02/10/2003

DISTINCTION
Miroslav Radman, Grand Prix Inserm 2003 de la recherche médicale

Le professeur Miroslav Radman a reçu au Collège de France des mains du ministre de la Recherche, Claudie Haigneré, le Grand Prix Inserm 2003 de la recherche médicale. Membre de l'Institut, il est actuellement directeur de l’unité Inserm « Génétique moléculaire, évolutive et médicale » et professeur à la faculté de Necker. Miroslav Radman a notamment découvert deux mécanismes biochimiques permettant aux bactéries de réparer les lésions de leur ADN.

Claudie Haigneré, ministre déléguée à la Recherche, remet le Grand Prix Inserm 2003 à Miroslav Radman, en présence de Alain Grimfeld, représentant le ministre de la Santé (à g.), de Monique Capron, lauréate 2002, et de Christian Bréchot, directeur général de l'Inserm. | photo : M. Depardieu.

Le professeur Miroslav Radman, directeur de l'unité Inserm 571, "Génétique moléculaire, évolutive et médicale" à la faculté de médecine de Necker-Enfants malades, est le lauréat du Grand Prix Inserm 2003 de la recherche médicale pour l'ensemble de ses travaux sur les mécanismes des changements génétiques : réparation de l'ADN, mutagénèse et évolution des espèces. Ce prix lui a été remis le jeudi 2 octobre 2003 au Collège de France par Claudie Haigneré, Ministre déléguée à la Recherche et aux nouvelles Technologies.

Cette distinction est destinée à rendre un hommage appuyé à une personnalité de la recherche scientifique dont les travaux ont contribué aux progrès dans la connaissance de la physiologie humaine, en thérapeutique et plus largement dans le domaine de la santé.

Le Grand Prix Inserm 2003 de la recherche médicale récompense l'ensemble des travaux de Miroslav Radman sur les mécanismes des changements génétiques : réparation de l'ADN, mutagénèse et évolution des espèces

La remise du "Grand Prix Inserm 2003 de la recherche médicale" dont la quatrième édition a eut lieu en présence de Christian Bréchot, Directeur Général de l'Inserm et de Monique Capron, lauréate 2002 pour ses travaux dans les domaines de l'immunologie et Présidente du Conseil d'Administration.


Un chercheur qui bouleverse les dogmes

Radman se destinait à devenir biologiste marin à Split (Croatie), sa ville natale. Entré à l'université de Zagreb (Croatie) en 1962 (année du prix Nobel de médecine à Watson, Crick et Wilkins pour la découverte de la structure de l'ADN) il se met à explorer les arcanes de cette nouvelle molécule.

Il découvre à 27 ans le système "SOS", mécanisme permettant aux bactéries de survivre aux lésions de l'ADN. Il montre que la genèse des mutations ne procède pas d'un mécanisme aléatoire et inéluctable mais d'un processus cellulaire génétiquement contrôlé. Il travaille à décrire les mécanismes d'induction de la décision cellulaire SOS, ainsi que les enzymes génératrices de mutations : les SOS polymérases.

En 1976, après son post-doctorat à Harvard, il met en évidence, un second système majeur de réparation : le mismatch repair. Cette découverte lui vaut en 1992 le Grand prix de l'Académie des Sciences Charles Léopold Meyer.

En 1989, à l'Institut Jacques Monod de l'université Paris VII, Radman démontre que le mismatch repair est également un système ubiquitaire "éditeur" de l'ADN, c'est-à-dire qu'il assure non seulement la fidélité de la réplication mais aussi celle de la recombinaison génétique, en empêchant la recombinaison entre chromosomes ou séquences chromosomiques similaires. Est alors découvert l'ensemble du mécanisme de la barrière génétique entre espèces proches chez les bactéries.


Une personnalité atypique

VOIR AUSSI

Miroslav Radman élu à l'Académie des Sciences
M. Radman : réparation de l'ADN et la genèse des mutations (PDF)
Miroslav Radman : Réflexions d'un généticien
 "Mutation, évolution et sélection" Écouter la conférence (Real Video) donnée à l'Université de tous les savoirs (UTLS).
 Libération : Miroslav Radman, comme un poisson dans le gène.

