le Centre Court. C'était en 1936. En finale,
pour vaincre Patrick Rafter, le Croate a dû disputer
cinq sets et 16 jeux dans l'ultime manche. C'est ainsi
qu'il est devenu la première wild card à
s'imposer en Grand Chelem. Un titre qui le propulse
à la 10e place mondiale à l'ATP Race
2001. Avant le tournoi, il était 83e. A noter
que durant ce tournoi, il a servi 213 aces, le record
du tournoi (l'ancien record était detenu par
lui-même avec 206 aces réussis en 1992).
lemonde.fr,
09/07/2001

TENNIS
Goran
Ivanisevic au paradis
Goran
Ivanisevic s'est imposé, lundi 9 juillet, aux
Internationaux de tennis de Grande-Bretagne, face à
Patrick Rafter, après trois finales perdues
en 1992, 1994 et 1998. Sous un ciel chargé de
nuages et d'électricité, le Croate a
battu son adversaire australien en cinq manches, 6-3,
3-6, 6-3, 2-6, 9-7.
Le
moral et le jeu broyés après sa dernière
défaite au All England Club face à Pete
Sampras en 1998, Ivanisevic était descendu dans
les profondeurs du classement ATP alors qu'il s'était
hissé, quatre ans plus tôt, au deuxième
rang mondial.
Cette année, le grand Goran était l'invité
du All England Club. Bien élevé, le Croate
a terminé tous les plats, laissant à
son adversaire le soin de nettoyer de ses larmes le
plateau réservé au finaliste.
Il
lui aura fallu quatre finales pour s'imposer à
Wimbledon, il n'est donc pas étonnant que le
Croate ait mis un point d'honneur à attendre
sa quatrième balle de match pour conclure le
match. "C'est le rêve de ma vie. Servir
une balle de match ici, c'est fantastique", a
dit le lauréat, qui a tenu à remercier
le public de Wimbledon : "J'ai déjà
joué trois finales ici, je n'ai jamais vu une
telle ambiance. Merci les gars." "Si j'avais
perdu, mon père serait mort", a-t-il ajouté,
soulagé.
Les
deux hommes entamaient la rencontre très tendus.
D'emblée, les observateurs se faisaient du souci
pour Ivanisevic, dont l'arme favorite, le service,
était loin d'être performante. C'était
sans compter sur les propres défaillances de
Rafter, pas très régulier sur sa mise
en jeu non plus, et pas vraiment impérial au
filet.
En 29 minutes, le Croate s'adjugeait la première
manche avec un très faible pourcentage de premières
balles (55 %). Le deuxième set était
l'exacte réplique du premier, à cette
différence près que c'est Rafter qui
l'emportait.
Mené rapidement 3-0 après avoir concédé
son service d'entrée, Ivanisevic ne pouvait
refaire son retard.
Après à peine une heure de jeu, les deux
acteurs du drame se retrouvaient dos à dos.
A la fin du troisième jeu de la troisième
manche, qu'Ivanisevic avait conclu d'un ace sur deuxième
balle, le Croate faisait venir le soigneur pour se
faire bander l'épaule gauche, celle-là
même qui l'avait tenu à l'écart
des courts pendant plusieurs mois. Mais le désir
de victoire du Croate était plus fort que la
douleur, et Ivanisevic faisait le break au sixième
jeu pour remporter la troisième manche en 31
minutes.
Dans la quatrième, la tension était à
son comble, et le grand Goran, plutôt calme jusque-là,
perdait le contrôle de ses nerfs quand l'arbitre
le sanctionnait pour faute de pied. Double faute, break
puis double break pour Rafter, qui enlevait le set
sur un point gagné au filet avec une maestria
déconcertante.
Après
cet incident, Ivanisevic, fulminant, rejoignait sa
chaise et tentait de se reconcentrer. Qui craquerait
le premier ? Ivanisevic, qui voyait se rapprocher le
spectre des ses trois finales perdues sur le gazon
londonien, ou Rafter, tétanisé par la
peur de partir à la retraite sur une défaite
?
Les deux hommes, qui ne pouvaient ignorer les enjeux
de cette finale, offraient au public survolté
un récital d'aces et de services gagnants dans
la cinquième manche décisive. Plus les
jeux défilaient, plus le public retenait ses
cris, à son tour gagné par la tension
qui habitait les deux joueurs. Ni Rafter ni Ivanisevic
ne se procuraient une seule balle de break. Jusqu'au
17e jeu, quand le Croate prenait le service de son
adversaire d'un retour gagnant.
