21-24/06/2001
POESIES CROATES
19e Marché de la Poésie
Dans
le cadre du Marché de la Poésie, la 2e nuit du Marché
mettra à l'honneur les poésies croates, yiddish, targuies, argentines
et yougoslaves. Les poésies croates de Sibila Petlevski et de Kresimir
Bagic seront lues en français en leur présence par Maïté
Cotton et Yves-Jacques Bouin. Les poètes croates Slavko Mihalic et Hrvoje
Pejakovic seront également présentés.
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Le
public de la 2e nuit de la Poésie |
Ni
un salon ni une foire du livre, encore moins un festival, le Marché
de la Poésie se veut avant tout un lieu de rencontres et d'échange
entre éditeurs, poètes et public, le Marché rassemblera pour
sa 19e édition quelque 500 éditeurs de poésie, français
et étrangers.
Lire les poèmes
de Sibila Petlevski
Lire
les poèmes de Kresimir Bagic
Lire
les poèmes de Slavko Mihalic
Lire
les poèmes de Hrvoje Pejakovic
Place
Saint-Sulpice - Paris 6e - du 21 au 24 juin 2001.
« 2e nuit du Marché » : samedi 23 juin
2001 de 20 h à minuit. Podium du Marché. Entrée libre.
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Sibila
Petlevski récite un de ses poèmes. |
Sibila
Petlevski
Née en 1964 à Zagreb. Poète, écrivain,
essayiste, théoricienne et critique littéraire, traductrice de l'anglais
et du macédonien. Actuellement présidente du P.E.N. croate. Plusieurs
prix littéraires lui ont été décernés. Sa poésie
a été traduite en différentes langues étrangères.
Sonnet de la lune
Colomb a découvert
un fil de mélancolie dans le marbre rosé
De la poitrine d'Isabelle, assise sur une dune, transie jusqu'à l'arête,
Tout en pensant: Tiens, même le murmure des sirènes ne parvient plus
à m'étonner.
En chassant les néréides, mon harpon d'une murène a percé
la tête.
Les restes orgueilleux de la sauvagerie du nouveau continent. Autour d'eux s'étendent
Des cercles du bois essarté. En peau de castor se fait encore l'échange
dans ce pays.
Contre un castor vous obtenez des bottes rouges faites de votre peau, pour le
retour en patrie.
Ses plantes du pied blessées connaissent la distance des boudoirs et des
rotondes.
Troublé est le souvenir de la piscine du jardin dont la surface n'était
mue
Que par la nageoire de la reine qui le saluait et qui en vain tel un écueil
à présent
Attend le retour de son marin. Difficiles désormais sont les temps.
Le roitelet pêche au-dessus du lit séché. Les bouleaux de
la région sont disparus.
Toujours plus semblable à la lune devient cette contrée où
se multiplient les cratères.
Tactique de la terre brûlée. Importation des verges de punition.
Stratégie militaire.
traduit
du croate par Vanda Miksic
L'état
des choses
Prudente,
d'une oreille je suis toujours près de la terre -
j'entends cliqueter le long des rails la conjonction de tes pensées,
tes mâchoires serrées grincent. Je vois ton Père semer
la discorde entre les serpents, ainsi l'aspic est mordu par la vipère.
As-tu la foi ? Ou fais-tu
plutôt ce que les merles font :
tu chantes dès que la pluie cesse et fais comme le chien qui doit,
poussé par une force désespérée, retourner au maître
avec la proie ?
Ou encore cherches-tu à boucher tes doutes profonds avec du coton ?
J'ai entendu ton coeur qui
d'un coup de pied a été projeté dans l'air
par le Bonheur opulent. Les élans se ternissent, sombrent dans le noir,
as-tu dit alors. L'indifférence raccourcit le temps de la victoire.
Une fois, j'ai réussi à me couper l'oreille sur un brin d'herbe
acéré. Je
voulais connaître l'état des choses qui imprégnait
la terre, et savoir d'où l'eau de mon fleuve montait.
traduit
du croate par Vanda Miksic
Dans le passé
De les mêler est ce
que la vie de mes cartes a su
Mieux faire. Il ne pouvait pas y avoir de véritable
Jeu. Avec lui me disputer je voulus
A cause de Notre père sur un coin de la table.
