LE SOMMET
DE ZAGREB : REVUE DE PRESSE FRANÇAISE
Le Figaro
20/11/2000
LUE prête
à aider les pays de lex-Yougoslavie
Les
Quinze se sont mis daccord lundi sur un projet de déclaration que
devrait adopter vendredi le sommet de Zagreb. Daprès ce texte, lUE
est disposée à soutenir fortement les pays de lex-Yougoslavie
sils sengagent sur la voie de réformes politiques et économiques
profondes.
BRUXELLES
- Laccord sur ce projet est intervenu lors dune réunion à
Bruxelles des ministres des Affaires étrangères de lUE. La
présidence française de lUnion est en train de mettre la dernière
touche à cette déclaration qui, indique-t-on de mêmes sources,
convient globalement à tous les pays concernés qui participeront
au sommet.
La philosophie
générale de ce texte est que lUnion européenne est
disposée à soutenir les pays de lex-Yougoslavie, à
la condition quils se dotent dinstitutions fortes, respectent les
droits de lHomme, et coopèrent entre eux. Faisant référence
aux changements intervenus en République fédérale de Yougoslavie
(RFY, Serbie et Monténégro), avec lélection à
sa présidence de Vojislav Kostunica qui a mis fin à une décennie
de dictature de Slobodan Milosevic, la déclaration met en exergue la volonté
de lUE davoir "une approche individualisée" avec
chacun des pays de lex-Yougoslavie. Un accord dassociation entre lUE
et la Macédoine doit ainsi être signé mercredi, et louverture
de négociations entre les Quinze et la Croatie en vue dun accord
similaire devrait être formalisée lors du sommet de Zagreb. Concernant
lAlbanie, la déclaration devrait demander à la Commission
européenne de préparer un rapport lan prochain "en vue
de la préparation dun accord dassociation".
Joschka
Fischer, ministre allemand des Affaires étrangères, a insisté
lors dune conférence de presse pour quil ny ait pas "de
concurrence négative" entre les États de la région.
Le sommet de Zagreb "doit envoyer un message dintégration à
long terme de ces pays à lEurope", a-t-il ajouté. Les
chefs dÉtat et de gouvernement des Quinze, de RFY, Croatie, Bosnie-Herzégovine,
Macédoine et Albanie doivent assister au sommet de Zagreb. La Slovénie
ne sera représentée que par son ministre des Affaires étrangères.
La question
de la présence de Milo Djukanovic, président du Monténégro,
na pas encore été réglée. M. Djukanovic a fait
savoir quil nentend pas se rendre à Zagreb comme simple observateur,
mais quil souhaite pouvoir sy exprimer. Une invitation lui a été
adressée par la présidence française de lUE, sous couvert
de lapprobation du président yougoslave, mais il ny a pas encore
répondu, indique-t-on de source diplomatique européenne. Selon une
autre source, Vojislav Kostunica accepterait que M. Djukanovic vienne en tant
que membre de la délégation de la RFY et prenne dans ce cadre la
parole à Zagreb.
(Avec AFP)
24/11/2000
La famille européenne
souvre aux Balkans
LUnion
européenne a tenté vendredi à Zagreb dentraîner
les pays de lex-Yougoslavie et lAlbanie à sceller dimprobables
retrouvailles. Mais ce premier « sommet » entre les Quinze
et les États balkaniques a été assombri par une flambée
de violences dextrémistes albanais, au Kosovo et dans le secteur
qui jouxte la Serbie.
Isabelle
Lasserre, envoyée spéciale à Zagreb
Ce fut
un immense show médiatique, lun des grands raouts diplomatiques de
lautomne, organisé sous haute protection policière dans la
capitale croate. Initialement destiné à encourager les pays de la
région à se démocratiser, le sommet de Zagreb sest
transformé avec les changements politiques intervenus en Croatie et à
Belgrade en sommet de la « réconciliation »
. « Lannée 2000 sest ouverte avec le changement
démocratique en Croatie, (...) elle sest poursuivie avec la victoire
des forces démocratiques en Yougoslavie, (...) ce mouvement se développe
dans lintérêt de tous les pays de la région auxquels
il offre de nouvelles perspectives » , souligne la déclaration
finale.