Radman est avant tout un homme qui aime la vie. Chercheur audacieux et précoce, hors des conventions, il transgresse les dogmes scientifiques pour créer sa propre voie. Esprit libre et impertinent, il ne craint pas de remettre en cause les dogmes établis tout en défendant avec fougue ses convictions. Archétype du chercheur en mouvement avec son époque, à la fois pragmatique et conceptuel, il a une vision créatrice de l'avenir dans lequel il se projette en permanence.

Trop latin pour avoir jamais eu envie de s'installer outre Atlantique, dans les années 1990 Radman coopte deux jeunes et brillants chercheurs, Ivan Matic et François Taddei. Le trio prend le nom de "TaMaRa" pour Taddei, Matic et Radman. Ils entament alors, ensemble, une vaste étude multidisciplinaire sur le rôle des mutateurs génétiques et physiologiques dans l'évolution adaptative des bactéries. L'équipe soudée, noue de nombreuses collaborations interdisciplinaires et fait une série de découvertes décisives sur l'évolution de la virulence et de la résistance aux antibiotiques.

PARCOURS

1944. Naissance à Hvar, au large de Split (Croatie)
1966. Licencié en biologie expérimentale, faculté des Sciences, université de Zagren (Croatie)
1967. 3e cycle en biologie expérimentale, Institut Rudjer Boskovic, Zagreb (Croatie). Assistant du professeur I. Supek, à l'Institut pour la philosophie des sciences et de la recherche de la paix, académie de Zagreb des sciences et des arts. Travail expérimental avec M. Drakulic à l'Institut R. Boskovic, Zagreb (Croatie). Chercheur doctorant chez les professeurs M. Errera et R. Thomas, dép. de Biologie moléculaire, université libre de Bruxelles (Belgique).
1969-70. Chercheur post-doctoral chez le professeur R. Dévoret, CNRS, Gif-sur-Yvette (France).

1970-73. Research fellow chez le professeur M. Meselson, dép. de Biochimie et de Biologie moléculaire, université de Harvard, Cambridge, MA (Etats-Unis).
1972. Professeur associé de génétique moléculaire, dép. de Biologie moléculaire, université libre de Bruxelles (Belgique).
1973-82. Chef du laboratoire d'enzymologie de l'ADN, dép. de Biologie moléculaire, université libre de Bruxelles (Belgique).
1981-83. Professeur associé (1re classe), université Paris-Sud, Orsay (France).
1983-89. Directeur de recherches (2e classe) au CNRS, Institut Jacques Monod de l'université Paris-VII (France), professeur visiteur à l'Université libre de Bruxelles (Belgique).
1988-90. Professeur visiteur au National Institute of Environmental Health, National Institutes of Health, Research Triangle Park, NC 27709 (Etats-Unis).
1990. Directeur de recherches (1re classe) au CNRS, Paris (France).
1998. Professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH), faculté de médecine Necker-Enfants malades, université Paris-V (France). Directeur de l'unité Inserm 571 "Génétique moléculaire, évolutive et médicale".
2000. Conférencier honorifique Katzir Katchalsky, Institut Weizmann (Israël).

2002. Professeur visiteur, faculté de médecine, université de Zagreb (Croatie). Élu membre régulier de l'Académie des Sciences (Paris).

A l'écoute permanente de ses collaborateurs et étudiants, passionné du travail partagé dans le rire et la joie, Miroslav Radman est toujours ouvert aux hypothèses les plus audacieuses.


Des idées toujours mises à l'épreuve des faits

Soucieux des retombées médicales de ses travaux, Radman a été à l'origine de la création de deux sociétés de biotechnologie qui ont décliné des applications l'une sur le plan de la production de nouveaux produits de synthèse et l'autre sur celui du développement de nouvelles méthodes d'analyse de l'ADN.

La première "Mixis" créée en 1989, installée à la faculté de Médecine de Necker depuis 2000, s'est donnée pour objectif la création de nouveaux produits génétiques à partir de la recombinaison d'enzymes ou organismes aux propriétés particulières.

La seconde "Gene Check Inc" créée en 1993 à pour vocation de mettre au point des méthodes appliquées notamment pour des tests de reconnaissance d'ADN utilisés, aujourd'hui, en criminalistique.

Enfin, Radman est un bâtisseur. Toujours porteur de projets novateurs, Radman a imaginé de fonder dans sa ville natale de Split, la "Villa Médicis" de la recherche biomédicale en Europe : le MILS, Méditerranean Institute for Life Sciences. Comme son nom l'indique, cet institut s'inscrit d'emblée dans une double vocation géopolitique et scientifique. Destiné à devenir rapidement un creuset d'excellence entièrement dédié au brassage d'idées, il devrait permettre à ceux qui le souhaitent, de tester leurs projets scientifiques en marge d'une démarche habituelle.