Dans
le dernier jeu, Ivanisevic perdait le premier point,
avant de se ressaisir et d'obtenir une première
balle de match. On se demandait alors comment le grand
Goran, alors en pleurs, allait pouvoir servir. Double
faute. Deuxième balle de match. Double faute.
Sur la troisième, c'est Rafter qui repoussait
le rêve d'un lob astucieux. Sur la quatrième,
l'Australien ne pouvait rien faire. D'un ultime service
gagnant, Ivanisevic rejoignait les cieux qu'il avait
tant invoqués.
Avec
Reuters
Le
Monde, 11/07/2001

TENNIS
Le
Croate Goran Ivanisevic gagne enfin à Wimbledon
son premier titre du Grand Chelem
WIMBLEDON,
Patricia Jolly
envoyée spéciale
 |
Grâce.
Goran Ivanisevic remercie le ciel après
son triomphe à Wimbledon. (Photo AFP). |
Goran
Ivanisevic a achevé, lundi 9 juillet, dans l'après-midi,
son chemin vers la résurrection tennistique
en gagnant son premier titre dans un tournoi du Grand
Chelem, face à l'Australien Patrick Rafter (6-3,
3-6, 6-3, 2-6, 9-7).
Enfin,
le Croate a pu tenir contre lui la coupe salvatrice
comme un enfant perdu serre son ours en peluche."J'ai
attendu ça toute ma vie, a-t-il dit,toucher
ce trophée qui porte tous ces grands noms, j'en
ai vu d'autres l'embrasser. Aujourd'hui, je me fiche
de ne plus jamais gagner un match de ma vie. Enfin,
je suis le vainqueur de Wimbledon." Rempli de
wallabies (petits kangourous) gonflables, de maillots
de l'équipe nationale croate de football et
de perruques fluorescentes, le court central de Wimbledon
s'était transformé pour l'après-midi
en une sorte de Twickenham du tennis. Pour cette finale
exceptionnellement disputée un lundi en raison
des intempéries, le All England Lawn Tennis
and Croquet Club avait remis en vente le matin même
10 000 places à 40 livres (66,4 EURO ) pièce,
attirant une foule plus populaire qu'à l'accoutumée.
Tout
au long du match, les supporteurs des deux camps se
sont donné la réplique lors des changements
de côté en scandant "Rafter, Goran,
Rafter, Goran". "Je ne pense pas que Wimbledon
ait jamais connu ça et ça n'arrivera
sans doute plus jusqu'à ce que Tim -Henman,
le numéro un britannique éliminé
en demi-finales- parvienne en finale", a estimé
Pat Rafter, déjà finaliste malheureux
l'an passé face à Pete Sampras.
Cette
ambiance a survolté Ivanisevic. Après
1992, 1994 et 1998, le Croate n'aurait pas supporté
une nouvelle défaite en finale. Comme ceux qui
ont frôlé la mort racontent avoir revu
toute leur existence, il jure avoir vu toute sa carrière
défiler dans sa tête après la balle
de match. Il a dédié sa victoire à
son ami Drazen Petrovic, le meilleur basketteur européen
de sa génération, décédé
en 1993 dans un accident de la route.
Deux
ans de purgatoire
Pendant
les deux années de purgatoire au fin fond du
classement mondial que lui ont infligées les
caprices de son épaule gauche blessée,
Ivanisevic a, bon gré mal gré, appris
la patience. A vingt-neuf ans, il sait que ses années
sur le circuit sont comptées et semble mieux
maîtriser ses nerfs. Lundi, pendant la finale,
il a bien perdu la tête une fois, offrant quelques
instants le visage presque rassurant d'un Goran Ivanisevic
plus familier, mais il avait des circonstances atténuantes.
A
trois jeux à deux dans la quatrième manche,
sur une balle de break en faveur de Patrick Rafter,
il a commis une faute de pied, la seule de tout le
tournoi, alors qu'il pensait avoir réussi un
ace. Pour sa seconde balle de service, il a alors visé
la ligne centrale, pour entendre un "Out !"
retentissant. Persuadé qu'il allait se sortir
du mauvais pas dans lequel il s'était fourré,
voilà qu'il se retrouvait mené par 4
jeux à 2. Le temps de se calmer, il a dû
encore concéder son service suivant.
Mais
Rafter n'a pas senti d'ouverture. "L'occasion
-de gagner- était trop belle pour qu'il laisse
ce genre d'incident l'inquiéter et le briser,
a expliqué l'Australien. Il restait un set à
jouer, il le savait, je le savais. Il a bien servi
dans le cinquième, et il m'a battu."