Cette nuit de ses yeux la
croûte des scrupules j'oubliai d'enlever.
C'est pourquoi il refusa de regarder vers le haut dans les jours passés.
Au-dessus du gouffre qu'avec du noir dans le désespoir il colorait,
Le visage contre le vent, encore empourpré depuis hier. Cicatrisée,
Une plaie, minuscule, sur
la lèvre inférieure, dit comment la première
fois on a mis les cartes sur la table où une dame de pique était
posée.
Un fantôme lui a presque tiré la mort de la manche, et ma chair
Scintillaient de gouttes de sueur. En l'air on s'est d'abord envolé
dans un éclat de
honte. Et ensuite tombé bas. Notre nausée un sac sans fond était,
mais peu importe. Le destin nous a battu les cartes, et le trèfle est la
félicité.
traduit
du croate par Brankica Radic
J'ai tué ma langue
Ten thousand war-worn mariners revere
My late husbands virtue. The trumpet sounds
Hollow. The same with my excuse.
Dix mille marins épuisés
par la guerre rendent hommage
A la vertu de mon époux défunt. Du clairon le son
Retentit creux. Des poignées de mots vides ne sont
Qu'une faible excuse. Une meute de chiens fouille, de rage
Poursuit ma trace. Les écrivains
des mémoires
D'autrui pourraient me chasser du livre. Des fantômes
Nous talonnent. J'ai tué mon époux. De vieux renards,
Des loups rossés me croient venue du royaume
Marsien. Peut me dégrader
quiconque ma nudité désire.
Mariée avec la langue, à la liberté péniblement je
suis parvenue.
Punissez-moi. Le bandeau noir à la tête le long du quai je vais partir.
Même s'il était
vrai que de toutes les eaux de frontière les nôtres sont les plus
Profondes, je n'en suis pas une preuve valable, car une fois tombée
Je ne toucherai pas de fond. Je continuerai de là même où
je m'étais arrêtée.
traduit
du croate par Vanda Miksic
Ceinture de branches
Viens vis, pleure avec moi,
dans le même cadre ta pensée avec la mienne insère
Et je tresserai pour toi une ceinture de branches. Si tu désires la mettre
vraiment
Tu la mets, mais tu la passe ensuite, à la prêtresse qui de l'autel
sert
Une messe pour tous les temps passés et accomplis. Dans une caverne de
fées l'enfant
Avec un conte en toi je
vais enchanter. En une jolie stalactite de bricoles je déposerai,
Tout objet de querelles et des contrariétés qui dans la coupe de
patience longuement
dégouttent. Toi, viens vis, pleure avec moi. Des avis de décès
je t'apprendrai
A écrire. Quand on détruira des mots, laisse ton moi, la force de
ton discernement
Dans les mains d'amis, parvenir
morts. Et n'hésite pas beaucoup quand la tête
Du lit en fougère de bois tu verras. Au sommeil abandonne-toi. Il n'est
plus facile
De parler à travers l'écorce de l'arbre dans lequel je vis. Viens,
l'accueil avec fête
Et pompe pour toi j'organiserai
et ne t'étonne pas quand à l'aube tu trouveras
les anges du ciel hérisser leurs plumes. La ceinture déjà
offerte je te demanderai de rendre.
Tu refuseras, diras : " A une branche je me tiens. Cette dernière
il me faudra. "
traduit
du croate par Brankica Radic
« Agis simplement, comme cette occasion le veut,
Verse le vin jeune dans les vieilles barriques ».
Christopher Smart
Plaisir de la conduite
S'illumineront tous les
tristes visages d'hommes et tous les garçons
enjoliveront leurs lèvres avec des sourires, leurs bras fracturés
avec des attelles
ils maintiendront. Bientôt les Instructions pour les rêveurs
arriveront
dans leurs boîtes à lettre. Ils vont s'affranchir du joug, se libérer
des peines habituelles.
Le mécanisme de la
pensée se modifie tous les jours plus rapidement.