 

 

 

Discours de Claudie Haigneré,
ministre chargée de la Recherche et des Nouvelles Technologies
Collège de France, jeudi 2 octobre 2003

Allocution à l'occasion de la remise
du Grand Prix INSERM de la recherche médicale


Madame la Présidente,
Monsieur le Directeur général,
Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Mesdames et Messieurs,
Cher Miroslav Radman,

C'est pour moi un immense plaisir de me trouver parmi vous pour la remise du Grand Prix INSERM de la recherche médicale, dans cette superbe enceinte du Collège de France.

Créé il y a seulement quatre ans, ce prix est déjà devenu, par la qualité de ses lauréats et par son rayonnement, une tradition bien ancrée dans notre communauté. Les grands scientifiques qui ont été honorés par ce prix, Arnold Munnich, Yves Agid, Monique Capron, illustrent, au plus haut niveau, la richesse et la diversité de ceux qui travaillent à l'INSERM.

Et dans cette brillante dynastie, nous allons bientôt inscrire le nom du Professeur Miroslav Radman.

En cette année 2003 largement marquée par l'ADN, à travers le cinquantième anniversaire de la découverte de sa structure et la publication de la version achevée du génome humain, quoi de plus naturel, quoi de plus éclairant que de décerner le Grand Prix INSERM à un pionnier d'une discipline à part entière de la biologie moléculaire : la réparation de l'ADN ?

Car les festivités célébrant l'ADN qui ont jalonné l'année 2003 ne signifient pas que la recherche sur cette molécule mythique fasse désormais partie des livres d'histoire. Miroslav Radman est parmi nous pour en témoigner de la manière la plus brillante.

Les pierres angulaires, le système SOS et le système de réparation des mésappariements, que vous avez posées dans les années 70 sont la base d'une recherche pleine de vitalité, que ce soit pour la caractérisation détaillée, dans les différents règnes du vivant, des partenaires protéiques impliqués dans ces systèmes ou pour les implications majeures de ces concepts sur les mécanismes moléculaires de l'évolution adaptative et des barrières d'espèces.

Votre œuvre scientifique impressionnante, Cher Miroslav Radman, dès le début des années 70, son omniprésence dans les " text books " actuels de biologie moléculaire pourraient nous laisser croire que nous allons couronner aujourd'hui la carrière d'un vert septuagénaire. C'est pourtant un chercheur jeune, actif, encore loin de l'âge de la retraite, que nous honorons ce soir.

Signe de cette jeunesse, parmi tant d'autres que l'on voudrait évoquer, vous aimez citer Lewis Carroll et la Reine rouge de L'autre côté du miroir pour expliquer aux néophytes la capacité des bactéries à muter...

Votre œuvre illustre surtout, de manière à la fois symbolique et concrète, toute la richesse qui peut résulter d'une recherche fondamentale conduite au plus haut niveau d'excellence.

Sur le plan du symbole, les mêmes connaissances ont apporté leur lumière, d'une part, sur l'évolution adaptative et le jaillissement de la vie dans toute sa diversité et, d'autre part, sur les phénomènes de cancérogenèse et de vieillissement.

Sur le plan du concret, vous avez su, à partir de vos découvertes fondatrices chez Escherichia coli, développer des champs d'applications dans le domaine des maladies humaines, avec notamment l'identification de certains gènes de susceptibilité du cancer et la compréhension de mécanismes de résistance aux antibiotiques chez des bactéries pathogènes. Des développements encore plus concrets de vos recherches ont abouti, après dépôt de brevets, à la création de deux entreprises de biotechnologies.

Ces exemples illustrent le caractère polymorphe de l'activité d'un grand chercheur et soulignent l'importance de ne surtout pas trop cloisonner les différents types d'activité, mais plutôt de laisser à chacun la flexibilité de décliner sa créativité dans différentes réalisations.

A propos de cloisons, justement, j'ai relevé avec intérêt, et amusement, qu'à votre installation en 1998 à Necker avec votre équipe, votre premier geste a été de faire abattre toutes les cloisons du laboratoire. Tout un symbole, là encore !

A côté de résultats scientifiques hors du commun, votre travail est marqué de deux caractéristiques remarquables que je voudrais aussi rapidement souligner.

