Des jours et des nuits plein phare
En Croatie, les sentinelles de la Méditerranée accueillent les vacanciers ayant soif de solitude et d'air marin. Les 48 phares disséminés le long du littoral de la Dalmatie sont progressivement réhabilités. Douze d'entre eux accueillent déjà les amateurs d'originalité. Isolement assuré.

Dubrovnik - Sophie Massalovitch
Publié dans le Figaro du 20 juin 2001, page 19

Sur le littoral dalmate ou sur les îles de la mer Adriatique, des phares sont progressivement transformés en gîtes. (DR)

Les 48 phares disséminés le long du littoral de la Dalmatie et sur quelques-unes des 900 îles qui le parsèment sont, à l'initiative de Plovput, le service croate des phares et balises, progressivement réhabilités.

Douze d'entre eux accueillent déjà les amateurs d'originalité. L'an prochain, 5 autres seront accessibles. Grâce à ce projet lancé en 1995, ces phares élevés au XIXe siècle (le plus ancien date de 1818, le plus récent de 1884), aux temps de la domination austro-hongroise, à l'aide de la fameuse pierre blanche de Dalmatie, celle avec laquelle le palais de l'empereur Dioclétien à Split a été édifié, ainsi que le parlement de Vienne, ou encore la Maison-Blanche à Washington, retrouvent leur lustre.
Si quelques phares comme Sveti Petar à Makarska se dressent sur le continent, la plupart sont perdus en mer. Un bateau conduit les candidats à l'isolement sur l'îlot désigné, pour ne les rechercher que le jour convenu (généralement au bout d'une semaine).

Même si le véritable gardien du phare, souvent accompagné de son épouse, fournit volontiers le poisson, qui compose l'essentiel des menus, et ne rechigne pas à dépanner ses voisins occasionnels en huile ou en pain (pétri et cuit sur place), la vie en autarcie reste la règle pendant tout le séjour. Bien sûr le bateau peut, à la demande, apporter les denrées requises mais le voyage sera facturé en sus.

Du port de Dubrovnik, trois quarts d'heure de navigation suffisent pour atteindre Sveti Andrija, un îlot de 400 m de long sur 80 de large, couvert de pins et de garrigue, au cœur de l'archipel des Élaphites, entre les îles de Lopud, Kolocep et Sipan. La roche tombe à pic dans la Méditerranée. Un débarcadère y a été aménagé. Un sentier gagne le sommet de l'îlot où le phare, bâti en 1873, dresse sa masse blanche. Le cri des mouettes accompagne l'ascension (malcommode quand on est chargé). Le matin, on se tiendra sur la face exposée à l'est, largement ensoleillée et protégée du vent. L'après-midi, la façade arrière du phare, prolongée elle aussi d'une terrasse, est à son tour baignée de soleil.

Le gardien de Sveti Andrija se souvient de la cérémonie du centenaire du phare. Il a cessé depuis longtemps de compter les années passées sur cet îlot. Il s'y était installé jeune homme avec son épouse. Ses enfants y sont nés. Quand ils ont été en âge d'être scolarisés, il a demandé sa mutation sur la presqu'île de Savudrija (en Istrie). Quatorze fois ils ont déménagé leur armoire et leur lit. Sa femme prépare le café, à la turque (un dépôt de marc reste au fond de la tasse), avant de retourner s'affairer dans le potager en contrebas. Il répare son matériel de pêche. Si l'envie prend au visiteur de partir en mer, il prête sa barque. Ou l'emmène, indiquant où tendre les lignes, de quel rocher plonger. Le couple prête volontiers main forte aux touristes mais sait aussi s'éclipser, au point qu'on a souvent le sentiment d'être seul à veiller sur la destinée du phare.
À la nuit tombée, des signaux lumineux trouent l'obscurité à intervalles réguliers. Éviter alors d'allumer des torches sur la terrasse et fermer avec précaution les volets afin qu'aucune lueur ne filtre de la maison.

Pour séjourner à Sveti Andrija, à Susac, à Palagruza, l'île la plus éloignée de la côte et la plus proche des eaux italiennes, bordée d'une sublime plage de sable blanc, sans autres distractions que celles offertes par le cadre naturel, il est indispensable d'aimer la mer, le soleil, le vent... Mais, plus que tout, de se suffire à soi-même. Lire, dessiner ou simplement rêver des journées entières à l'ombre des pins. En somme, retrouver une forme de sérénité, loin du monde. Et peut-être bien en oublier le temps.