Le suc d'un cordon avec le bout d'un autre cordon entremêle
et de lui-même se fera l'entrelacement, ressemblant à un nud
coulant. Quand
les fantasmes s'unissent, les lendemains victorieux avec une allure de femme sur
les ailes
du bonheur volent, une ombre
joyeuse enlace les dormeurs puis meurt. Avant
de lâcher son âme, l'avenir conduit ses garçons attristés
à faire un tour agréable. Chacun boit un toast, remercie souriant.
Le démon du présent tourmente les enfants de la misère, délaissés
et maltraités,
orphelins de cette vie qui
même après la vie, car sait ne pas exister vraiment,
n'arrête pas de frapper. Sauf dans le rêve, s'il est humide et brûlant.
traduit
du croate par Brankica Radic
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Kresimir
Bagic à la 2e nuit de la Poésie |
Kresimir
Bagic
Né en 1962 à Gradite. Poète,
écrivain, essayiste, théoricien, critique, enseigne la stylistique
à la Faculté des Lettres de Zagreb. A enseigné la langue
croate à la Sorbonne. Auteur du panorama de la prose croate contemporaine
Les facteurs du sommeil léger.
300 mètres
au-dessus de la terre
à quoi réfléchit
une gouttelette de pluie
pendant qu'elle tombe
pendant qu'elle est à 300 mètres
au-dessus de la terre
sait-elle planifie-t-elle
cherche-t-elle un trottoir
une chaussure un parapluie un désert
un ongle sur lequel tomber
fait-elle la guerre au vent
ou cela lui est-il égal
ou bien son âme
est restée dans le nuage
et avec lui a-t-elle à l'avance
dissout chaque centimètre
lequel s'est dévidé
dans sa mémoire
A-t-elle peur
du tigre
qui attend dans la forêt
et défend au feuillage de chuchoter
à l'abeille de bourdonner
à la fourmi de dire
"j'ai soif"
Traduit
du croate par Marin Andrijasevic
L'Ascension
Subitement la montagne,
haute,
blanchie par la neige,
se dresse devant moi.
Je la regarde et elle me
dit: grimpe!
Et moi, je grimpe.
Je rassemble la neige.
J'offre à la blancheur
des flocons de voix.
A chaque mouvement augmente
le rideau muet des cieux.
Lorsque, enfin, j'atteinds
le sommet,
je m'y allonge pour me reposer
et m'incline devant la couronne des cieux.
Mais la montagne ne me laisse
pas de répit, elle dit:
je me suis égarée en toi,
maintenant c'est toi la montagne.
Et elle se froisse en un
éclair,
disparaît sous terre,
en un grain de poussière.
Hébété,
je reste suspendu en l'air
comme une vulgaire étoile dans un théâtre de marionnettes.
Traduit
du croate par Marin Andrijasevic
Le toucher, le regard vers la rose
le regard
regard vers la rose
au parfum du vers
ayant conçu et anéanti
la troisième planète
il ne pouvait pas s'arrêter
nous ne pouvions pas
l'arrêter
et le porter à la maison
dans lui
on aime haït vole
se tait surtout
disparaît avant le premier clin d'oeil
la voix que j'ai inspirée
m'a transformé en amas de terre
inapte à habiter
quelle main
et quand
recourra-t-elle à ce silence obscur
pour recouvrer la forme
pour que je recouvre la parole
traduit
du croate par Vanda Miksic
La maison
tout va bien,
je n'ai pas
besoin de médecin, je lis
le journal, entre deux grandes
fumées, deux injections
d'immunité, je construis la maison,
j'établis mon paradigme personnel,
je décline les enchevêtrements des os,
les oasis des muscles, les organes
intérieurs, le cerveau.
je saigne légèrement pour tromper.
les invités sont à la maison, la maison
s'écroule, brûle. la fumée est son
début et sa fin.
l'odeur du brûlé est l'odeur du sang
et l'odeur de la couleur d'imprimerie,
l'appel, le vocatif.
entre deux grandes fumées, deux
"chapitres d'une histoire
commune", le plan de mon corps
est codé soigneusement.