Tout d'abord cette faculté, dès le début de votre carrière, à évoluer dans un contexte international : européen avant l'heure, avec une hésitation entre la Belgique et la France, après avoir quitté votre Croatie natale, puis ce passage aux Etats-Unis, où vous avez à la fois beaucoup apporté et beaucoup reçu.

Votre implantation en France, au début des années 80, a été un enrichissement pour notre pays et pour vous aussi, je l'espère. C'est pour nous, en tout cas, une grande fierté que de vous compter, depuis un an maintenant, parmi les membres réguliers de l'Académie des Sciences.

Votre exemple démontre, j'en suis convaincue, que nous pouvons offrir un contexte de travail attractif pour les jeunes chercheurs brillants dont nous avons besoin pour porter plus haut l'excellence scientifique française et européenne.

La seconde caractéristique remarquable que je tenais à souligner dans votre parcours est la constitution de ce groupe soudé autour de vous, avec notamment le trio "TAMARA ", pour François TAddei, Ivan MAtic, Miroslav RAdman. Ce trio au nom poétique est né de votre volonté de mutualiser vos ressources et de signer le plus souvent possible vos contributions ensemble puisque, comme vous le dites : "Aucun d'entre nous n'est plus intelligent que nous tous réunis ".

A une période où nous avons reconnu l'importance pour de jeunes scientifiques d'acquérir rapidement une autonomie vis-à-vis de leurs mentors, afin de favoriser l'expression de leur créativité, votre expérience illustre la force d'un groupe de chercheurs mettant en commun réflexion et moyens sur une durée suffisamment longue.

Cet exemple doit nous inspirer pour trouver le juste équilibre entre la multiplication des laboratoires indépendants et l'agrégation de compétences au sein de plus grands ensembles pouvant atteindre une masse critique et jouer un rôle déterminant sur la scène internationale.

Je sais d'ailleurs que vous avez un rêve, celui de créer une sorte de " villa Médicis de la recherche en Europe ", un Institut Méditerranéen pour les Sciences de la Vie, situé dans votre Croatie natale, et dont la vocation serait, outre d'accueillir des scientifiques talentueux, de " penser l'impensable ". Tout un programme, en effet…

J'aimerais aussi redire combien je suis attachée à la marque de reconnaissance que constitue l'attribution d'un prix. Certes le critère essentiel de reconnaissance d'un grand savant réside dans sa production scientifique, validée par ses pairs.

Mais la remise d'un prix, et en France le Grand Prix INSERM figure déjà parmi les distinctions les plus prestigieuses, est l'occasion d'honorer tel ou tel grand acteur de la science de manière plus visible, au sein de notre communauté et au-delà, vers le grand public. Nous devons nous efforcer, par ces distinctions, à la fois de faire savoir que la science est source de réussite et de grande satisfaction individuelle, et de profiter de ces événements pour faire mieux connaître à nos concitoyens les formidables avancées de la recherche contemporaine et le merveilleux métier des chercheurs qui en sont à l'origine.

Vous êtes d'ailleurs, cher Miroslav Radman, un candidat de choix, si j'ose dire, pour offrir un visage souriant de la recherche.

D'après ce que j'ai pu lire sur vous - et je suis sûre que vous nous en offrirez encore la preuve ce soir - toute conversation, même sérieuse, avec vous, est faite de rires et de jubilation.

Votre collègue et ami Jean-Claude Weill ne me démentira pas, lui qui dit joliment à propos de vous : " la chose la plus gaie dans la recherche, c'est de parler science avec un copain de façon libre et détendue, sans jugement ni rivalité, juste pour le plaisir du ping-pong "…

Et du plaisir, de la joie il y en a partout où vous passez, notamment dans les couloirs de Necker où, dit-on, le doyen Patrick Berche vous croisa la veille d'un départ aux Etats-Unis, chargé d'un énorme dossier à déposer au Ministère de la Santé et à celui de l'Education avant minuit, sous peine de ne pas être nommé dans cet établissement… C'est du reste lui qui se chargea de trier les différents formulaires et de faire l'envoi en recommandé…

Gaieté, amitié, générosité, autant de termes qui vous caractérisent à merveille. Qui caractérisent aussi le séminaire d'un genre un peu particulier dont vous avez eu l'idée : un " Beer club " organisé tous les mercredis à la faculté pour permettre aux doctorants et post-doctorants de discuter de manière conviviale avec les chercheurs et directeurs d'unités. Toujours selon le doyen de la faculté, " un véritable creuset d'idées où la science se fait en s'amusant ". Si cela ne contribue pas à l'attractivité des carrières de la recherche…

Je suis donc sûre que vous serez sensible au caractère festif de l'événement qui nous rassemble aujourd'hui.

