08/02/2006
MOUVEMENT
EUROPÉEN SEINE-MARITIME
L'ambassadeur
de Croatie à Rouen
L'ambassadeur
de Croatie en France, M. Bozidar Gagro, s'est rendu
à Rouen, capitale haut-normande, le mercredi
8 février, à l'invitation de M.
Bernard Deladerrière, président du Mouvement
Européen Seine-Maritime. A cette occasion, il
a donné une conférence ayant pour thème
principal le processus de négociation de la
Croatie avec l’Union européenne, ouvert
le 3 octobre 2005.
REVUE
DE PRESSE
Paris-Normandie,
11-12/02/2006
La
Croatie se présente à Rouen
Après avoir accueilli à Rouen l'ambassadeur
de Grande-Bretagne, le Mouvement européen de
Seine-Maritime récidivait mercredi avec son
homologue de Croatie.
Par
François HENRIOT
L'universitaire
Bozidar Gagro, 67 ans, est visiblement un homme «
heureux de retrouver la Normandie
». Car, ultime ambassadeur de Yougoslavie en
France, démissionnaire en 1991, il connaissait
bien « Jean Lecanuet et sa belle
ville », explique-t-il au Club de la presse
de Haute-Normandie. L'ambassadeur de Croatie estime
aussi : « Il faut développer une culture
européenne au niveau des citoyens, une culture
décentralisée, de contacts entre les
différentes entités. Et les ambassadeurs
doivent se déplacer...»
La
Croatie discute de son entrée dans l'Union européenne.
Bozidar Gagro se dit « persuadé que
la Croatie se trouve dans la dernière ligne
droite vers un statut de membre à part entière.
» Il présente les atouts de son pays :
« Européen par la géographie,
l'histoire, la culture, et avec un projet européen
tout à fait conforme. Nous pensons terminer
nos préparatifs d'ici deux ans, pour une adhésion
éventuelle en 2009. »
L'ambassadeur
croate précise les domaines dans lesquels son
pays doit encore avancer pour rejoindre les normes
européennes.
En
route vers l'Europe
«
La justice, d'abord. Nous sommes un pays en transition,
ayant subi une terrible guerre, à la société
bouleversée. Nous avons la corruption, des lenteurs
de traitement de certains dossiers. Et nous avons du
travail dans l'environnement, avec la gestion de l'espace,
du fonds immobilier. Notre tourisme doit se tourner
vers l'intérieur du pays. En 2005, sur 8,5 millions
de touristes, la Croatie a accueilli 600.000 Français
- NDLR : dont de nombreux Normands - et je pense
que ces Français ne viennent pas pour spéculer
ou seulement pour le soleil. Un jour viendra où
les opérateurs de voyages découvriront
l'intérieur de notre pays. »
L'invité
du Mouvement européen, confiant dans les relations
de la Croatie avec sa voisine, la Serbie, et moins
quant à l'avenir du Kosovo, de la Bosnie-Herzégovine
ou de la Macédoine, évoque, en réponse
à une question, la Yougoslavie communiste. Dont
il faisait pleinement partie, « sans être
un apparatchik, Tito était une personnalité
historique extraordinaire, mais un dictateur. Eclairé,
plutôt positif, mais gérant avec des manières
qui n'étaient pas celles d'un enfant de chœur...»
Site
: www.amb-croatie.fr
Le
Taurillon, magazine eurocitoyen,
13/02/2006
Paroles d'un postulant à l'adhésion
Quand
le Mouvement européen reçoit S.E. Monsieur
l’Ambassadeur de Croatie...
Par
Ronan BLAISE
Ce
mercredi 8 février 2006, le « Mouvement
Européen Seine maritime » avait l’honneur
de recevoir S.E. M. Bozidar Gagro, Ambassadeur de la
République de Croatie en France (depuis novembre
2001), venu dans la capitale haut-normande pour une
journée de rencontre auprès des décideurs
économiques et à la rencontre du grand
public rouennais. A
cette occasion, nous avons eu la chance de pouvoir
dialoguer avec cet invité. Dialogue dont nous
retranscrivons ici un très bref compte-rendu.
Le
4 octobre dernier, après bien des attermoiements,
l’Union européenne a finalement décidé
d’ouvrir des négociations d’adhésion
avec la Croatie. Quels sont donc les atoûts et
les handicaps de cette candidature croate ? Pourquoi
la Croatie désire-t-elle faire partie de l’UE
?
Ancien
vice-Ministre des Affaires Etrangères de la
République de Croatie indépendante (de
1991 à 1992) et ancien ambassadeur et représentant
plénipotentiaire de la République de
Croatie auprès du Conseil de l’Europe
et au Parlement Européen à Strasbourg
(de 1993 à 1996), S.E. M. Bozidar Gagro a tenu
à souligner que la demande d’adhésion
à l’Union européenne par son pays
correspondait à un désir profond des
populations de Croatie.