tout va bien. je n'ai pas
besoin de médecin.
traduit
du croate par Vanda Miksic
|
Vanda
Miksic, Brankica Radic et Sibila Petlevski |
Slavko
Mihalic
Né
en 1928 à Karlovac. Poète, écrivain, journaliste, il a été
rédacteur en chef de plusieurs revues littéraires, initiateur de
l'événement littéraire 'Zagrebacki knjizevni razgovori' (Conversations
littéraires de Zagreb). Auteur de l'anthologie La poésie croate
(avec Ivan Kusan, éd. Seghers, Paris, 1972). Actuellement il est rédacteur
en chef de la revue Forum, ainsi que le président de l'Association des
écrivains croates.
L'homme à
la lampe
Il descend l'escalier lève
la lampe, ancienne
sensation de l'ordre dans l'absurdité, pourquoi n'en voit-on pas
le visage? Cet ordre, a-t-il des dents, la faim le surprend-elle
comme un coup de foudre? Tout n'est qu'un
faible pressentiment. Une petite chanson plutôt,
apprise il y a longtemps, filant de par le monde
tels des wagons déserts. A qui appartient cet esprit
qui n'accepte pas de nouveautés, qui répète toujours
la vieille matière des tréfonds, la raison de l'homme
à la lampe ou de celui qui dans la gêne écrit
des vers? Et tel un oiseau en cage, il sautille
d'un perchoir à l'autre, s'attriste ou se réjouit.
L'image ne pâlit pas. Captée par une manoeuvre habile
au milieu de sa propre irréalité, elle s'étonne
d'exister encore. L'homme descendant
l'escalier, cette même inexistence qui lui
est propre, lève la main avec la lampe
en vain, car dedans il n'y a pas une goutte d'huile, quel
sens pourrait avoir l'entassement de la neige,
les images disparaissent, à présent on voit -
le pressentiment de l'ordre n'était qu'une fausse alerte.
traduit
du croate par Vanda Miksic
Les adieux
Avant de fermer les persiennes,
avant d'envoyer les meubles
au premier antiquaire,
avant d'abattre les pierres
de la cheminée, avant de te mettre
le manteau sur les épaules,
promène-toi dans
le jardin et regarde
combien de fleurs il y a soudain,
écoute le chant des moineaux
qui ne nous abandonnent jamais.
Avant de mettre ces quelques
petites
choses dans ta valise,
avant de rompre la clé
de la porte verrouillée,
réfléchis,
ce paysage peut-il
exister sans toi à cet endroit,
ne s'écroulera-t-il, tous les fils
retirés, derrière toi.
traduit
du croate par Vanda Miksic
Je traverse Zrinjevac effleuré par la mer
Je traverse Zrinjevac, effleuré
par la mer.
Le ciel crie de joie, la foule nue murmure.
Le bateau est en train d'aborder le café Splendid.
Il se peut que dans le coeur
je porte la mer
qui en appelle une autre dans les rues étroites.
C'est dimanche; le mistral laboure les trottoirs déserts.
Les phares de l'esprit s'allument
et s'éteignent.
La joie de la pensée libre trouve place
pour les morts et les vivants.
Les siècles égarés finalement retrouvés.
Les poissons prononcent
le silence sacré.
Même si la mer devient furieuse,
le sens ne se noie pas.
La tempête est la purification
de l'éternelle douleur croate.
La mer m'effleure et je
déploie
mes branches.
Toute racine tremble
dans sa feuille argentée.
La tour annonce midi, la marée
monte jusqu'aux toits.
Nous sommes le bateau d'un
million d'habitants,
sans l'intention de renoncer.
traduit
du croate par Vanda Miksic
Piège à souvenirs
Ses fleurs étaient
le susurrement timide.
Croîs-tu encore, grêle prunier,
du côté sud de la maison,
que la changeante réalité a transformé ensuite
en piège à souvenirs...
Presses-tu toujours tes poings menus
contre les seins d'azur, si doux
au palais d'un somnambule de douze ans
qui dans le transport embrasse sa chemise...
Tout était trop évident, trop rationnel.