Quatre
balles de match
Les
nerfs du Croate ont flanché une dernière
fois au moment de conclure dans la cinquième
manche. La tension était à son comble
dans cet ultime set si serré qu'on aurait volontiers
déclaré un match nul. Au moment de conclure,
les bras de Goran Ivanisevic se sont lestés
de plomb. Sur les deux premières balles de match,
il commit deux doubles fautes ; un lob de Patrick Rafter
a écarté la troisième, puis est
arrivé le coup droit salvateur de l'Australien
dans le filet sur une seconde balle de service de Goran
Ivanisevic. Arrivé à Wimbledon en 125e
position mondiale, l'invité croate du All England
Club a remercié ses hôtes bien au-delà
de leurs espérances, éliminant leurs
deux meilleurs représentants (Greg Rusedski
et Tim Henman) avant de s'adjuger leur trophée.
Il
est désormais en course pour le Masters, organisé
en fin d'année à Sydney (Australie).
Il envisagera ensuite l'intervention chirurgicale nécessaire
à la poursuite de sa carrière. Patrick
Rafter, lui aussi en délicatesse avec son épaule
et son coude, pourrait ne jamais revenir à Wimbledon.
Cette finale perdue l'a conforté dans l'idée
de faire en fin de saison une pause de six mois qui
pourrait bien tourner à la retraite sportive.
Patricia
Jolly
©
Le Monde
lemonde.fr,
08/07/2001

TENNIS
Goran
Ivanisevic se qualifie pour la finale de Wimbledon
Vainqueur
7-5 6-7 0-6 7-6 6-3 d'une rencontre en trois actes
perturbée par la pluie face à Tim Henman,
le Croate Goran Ivanisevic s'est qualifié pour
la quatrième finale de Wimbledon de sa carrière
et a brisé les espoirs du public britannique
de voir l'un des leurs s'imposer au All England Club
pour la première fois depuis 1936. Le Croate,
mouton noir du gazon londonien, tentera lundi de s'imposer
pour la première fois aux Internationaux de
Grande-Bretagne après ses finales perdues en
1992, 94 et 98. Premier joueur à atteindre la
finale en arrivant à Wimbledon avec une wild
card, Ivanisevic, 125e joueur mondial, trouvera sur
le chemin de la victoire l'Australien Patrick Rafter,
qui est venu à bout vendredi de l'Américain
Andre Agassi 2-6 6-3 3-6 6-2 8-6.
La
qualité du retour de service du Croate a sans
doute fait la différence dans une rencontre
qui opposait deux purs attaquants. Après la
rencontre, Henman refusait d'expliquer sa défaite
par les conditions de jeu exécrables : "Quelle
que soit la situation, il faut s'en accomoder".
"J'ai donné le meilleur de moi-même,
mais parfois cela ne suffit pas", a reconnu le
Britannique, qui a promis qu'il serait au rendez-vous
l'année prochaine.
"Dieu
m'a envoyé la pluie"
Ivanisevic,
quant à lui, remerciait le ciel : "C'est
le destin. Dieu
m'a envoyé la pluie vendredi quand j'étais
en difficulté. Il veut que je gagne". "J'avais
une wild card, je suis en finale, c'est le destin",
a-t-il ajouté. Un premier rideau de pluie tombait
sur la rencontre vendredi alors qu'Ivanisevic venait
de se faire hacher menu par Henman dans le troisième
set, abandonné 6-0. Samedi, les deux protagonistes
du drame revenaient sur les planches avec la ferme
intention d'en finir. Surtout Tim Henman, qui menait
alors 5-7 7-6 6-0 2-1. Mais la nuit avait porté
conseil à Ivanisevic, qui pénétrait
sur le court central avec un service à nouveau
performant. Le Britannique, qui serrait le poing entre
chaque échange, ne cédait pas. Jusqu'au
jeu décisif, où après avoir perdu
sa mise en jeu d'entrée, Ivanisevic faisait
deux fois le break pour remporter la manche. La cinquième
manche décisive pouvait alors tout juste commencer,
le temps pour Ivanisevic de claquer trois aces, portant
son total à 33.
Une
double faute qui fait mal
La pluie, véritable leitmotiv de cette rencontre
faisait à nouveau son apparition et ménageait
le suspense, renvoyant les supporters du All England
Club dans leurs pénates après 51 minutes
de jeu. Il n'en fallut pas autant à Ivanisevic
pour conclure le match. La partie reprenait dimanche
à 3-2 pour le Croate dans le dernier set, 30-15
pour Henman sur son service. Surmotivé, le Britannique
égalisait. Le grand Goran avait gardé
son service au chaud pendant la nuit et ne connaissait
aucune frayeur pour remporter sa mise en jeu. Henman,
lui, n'y était pas. Peut-être écrasé
par la pression, "Tiger Tim" se retrouvait
mené 15-40 sur son service à 4-3 pour
Ivanisevic. Deux bonnes premières balles lui
permettaient d'égaliser à 40A, mais ce
retour était gâché sur le point
suivant par une énorme double faute. Averti
deux fois auparavant, Henman était blâmé
par un retour dans les pieds qui le poussaient à
la faute, et vers le gouffre. Ivanisevic avait fait
le break, le public londonien était médusé.