Un peuple croate qui considère que cette demande
d’adhésion est une demande naturelle légitimée
par l’Histoire, par la Culture et par la Géographie.
Ainsi, notre interlocuteur nous dira que les Croates
estiment avoir en fait toujours été ’’européens’’
puisque historiquement tournés vers Rome, vers
l’Europe centrale des Habsbourg et puisque toujours
restés en relations étroites avec l’Italie
de l’Humanisme et de la Renaissance.
Pareillement, en faisant acte de candidature, la Croatie
souhaite pouvoir rejoindre ce qu’elle considère
comme étant sa ’’famille naturelle’’
et une communauté d’élection. Tout
en affirmant son adhésion de principe, pleine
et entière, à un projet politique européen
qu’elle considère comme original et démocratique.
En tout cas, par la voix de son ambassadeur, la Croatie
a tenu à exprimer ses réticences à
l’égard du tout récent projet communautaire
de ’’zone de libre échange’’
dans les Balkans, projet perçu -au mieux- comme
une adhésion au rabais voire, au pire, comme
une tentative maladroite de restaurer l’ancienne
Yougoslavie...
Car
c’est bel et bien vers Bruxelles et vers l’
’’Europe’’ que souhaitent visiblement
aujourd’hui se tourner les Croates, et non vers
des Balkans dont ils ont visiblement trop souffert.
A
quelle date la Croatie pense-t-elle pouvoir rejoindre
l’Union ?
Aux
dires de l’Ambassadeur, la Croatie s’est
fixé de pouvoir terminer ses préparatifs
d’adhésion d’ici à deux ans
(en 2007-2008) et qu’elle espère bien
pouvoir remplir toutes les conditions d’adhésion
pour 2009 (en conformité avec l’accord
de stabilisation et d’association signé
avec l’UE en octobre 2001).
Mais notre invité soulignera à de nombreuses
reprises qu’il s’agit là davantage
d’un challenge que les Croates se donnent à
eux-mêmes que d’une date impérative.
En effet, il tiendra à nous répéter
qu’il était risqué de fixer quelque
date précise et qu’il ne faut donc pas
pas se mettre des dates impératives en tête
au risque d’être finalement extrémement
déçu, voire frustré, en cas de
report (ce qui, on nous le répétera à
maintes reprises, n’est pas l’état
d’esprit des Croates à l’égard
de l’UE).
En tout cas, à l’heure où il se
dit ici ou là que le gouvernement croate actuel
(du premier ministre Ivo Sanader, du parti d’obédience
’’chrétienne-démocrate’’
HDZ) est de plus en plus critiqué pour ses choix
économiques ’’européens’’,
M. l’Ambassadeur a tenu à souligner qu’il
était néanmoins optimiste et qu’il
avait pleinement confiance dans le dynamisme, la volonté,
les capacités d’adaptation, l’esprit
d’entreprise et dans le ’’désir
d’Europe’’ de ses compatriotes.
Quels
sont les principaux obstacles que rencontre aujourd’hui
la candidature croate ? Quelles sont les principales
difficultés restant à surmonter ?
A
cette question, M. l’Ambassadeur nous réaffirmera
qu’en faisant acte de candidature à l’Union
européenne et à son projet politique,
la Croatie en acceptait bel et bien les objectifs et
les disciplines. Et qu’elle s’efforcera
de remplir -honnêtement et au plus tôt-
les conditions d’adhésion définies
en commun.
Ainsi, il s’avère qu’une fois réglée
la difficile question des crimes et criminels de guerre
(qui, point souligné sans aucune ambiguité
par M. l’Ambassadeur, doivent effectivement pouvoir
être jugés par le TPI de la Haye...),
la Croatie entend scrupuleusement respecter les conditions
morales, politiques et économiques fixées
pour son adhésion.
Revenant sur les principales difficultées rencontrées
dans la constitution du dossier croate, M. l’Ambassadeur
soulignera que les principales difficultés constatées
concernent la nécessaire adaptation juridique
du droit croate en conformité avec les normes
européennes.
Autres questions importantes évoquées
lors de notre entretien : les demandes du gouvernement
croate liées à la protection de l’environnement,
à la défense des intérêts
matériels du peuple croate et à la protection
du patrimoine culturel national croate. Ainsi, la Croatie
tient -sujet visiblement sensible- à faire valoir
dans les Autorités de l’UE la nécessité
de permettre aux Croates de protéger efficacement
leur patrimoine urbain et leur droit légal à
la propriété immobilière et foncière.
Et ce, par une coopération efficace des Institutions
de l’UE avec les autorités croates dans
la lutte contre une spéculation immobilière
internationale tout particulièrement redoutée
sur le littoral dalmate.
Qu’est-ce
que la Croatie attend de son adhésion à
l’Union européenne ?
Ici,
M. l’Ambassadeur nous répondra que la
Croatie attend surtout de l’Union Européenne
qu’elle veuille bien l’accueillir en son
sein comme on accueillerait un membre de sa famille.
