AFP,
25/02/2004
REVUE
DE PRESSE
CULTURE
La
"photo de guerre" à l'honneur dans un prochain
musée à Dubrovnik
DUBROVNIK (Croatie) - Un officier serbe tend une
bouteille d'eau à un Kosovar albanais avec pour fonds de
toile des maisons en flammes. Le geste est en apparence humanitaire,
mais le regard terrorisé du vieillard assoiffé,
trahit l'horreur vécue par les Albanais lors du conflit
du Kosovo.
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Ces
images "parlantes" ainsi que nombreuses autres, sont l'oeuvre
d'une dizaine de photographes ayant couvert les conflits
qui ont déchiré l'ex-Yougoslavie dans les années 1990. |
photo Hrvoje Polan, AFP |
A côté, deux Serbes, père
et fils, posent fièrement devant des maisons en ruines
à Vukovar, ville martyre de Croatie lors de guerre serbo-croate.
Le grotesque atteint son comble lorsqu'un paramilitaire serbe
prend de l'élan pour frapper du pied le cadavre d'une femme
musulmane, à peine assassinée dans les rues de Bijeljina
(nord-est de la Bosnie), lors du conflit bosniaque.
Ces images "parlantes" ainsi que nombreuses autres,
sont l'oeuvre d'une dizaine de photographes ayant couvert les
conflits qui ont déchiré l'ex-Yougoslavie dans les
années 1990. Elles sont regroupées dans ce que les
organisateurs souhaitent prochainement devenir "le premier
musée au monde consacrée à la photographie
de guerre", accueilli par la cité croate de Dubrovnik
(sud).
"Je
suis confiant que bientôt, le ministère croate de
la Culture va accepter notre demande pour nous accorder le statut
de musée", déclare Wade Goddard, le responsable
du projet, lui-même photographe de guerre.
L'exposition
est baptisée "Sang et miel".
A
l'affiche: Ron Haviv, Jon Jones, Christopher Morris, Bjorn Larsen,
Jan Grarup, Noël Quidu, Darko Bandic, Yannis Behrakis, Srdjan
Ilic et Andrew Testa.
"Les
gens pourront admirer le travail des plus grands photographes
de guerre mais notre but est de changer l'image hollywoodienne
de la guerre et de montrer la réalité cruelle et
les horreurs des conflits", explique Wade.
Le
musée qui va organiser des séminaires éducatifs
contre la guerre, va également héberger des expositions
consacrées au conflit israélo-palestinien, aux attentats
anti-américains du 11 septembre 2001, à la guerre
en Afghanistan ainsi qu'à l'invasion de l'Irak par les
forces américaines.
Au
mois de septembre, l'Agence France-Presse sera présente
avec une exposition intitulée "Dix ans de guerre",
ajoute-t-il.
L'idée
et le financement du musée appartiennent à l'homme
d'affaire bruxellois, Frédéric Handres, admirateur
du travail des journalistes de guerre.
Le
choix s'est facilement porté sur la magnifique Dubrovnik,
cité médiévale classée patrimoine
mondial de l'Unesco, assiégée et bombardée
pendant trois mois en 1991 par l'armée yougoslave.
Jusqu'à
présent, plusieurs centaines de milliers d'euros ont été
investis dans le musée, situé dans la vieille ville,
6 rue Antuninska.
Des
moyens techniques modernes -- dont une demi-douzaine d'écrans
plasma et une petite salle de cinéma --, y ont été
déployés (www.warphotoltd.com).
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Les
photos ont regroupées dans ce que les organisateurs souhaitent
prochainement devenir "le premier musée au monde consacrée
à la photographie de guerre", accueilli par la cité croate
de Dubrovnik. | photo Hrvoje Polan,
AFP |
Les
photos encadrées, présentées format tableau
(41x51 cm), renforcent l'image de musée. Une technique
particulièrement coûteuse, à partir du charbon
liquéfié, a été utilisée pour
les imprimer ce qui leur donne une durée de vie de plus
de 100 ans.
Dans
les salles, des hauts parleurs diffusent une musique indistincte.
"Cet effet, doit encourager les visiteurs à communiquer
entre eux. Nous ne voulons pas être un musée dans
le sens classique du terme", explique Wade.
Certaines
photos, portant l'autographe de l'auteur, se vendent à
des prix variant entre 800 et 1.800 euros.
En
dépit du prix prohibitif, nombreux ont été
ceux qui ont décidé d'acheter, dont récemment,
un "Américain connaisseur de la région, impliqué
dans l'élargissement de l'Otan", explique Wade qui
refuse de dévoiler le nom de son client.
"L'argent
est réinvesti dans le musée", souligne-t-il.
©
AFP
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