Sur sa mise en jeu, le Croate se faisait peur en faisant
une double faute pour sa première balle de match.
D'un ace sur son deuxième service, Ivanisevic
se procurait une seconde balle en or. Un service de
plomb plus tard, il pouvait exulter.
Avec
Reuters
Le
Monde, 10/07/2001

TENNIS
Goran
Ivanisevic rêve toujours d'un triomphe londonien
Goran
Ivanisevic s'absorbe dans l'examen de son cordage.
Voilà trois jours que le Croate dispute à
Tim Henman une place en finale du Tournoi de Wimbledon.
Vendredi 6 juillet, il était en fâcheuse
posture quand la pluie a interrompu le match, à
2 sets à 1 et 2 jeux à 1 pour l'Anglais.
Son
service ne gênait en rien Tim Henman, magnifique
à la volée. Samedi 7 juillet, les deux
hommes n'ont joué que 51 minutes, juste assez
pour que Goran Ivanisevic revienne dans la partie (2
sets partout et 3-2). Alors, dimanche 8 juillet, au
moment de servir pour le match, le Croate ne pense
qu'à planter une série d'aces pour en
finir. Il vient de ravir le service de son adversaire
et mène 5-3 dans la cinquième manche.
Survolté pendant tout le match, le public du
central observe un silence pesant. Depuis soixante-trois
ans, aucun Anglais n'a disputé de finale ici
; depuis soixante-cinq ans, aucun d'eux n'a brandi
le précieux trophée.
En 1998 et 1999, Tim Henman s'était déjà
hissé en demi-finales, mais l'aura de son adversaire,
Pete Sampras, l'avait transformé en perdant
avant même son entrée sur le court. Cette
fois, toute l'Angleterre y croyait.
"Dieu
voulait que je gagne"
En
invitant Goran Ivanisevic, les membres du All England
Lawn Tennis and Croquet Club ne se doutaient pas qu'ils
signaient d'avance l'élimination de Greg Rusedski
en huitièmes de finale et de Tim Henman en demi-finales.
Malgré deux doubles fautes dans le dernier jeu,
le Croate s'est écroulé victorieux (7-5,
6-7, 0-6, 7-6, 6-3), sur leur gazon. Il est devenu
le premier invité à parvenir en finale
d'un tournoi du Grand Chelem.
"Dieu
voulait que je gagne, dit-il, il m'a envoyé
la pluie. J'ai eu une wild card, mais maintenant je
dois être l'ennemi public numéro un. Un
match de trois jours, c'est comme du cricket, sauf
qu'on n'a pas eu la pause thé. Aujourd'hui,
ça n'avait rien à voir avec le tennis.
C'était à qui aurait le plus de nerfs
et le plus de tripes."
Blessé
à l'épaule gauche, Goran Ivanisevic ingurgite
"cinq ou six antalgiques chaque soir", "prie"
pour que sa résurrection tennistique se poursuive
et promet à Tim Henman et à son splendide
jeu sur gazon un trophée à Wimbledon
"l'année prochaine ou dans deux ans".
Lundi
9 juillet, en finale, il devait rencontrer l'Australien
Pat Rafter, finaliste en 2000. Il refusait d'avance
une nouvelle déception, après ses trois
finales perdues, en 1992, 1994 et 1998 : "Si des
anges viennent dans mes rêves me dire : "Goran,
tu vas gagner Wimbledon, mais tu ne pourras plus jamais
toucher une raquette de ta vie", je signerai."
Patricia
Jolly
©
Le Monde
Le
Monde, 06/07/2001

TENNIS
A
trente ans, Goran Ivanisevic rêve de Wimbledon
Le
Croate s'est qualifié pour les demi-finales
en écartant le Russe Marat Safin en quatre sets.
Le joueur le plus imprévisible du circuit ATP
joue son meilleur tennis.
WIMBLEDON,
Patricia Jolly
envoyée spéciale
 |
Goran
Ivanisevic, triple finaliste à Wimbledon
en 1992, 1994 et 1998. |
Goran
Ivanisevic saute comme un cabri, lance sa chemise dans
les tribunes puis monte torse nu sur sa chaise. Il
vient d'éliminer en quart de finale le Russe
Marat Safin (7-6, 7-5, 3-6, 7-6) et se sent invincible.
