11/04/2004
REVUE
DE PRESSE
LE
MONDE
Stipe
Mesic attend le soutien de Paris à la candidature
de la Croatie à l'UE
A
l'Elysée, le président croate a vanté
les progrès réalisés par son pays
et plaidé la bonne foi dans ses relations avec
le TPI.
Le président croate, Stipe Mesic, a bon espoir que
la Commission de Bruxelles donne prochainement un avis
favorable à la candidature
de son pays à l'entrée dans l'Union et que des négociations
s'ouvrent à la fin de 2004. Il a pu vérifier le
soutien de Jacques
Chirac lors d'un entretien
à l'Elysée, mardi 6 avril.
"Nous pensons que, d'ici à
2007, la Croatie sera prête pour l'adhésion",
dit-il, en faisant valoir ce qui a été
accompli depuis sa dernière visite à
Paris, en 2003, et qui paraissait à l'époque
"inimaginable" : "Nous avons
mené à bien l'harmonisation de notre
législation avec la législation communautaire,
approuvé une loi sur la protection des minorités,
accéléré le retour des réfugiés
et la restitution des propriétés..."
UNE
VIDÉO AU SECOURS DU GÉNÉRAL GOTOVINA |
Selon
des images d'archives diffusées, mercredi 7 avril 2004,
par la télévision croate, le général Ante
Gotovina, en fuite depuis son inculpation par le TPI,
avait rappelé ses troupes à l'ordre lors de l'opération
"Tempête"
qu'il commandait, en août 1995, à la suite de laquelle
furent perpétrées des exactions à l'encontre de civils
serbes. Le film montre le général Gotovina lançant, furieux,
lors d'une réunion d'officiers : "C'est une honte ! Vous
agissez comme des barbares et des vandales." "Je vous demande
de faire preuve de responsabilité", ajoute-t-il en frappant
du poing sur la table. Après la diffusion de ces images,
le ministre croate de la justice, Vesna Skare-Ozbolt, a
déclaré à la télévision : "Je regrette et je me demande
pourquoi cette cassette vidéo n'a pas été diffusée plus
tôt." L'avocat du général Gotovina, Ivo Farcic, a souligné
l'importance de ce document : "Je suis certain que l'inculpation
aurait été formulée d'une manière complètement différente
si le TPI avait été en possession de ce document", a-t-il
déclaré. - (avec AFP) |
A l'issue de l'entretien, l'Elysée
a fait savoir que le président français
apprécie notamment "les efforts de la
Croatie pour répondre aux demandes du Tribunal
pénal international de La Haye". C'était
une réponse à la réserve émise,
quelques jours plus tôt, par le Parlement européen
qui, dans un rapport par ailleurs positif, estimait
que Zagreb devait encore améliorer sa coopération
avec le TPI.
Le jour même de la venue de M.
Mesic à Paris, six anciens hauts responsables
inculpés de crimes de guerre se sont rendus
à La Haye. D'autres les avaient précédés
et, en mars, le chef du contre-espionnage Franjo Turek,
accusé, selon la presse, d'entraver les enquêtes
du TPI, a démissionné. "Toutes
les personnes qui ont été convoquées
à La Haye, que ce soit comme témoin,
comme suspect ou comme inculpé, s'y sont rendues
; toutes, sauf une. La Croatie ne doit pas être
pénalisée pour ce seul cas",
insiste M. Mesic.
MANQUE DE ZÈLE
Ce cas est celui de l'ancien chef de
l'armée croate, Ante
Gotovina, en fuite depuis son inculpation par le
TPI, en juillet 2001. Certains pays européens,
comme la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, font de la
reddition du général Gotovina une condition
au développement des relations de l'Union européenne
avec Zagreb.
Lorsqu'on évoque devant lui
le manque de zèle reproché aux autorités
croates dans ce cas, M. Mesic s'emporte : "Mais
on pourrait reprocher la même chose à
la France ! Gotovina dispose d'un passeport français
en plus de son passeport croate. Je ne veux pas dire
qu'il est en France, mais qu'il a pu se déplacer
dans le monde avec ce passeport français."
Ante Gotovina est un ancien de la Légion étrangère.
"Nos services, dit encore M. Mesic, ont fait
tout leur possible ; à un moment, il a fallu
constater qu'il était introuvable."
Quant au retour des réfugiés,
dont l'Europe fait aussi une condition, M. Mesic
plaide la bonne foi. "La Croatie, dit-il, n'a
pas toujours été un Etat de droit, mais
maintenant elle l'est, pour tous ses citoyens, quelle
que soit leur origine." La tâche était
difficile : régions rurales en cours de déminage
(lent), habitations détruites impliquant un
lourd effort de reconstruction,
nécessité de reloger les Croates de Bosnie
qui, dans de nombreux cas, se sont installés
dans des logements abandonnés par des Serbes
pendant la guerre... Les Serbes
de Croatie reprochent aux autorités la lenteur
de la mise en œuvre des lois sur le retour et
sur la restitution des propriétés.
Aujourd'hui, parmi les Serbes
qui ont souhaité rentrer en Croatie (c'est-à-dire
moins de la moitié de ceux qui sont partis pendant
la guerre), 90 % sont rentrés, fait valoir M.
Mesic. Le gouvernement a pris l'engagement d'avoir
restitué d'ici à la fin de 2004 à
leurs propriétaires les 4 000 logements encore
indûment occupés, et donc d'avoir relogé
d'ici là les occupants, pour la plupart Croates
de Bosnie.
Stipe Mesic se félicite que
l'alternance
au gouvernement de Zagreb, en janvier,
n'ait pas remis en cause "l'essentiel"
: la conversion du pays aux normes européennes
et à l'Etat de droit. Et il entend bien poursuivre
la tâche, à laquelle il s'est personnellement
attelé, de renouer des liens avec les pays voisins.
Malgré les évolutions décevantes
de certains, comme la Serbie, "nous n'abandonnerons
pas nos efforts de coopération", affirme-t-il.
Claire
Tréan
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