Ce sommet
« historique », selon ses protagonistes, a symboliquement
scellé le rapprochement de lEurope occidentale avec les États
balkaniques (Macédoine, Yougoslavie, Bosnie, Croatie, Albanie). Il a aussi
permis damorcer une réconciliation entre les pays issus de lancienne
Yougoslavie enfin en paix, et réunis pour la première fois à
la même table. « Aujourdhui à Zagreb souvre
une nouvelle page de lhistoire de lEurope... La réconciliation
de notre continent avec lui-même est enfin en passe de saccomplir »
, sest félicité Jacques Chirac lors de la cérémonie
douverture du sommet.
Après
dix ans de guerre dans les Balkans, les Quinze ont offert aux États de
la région la promesse dune future adhésion à lUnion
européenne. Ils ont aussi débloqué 4,65 milliards deuros
pour la période 2000-2006. « Cette somme considérable
illustre la volonté de lUnion dêtre au premier rang dans
le soutien à la démocratie et au développement dans la région »,
a commenté le président français.
Cette ouverture
européenne est néanmoins sujette à caution. Les États
balkaniques devront sengager à remplir plusieurs conditions: la poursuite
de la démocratisation et des réformes économiques, la consolidation
de la paix et linstauration entre eux de relations diplomatiques. Ils devront
aussi respecter les standards internationaux. Et notamment, comme a tenu à
le souligner Jacques Chirac, « la nécessaire coopération
avec le Tribunal pénal international de La Haye » , car
« il est de lintérêt de tous que les crimes soient
jugés et punis ». Un message plus particulièrement
adressé au nouveau président yougoslave, Vojislav Kostunica, pour
qui la collaboration avec le TPI ne constitue « pas une priorité ».
Loptimisme général a cependant été tempéré
par les mauvaises nouvelles venues des Balkans: la mort de plusieurs policiers
serbes au sud de la Serbie, le meurtre dun conseiller politique de Rugova
au Kosovo et la tentative de retour sur la scène politique de Slobodan
Milosevic. Elles révèlent les nombreux obstacles qui restent à
franchir avant que soit instaurée une véritable normalisation dans
la région.
Présenté
comme un rapprochement symbolique entre Serbes et Croates qui se sont affrontés
dans une guerre entre 1991 et 1995, le sommet de Zagreb est loin davoir
cimenté leur réconciliation. Tout en saluant les changements politiques
à Belgrade, les autorités croates réclament le « démantèlement »
des structures de pouvoir qui ont soutenu Milosevic. Zagreb exige aussi que le
nouveau président yougoslave « sexcuse pour lagression
serbe » passée.
Autre dossier
problématique en dehors du Kosovo: le Monténégro, seconde
entité de la Fédération yougoslave. En rébellion ouverte
contre le régime de Milosevic, la petite République sest largement
éloignée de Belgrade. Au point de refuser aujourdhui son maintien
dans la Yougoslavie. Elle est confrontée à un dilemme: « Soutenir
un pays fictif discrédité par les abus dun dictateur ou accepter
la réalité, lexistence de deux États, la Serbie et
le Monténégro » , résume le président
Milo Djukanovic. Seule concession hier du chef dÉtat président
Monténégrin: la possibilité dune nouvelle « forme
dunion entre les deux États » , qui ne pourrait cependant
être discutée selon lui quaprès une reconnaissance internationale
du Monténégro.