Le rêve a crevé ses propres yeux.
Le bruissement, puis l'armée. L'étincellement, puis la guerre.
Comment supportais-tu la solitude dans ces
nuits sanguinaires, car les yeux du garçon
étaient tournés vers le ciel, où dans les ténèbres
grondaient les anges métalliques...
Les explosions ont changé la disposition du coeur.
Longtemps après rien ne se passait,
mais à présent j'aimerais, dans la seule nuit qui reste,
ériger un monument au prunier.
Les feuilles entre mes doigts. Sans fruits
pourtant. Le monde a brouté toute sa
douceur originaire.
traduit
du croate par Vanda Miksic
Maître, éteins la chandelle
Maître, éteins
la chandelle, les temps sérieux sont à la porte.
De nuit plutôt compte les étoiles, gémis pour la jeunesse.
Ta parole indocile pourrait s'arracher de sa laisse.
Plante l'oignon dans ton potager, fends le bois, débarrasse le grenier.
Il est mieux que personne ne remarque tes yeux étonnés.
C'est ton métier: tu ne peux rien taire.
Si tu n'y résistes pas et une nuit reprends la plume,
maître, sois raisonnable, ne t'occupe pas de prophéties.
Tente de noter le nom des étoiles.
Les temps sont sérieux, on ne pardonne rien à personne.
Seuls les clowns savent comment s'en tirer:
ils pleurent ayant envie de rire et ils rient quand de pleurs
leur visage est déchiré.
traduit
du croate par Vanda Miksic
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Les
poètes croates au 19e Marché de la Poésie. |
Hrvoje
Pejakovic
Né
en 1960 à Zagreb. Poète, critique, essayiste, membre de la rédaction
des revues 'Pitanja' (Questions) et 'Europski glasnik' (Messager européen),
rédacteur à la maison d'édition 'Hrvatska sveucilisna naklada'.
Auteur de l'anthologie du poème en prose croate Chimère, notre maîtresse
en collaboration avec Z. Mrkonjic et A. Skunca en 1992. Il est décédé
en 1996. Son recueil des poèmes Ville interdite
a été récemment publié en français aux éditions
Est-Ouest internationales.
Ars poetica
Les chanteurs chantaient,
les lecteurs tournaient les pages, j'étais là-bas. Si tu veux appelle
ça paysage matinal, si tu veux fin de chemin : les tas de dynamite vétuste,
ce désordre de la fable d'hier, une perceuse poétique braquée
sur le cur du jour qui nous enveloppe de honte. J'étais là-bas,
mais sur le côté chaud de la peau seulement le même barbelé
toujours, ce jardin abandonné auquel tu écrivais des lettres. Je
pense que nous ne pourrons pas. Je pense que nous n'avons pas, ne savons pas,
ne sommes pas ou quoi qu'il puisse être dit dans un moment pareil.
traduit
du croate par Brankica Radic
Et un poème désespéré
Bien qu'il soit probablement
prématuré d'en parler
je pense ce soir quand même
devoir te dire que mon espoir
qu'une fois tout terminé
on osera peut-être sourire comme après
un malentendu désagréable
heureusement écarté à temps
au fil des jours s'affaiblit de plus en plus.
traduit
du croate par Brankica Radic
Dans le train vers le sud
Elle poussera un cri d'effroi, rêvant la certitude
D'être dans le train qui ne s'arrête jamais
Milan Milisic: " Train de nuit "
" Et pour toujours,
pour toujours, ici ? " murmures-tu effrayée, le front appuyé
contre la vitre sale. Quoi d'autre pourrais-je te dire sur ce train que tu ne
saches déjà ? La fatigue éteint chaque nom, le souffle des
lointains (promis, compromis) moisit entre les pages du livre. Ici, ma chère,
au milieu du plastique, du métal, du ricanement des roues, ici, s'étouffant,
visage vers le mur. Jamais n'a existé le vent de nuit, jamais l'endroit
où se croisent les parallèles. Quoi d'autre pourrais-je te dire
? Quoi d'autre pourrais-je te dire?
traduit
du croate par Brankica Radic
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