Car le peuple croate voit dans cette perspective d’adhésion
une possibilité renforcée de garantir
la paix et la stabilité dans les Balkans occidentaux
où les problèmes politiques et territoriaux
non réglés restent encore nombreux et
très sensibles (on pensera ici plus particulièrement
à la situation en Bosnie-Herzégovine,
au Kosovo et en Albanie). Puisqu’il s’agirait
là -en fait- pour la Croatie, d’une adhésion
permettant de consolider la paix, de la rendre pérenne
et de rendre enfin possible la réconciliation.
Car M. l’Ambassadeur n’aura de cesse de
nous répéter avec conviction qu’il
fallait tourner la page de la guerre et des nationalismes
intolérants pour désormais essayer de
vivre ensemble. Et que la politique de bon voisinage
était désormais la seule et unique perspective
politique envisageable pour l’avenir.
Et de souligner l’établissement de relations
bilatérales constructives et appaisées
avec la nouvelle Serbie démocratique d’aujourd’hui,
dont la Croatie ne pourraît qu’amicalement
encourager les efforts de réformes en vue d’une
éventuelle candidature d’adhésion
à l’Union européenne.
Qu’est-ce
que l’Europe peut attendre de la Croatie ?
M.
l’Ambassadeur nous aura expliqué que l’Union
européenne, en accueillant la Croatie en son
sein pourra ainsi bénéficier de l’éclairage
original que donnent à l’Europe les expériences
historiques vécues par le peuple croate :
Une expérience de guerre récente et douloureuse
(avec ses cortèges de morts, de réfugiés
et de personnes déplacées...), une cruelle
expérience des destructions causées par
un nationalisme subi.
(Et on pourra rappeler que M. Bozidar Gabro est né
en 1938 à Hodbina, au sein de la communauté
croate de Bosnie-Herzégovine...).
Et une tradition historique de compréhension
des idées de supranationalité puisque,
depuis le début du XIIème siècle
(dans le cadre du Royaume médiéval de
Hongrie puis de l’Empire autrichien des Habsbourg,
puis de la Hongrie autonome de 1867...), la Croatie
aura vécu l’expérience très
précise de l’Etat d’autonomie et
du ’’self-government’’ à
l’intérieur de cadres étatiques
beaucoup plus larges.
Pourquoi
avoir quitté la Yougoslavie, structure supranationale,
pour rejoindre l’Union européenne, autre
structure supranationale ?
Ici,
M. l’Ambassadeur nous aura répondu qu’il
n’y avait décidément rien de comparable
entre l’ancienne Yougoslavie et la nouvelle Union
européenne, projet politique dont il tient à
souligner l’originalité et le caractère
libéral (au sens politique) et démocratique.
Et ce, dans la mesure où l’ancienne fédération
yougoslave (1945-1991) n’avait de fédération
que le nom mais n’en était pas véritablement
une, sinon une caricature. Puisque ne respectant pas
l’Etat de droit, ni la démocratie, ni
les libertés fondamentales. Et puisque n’étant
de qu’un instrument déguisé de
l’hégémonie et de la domination
politique des Serbes sur tous les autres peuples de
la prétendue fédération yougoslave.
(Nb : Et on rappelera que M. Bozidar Gagro a exercé
des responsabilités ministérielles, comme
Ministre de l’Education et de la Culture, entre
1982 et 1987, dans le gouvernement ’’autonome’’
de la Croatie ’’fédérée’’.
Et qu’il fut -de 1988 à 1991- le tout
dernier Ambassadeur en France de la République
fédérale de Yougoslavie, démissionnaire
en septembre 1991 précisément pour ’’reprendre
sa liberté de parole’’ face au gouvernement
yougoslave).
Ainsi,
M. l’Ambassadeur nous aura souligné que
la Croatie pouvait fort bien s’accommoder d’une
véritable Europe supranationale respectueuse
des identités de chacun. Et qu’elle pourrait
aussi lui apporter son expérience, afin de rendre
possible une meilleure compréhension des principes
et logiques supranationales en termes de souverainetés
partagées et de répartition harmonieuse
des compétences.
Mais, en revanche, M. l’Ambassadeur de Croatie
a clairement exprimé les réticences du
gouvernement croate quant au tout récent projet
communautaire de ’’zone de libre-échange’’
dans les Balkans occidentaux (et concernant l’ensemble
de l’ex-yougoslavie, la Slovénie en moins,
l’Albanie en plus...). Un projet d’intégration
économique régionale dont les Croates
redoutent, visiblement, qu’il ne soit en fait
synonyme de retour dans le giron ex-yougoslave et balkanique
(alors que c’est bel et bien d’ ’’Europe’’
que rêvent les Croates, aujourd’hui...).
Et
c’est ainsi que la Croatie poursuit sa longue
marche vers l’Union européenne. Avec,
en vue, un objectif très clair et enthousiasmant
: l’adhésion pleine et entière,
si possible pour 2009...
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