Et je voudrais que notre rencontre, ce soir, soit un vrai moment de fête, la fête d'un grand scientifique, génial et généreux, en un mot charismatique, et la fête de notre recherche médicale, de ses succès et de tous ceux qui construisent ces réussites au quotidien. Sans oublier ceux qui sont présents à leurs côtés, amis et familles. Je sais que la vôtre, votre femme, Dannitza, vos enfants, vous entoure ce soir et qu'elle partage notre fierté et notre reconnaissance.

Je vous remercie de votre attention.

 

REVUE DE PRESSE

Libération, 06/10/2003

BIOLOGIE
Le chercheur a reçu le grand prix Inserm de la recherche médicale.
Miroslav Radman ou l'ADN réparé

Par Corinne BENSIMON

«J'étudie comment la vie résiste aux changements en changeant elle-même, et cela concerne le vieillissement, le cancer, l'évolution des espèces.» En une phrase roulée par l'accent des rivages croates, le biologiste Miroslav Radman a résumé les trente ans de travaux qui lui ont valu de recevoir, jeudi soir au Collège de France, le grand prix Inserm de la recherche médicale 2003.

Radman a initié trois découvertes majeures. Il a dévoilé le système génétique verrouillant la fameuse «barrière de l'espèce», qui empêche deux ADN dissemblables de s'assembler. Il a découvert les processus génétiques permettant à la molécule d'ADN de réparer sans cesse les lésions induites par des produits chimiques, les UV ou le stress. Et il a prouvé que cette réparation, parfois erronée, génère des mutations génétiques.

Programme. Ce faisant, il a renversé le dogme selon lequel les mutations sont des événements aléatoires, démontrant au contraire qu'elles sont l'effet d'un programme génétique de réparation que l'évolution s'est gardée de parfaire. En effet, les erreurs de réparation de l'ADN sont source de survie chez les bactéries exposées à des stress (les antibiotiques en sont un exemple), car elles génèrent une diversité de mutants dont certains pourront survivre. En revanche, chez les organismes supérieurs, dont l'homme, ces erreurs sont cause de vieillissement et de cancers.

Ces découvertes fondamentales (1), récompensées cinquante ans après celle de l'ADN comme support de la vie, placent les mécanismes de réparation de l'ADN et leurs erreurs au centre de l'évolution du vivant. Pourtant, Radman a choisi, jeudi, de ne pas s'attarder sur les espoirs que ces avancées suscitent en biologie, médecine ou biotechnologie. Sans doute parce que, âgé de 59 ans, il a un sens aigu de l'économie de l'ennui et de la vertu du rire.

«95 % d'échecs». Il s'est amusé à dire des choses bien moins convenues, en cette cérémonie officielle au Collège de France, en présence de la ministre déléguée à la Recherche, Claudie Haigneré. Dire, par exemple, qu'«il n'est pas possible de diriger la recherche fondamentale», qu'«il faut laisser les chercheurs s'auto-organiser car si on ne leur fait pas confiance, alors il faut les sélectionner autrement ou fermer la boutique», qu'il faut encourager «le goût du risque» en acceptant «95 % d'échecs» incompressibles, puisque les idées nouvelles «sont très très rares et sont le plus souvent une mosaïque d'idées» assemblées au hasard des rencontres...

Miroslav Radman, le biologiste réputé «imprévisible», qui se revendique «ingérable», que l'on dit «nobélisable», qui a abattu les cloisons de son unité de l'hôpital Necker pour favoriser le travail d'équipe, a plaidé pour la création d'un laboratoire sans frontières, «où des chercheurs se rassembleraient pour travailler et échanger leurs idées, le temps d'un projet». «Une maison close de la recherche», s'esclaffe-t-il à la tribune du Collège de France. Une «villa Médicis» de la recherche biomédicale, à Split, dans l'ancienne résidence d'été de Tito, précise la direction de l'Inserm. Pour son rêve, Radman a déjà l'appui de huit Prix Nobel.

(1) Libération des 28 mai 1996 et 3 juin 1997.
© Libération

 

 

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