De l'Istrie à la côte dalmate

Y ALLER
 Route. Via l'Italie (tunnel du Mont-Blanc, Milan, Venise, Rijeka), Split est à 1-946 km de Paris.

 Ferry. En empruntant les lignes de la Jadrolinija Ancône-Split-Zadar-Sibenik-Korcula ou Bari-Dubrovnik. A partir de 363 F le passage de la voiture et 496 F la cabine double (50% de réduction pour les moins de douze ans) le trajet Ancône-Split. Consulter Bemextours (01.46.08.40.40 et www.bemextours.com) ou Croatie-Tours (01.46.67.39.10 et www.croatie.com).

  Avion. Croatia Airlines (01.42.65.30.01 et www.croatiaairlines.hr) assure d'avril à octobre deux vols hebdomadaires directs de Paris vers Split et un vol hebdomadaire pour Dubrovnik (2235 F sans les taxes) ainsi que des vols quotidiens via Zagreb à destination de Split, Dubrovnik, Pula ou Zadar. Nouvelles Frontières (0-825.00-825 et www.nouvelles-frontières.fr) propose un vol charter de mi-juin à mi-septembre Paris-Split (à partir de 1 400 F). Motivaction (03.28.43.81.60 et www.motivaction-int.fr) propose également un charter pour Split de mai à octobre (à partir de 1 200 F).

FORFAITS
Deux spécialistes du voyage en Croatie proposent des séjours dans les phares.

Croatie Tours (01.46.67.39.10 et www.croatie.com): 5.325 F la location d'un appartement pour six personnes, une semaine entre le 8 et le 29 juillet à Sveti Andrija. Ajouter 1.895 F par personne pour les vols entre Paris et Dubrovnik et 870 F pour le transfert jusqu'au phare.

Bemextours (01.46.08.40.40 et www.bemextours.com) loue pour 4.310 F la semaine (entre le 7 juillet et le 25 août) le phare de Veli Rat, sur l'île de Dugi Otok, au large de Zadar. Ajouter 325 F pour le passage de la voiture sur le ferry.

Plovput (www.plovput.hr, en anglais) loue en direct sur son site Internet des appartements dans les phares. Compter 500 F par jour à Sveti Andrija en juillet-août (ajouter le prix du transfert).

Maestral (www.travel.maestral.hr, en anglais) loue également des appartements dans les phares via Internet.

A SAVOIR
Les prix comprennent l'hébergement dans le phare, le changement hebdomadaire des draps et des serviettes, et la taxe de séjour. Ajouter le transfert en bateau jusqu'à l'île: 800 F pour gagner Sveti Andrija, 1.500 F pour Susac, 2.500 F pour Palagruza. Struga peut être rejoint en ferry (35 F par personne et 280 F par voiture).

On gagne Savudrija, Rat Zub et Sveti Ivan depuis Pula, Tajerske Sestrice de Zadar, Sveti Petar, Susac, Palagruza et Struga de Split, et Sveti Andrija de Dubrovnik. Savudrija (près d'Umag en Istrie), Rat Zub (près de Porec), Sveti Petar (à Makarska), Struga (sur l'île Lastovo), peuvent être rejoints en voiture.

Les appartements sont meublés sommairement (literie, étagères, table et chaises), avec cuisine équipée (lave-vaisselle, réfrigérateur) et salle de bains avec WC. Poste de télévision dans chaque appartement. Electricité fournie par un groupe électrogène. Aucune nourriture ni produits d'entretien ne sont prévus. De l'eau minérale en bouteille est fournie (2 litres par personne et par jour). Une citerne d'eau potable est installée dans la plupart des phares. Le gardien dispose d'une liaison radio. Les téléphones portables (abonnement international) fonctionnent.

Plovput délivre un permis de pêche ou de plongée (pêche sous-marine réglementée). Mais pas de matériel à louer. Les touristes s'engagent à respecter l'environnement, à ne pas abandonner de détritus, à ne pas allumer de feu et... à ne pas faire briller de lumière la nuit. En cas d'infraction, Plovput les rapatrie à terre, sans dédommagement.

RENSEIGNEMENTS
Office national croate de tourisme (01.45.00.99.55 et www.ot-croatie.com).

Sélection de phares (avec description détaillée)

Sélection de liens sur le tourisme en Croatie

Fiche pratique Se rendre en Croatie

Informations consulaires (visas, etc.)