"Je ne savais plus quoi faire, raconte-t-il.
Je savais que Tacchini (ndlr, son sponsor) avait
envoyé des chemises, alors je pouvais me permettre
d'en envoyer au public, je ne savais plus où
aller. Je ne pouvais pas jeter mes raquettes parce
qu'il ne m'en reste que trois." Irréprochable
de concentration pendant tout son match, il peut enfin
laisser s'échauffer cette tête qu'il s'applique
si efficacement à garder froide depuis le début
de la quinzaine.
Ses chances de parvenir au bout de sa quête insensée
une victoire à Wimbledon alors qu'il
est nº 125 mondial sont très réelles.
Triple finaliste en 1992, 1994 et 1998, il est aujourd'hui
le premier détenteur d'une wild card à
parvenir en demi-finale ici.
Dans le haut du tableau, il lui reste à venir
à bout, vendredi 6 juillet, du héros
national : Tim Henman. Vainqueur du jeune Suisse Roger
Federer (7-5, 7-6 8/6, 2-6, 7-6 8/6), il est soumis
à plus rude pression encore. Par deux fois,
en 1998 et en 1999, il s'est hissé en demi-finale
à Wimbledon avant de laisser sur sa faim tout
un peuple qui attend depuis la victoire de Fred Perry,
il y a soixante-cinq ans, la consécration d'un
Britannique.
"Toute l'Angleterre se demande déjà
si elle ne devrait pas avoir un jour férié
si Tim gagne le tournoi", s'amuse Goran Ivanisevic,
Le Croate sait de quoi il parle.
Son
parcours sur le gazon anglais lui vaut un regain de popularité
dans son pays natal. "C'est drôle, dit-il,
j'en prenais plein la tête avant de venir ici,
on critiquait ma façon de m'entraîner, on
me suggérait d'arrêter, on se demandait
pourquoi je faisais le déplacement, et aujourd'hui
il n'y avait pas une voiture dans Split pendant mon match.
Tout le monde regardait. Tout le monde m'aime. Je suis
à nouveau un héros."
Un
petit miracle
S'il
franchit l'obstacle Tim Henman, Goran Ivanisevic aura
encore affaire avec l'Australien Pat Rafter ou l'Américain
Andre Agassi, vainqueurs du Suédois Thomas Enqvist
(6-1, 6-3, 7-6) et du Français Nicolas Escudé
(6-7, 6-3, 6-4, 6-2). Mais seule son épaule
gauche, qui commence à rechigner, semble pouvoir
le stopper. Mercredi, contre Roger Federer, Goran Ivanisevic
a dû prendre des antalgiques. Pour le reste,
"les deux Goran", son bon et son mauvais
génie, pratiquent le meilleur tennis de leur
vie. Le troisième, le "Goran des urgences",
n'est là "qu'en spectateur".
Sa descente aux enfers revient à Goran Ivanisevic
par flashes. Il a touché le fond, en janvier,
aux qualifications de l'Open d'Australie, où
il a presque délibérément perdu
son premier tour. "Je ne sais pas pourquoi
j'ai fait ça mais je me suis réveillé,
assure-t-il. J'ai pensé que pour ce qui pouvait
être ma dernière année je pouvais
essayer de faire de mon mieux. Pour la première
fois de ma vie, je joue au tennis pour moi et c'est
formidable."
A ses débuts, il pensait à sa sur,
Srjdana, atteinte d'un cancer, aujourd'hui guéri
: "Je jouais pour elle car nous n'avions pas
d'argent, et mieux je jouais plus elle avait accès
à une bonne médecine." Puis
il y a eu la guerre. "Jouer pour mon pays et
ceux qui combattaient pour lui me motivait, affirme-t-il.
Quand ça s'est terminé, j'ai cherché
quelqu'un d'autre pour qui jouer mais je n'ai pas trouvé,
alors je me suis dit qu'après douze ans de travail
je méritais peut-être de jouer pour moi,
de m'offrir quelque chose."
Il y a dix jours, le cadeau dont il rêve n'était
qu'une chimère, mais Goran Ivanisevic a eu comme
une prémonition. "Lundi dernier, les
portes de Wimbledon se sont ouvertes, explique-t-il,
et quelque chose brillait, quelque chose s'est produit
que je ne peux expliquer, mais j'espérais qu'une
chose dans ce genre arrive." S'il gagne vendredi
6 juillet puis dimanche 8 juillet, le Croate aura tout
simplement accompli un petit miracle.
Patricia
Jolly
©
Le Monde
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