Loin dêtre
suffisant, un « processus » a néanmoins été
enclenché à Zagreb. Comme le dit Hubert Védrine, le ministre
des Affaires étrangères: « Les démocraties
sont toujours perfectibles. Un pas très positif a été franchi. »
Le sommet des retrouvailles
Isabelle
Lasserre
Lancé
sur une initiative française, le sommet qui souvre aujourdhui
à Zagreb entre les Quinze et les dirigeants de lEurope balkanique
est censé relancer la dynamique européenne dans la région,
en panne depuis les bombardements de lOtan contre la Yougoslavie. Il devait
aussi, à lorigine, encourager les forces démocratiques de
Serbie à se débarrasser de Slobodan Milosevic et de son idéologie
guerrière. Lélection inattendue de Vojislav Kostunica à
la présidence yougoslave en octobre a changé la donne et fourni
une autre dimension à la rencontre, transformée depuis en sommet
des «retrouvailles». LUnion accordera à cette
occasion aux pays balkaniques, désormais dotés de gouvernements
«démocratiques» et fréquentables, le statut recherché
de «candidat potentiel» à lentrée dans
la famille européenne. «Il fallait fixer un objectif pour ces
pays, leur signifier que leur avenir est en Europe», explique la porte-parole
de lElysée, Catherine Colonna. Sur le plan économique, les
Quinze prévoient de débloquer une aide financière de 4,65
milliards deuros dici à 2006 ainsi quun accès
libre aux marchés européens.
Mais en
échange de la promesse dêtre un jour intégrés
dans lUnion européenne, les États balkaniques devront sengager
à travailler dans le sens dune réconciliation et dune
coopération régionale, «rendues possibles depuis la chute
de Milosevic», note lÉlysée. Laide européenne
sera également conditionnée au respect des droits des minorités
et des obligations internationales, y compris à légard du
Tribunal pénal international sur lex-Yougoslavie. Les pays de la
région devront en outre sengager à poursuivre leurs réformes
pour instaurer une économie de marché. Il faudra aussi «quils
résolvent désormais leurs différends pacifiquement».
«Le rapprochement avec lUnion européenne se fera sur la base
de ces progrès et dune manière individualisée»,
précise la porte-parole de lElysée.
Vojislav
Kostunica devrait être la vedette de ce sommet balkanique. La déclaration
finale du sommet reflètera dailleurs lespoir placé par
les Quinze dans le nouveau président yougoslave: «Les changements
historiques récents ouvrent la voie à la réconciliation et
à la coopération régionales.» LÉlysée
se félicite de ce que la Yougoslavie ait suivi cet automne «lexemple»
donné par la Croatie lan dernier. «La démocratie
est en passe de lemporter dans la région. Une page est tournée»,
résume Catherine Colonna.
Belgrade
devrait donc en profiter pour réaffirmer son rôle de partenaire incontournable
dans la résolution des problèmes régionaux, notamment le
séparatisme au Kosovo et les tentations indépendantistes au Monténégro.
Même sil a reconnu que cela «prendrait du temps»,
Vojislav Kostunica a récemment affirmé que lintégration
européenne constituait pour lui un «objectif majeur».
Déjà réintégrée dans les Nations unies et lOrganisation
pour la sécurité et la coopération en Europe, ayant renoué
des relations diplomatiques avec plusieurs pays européens, la Yougoslavie
aimerait obtenir à Zagreb une aide financière conséquente
de la part des Quinze.
Le pouvoir
de Kostunica étant encore fragile, pas question pour le moment de faire
le moindre geste qui serait de nature à laffaiblir. Aucun dirigeant
des Albanais du Kosovo, qui revendiquent leur indépendance, na ainsi
été invité à Zagreb. Ils seront simplement représentés
par ladministrateur civil des Nations unies, Bernard Kouchner, chargé
dappliquer la résolution internationale sur une «autonomie
substantielle» dans la province.
ÉDITION
EN-LIGNE 24/11/2000
Balkans : Chirac prône
«un véritable partenariat»
Réunissant
les membres de lUnion européenne et les dirigeants des États
de lex-Yougoslavie et de lAlbanie, en vue de leur possible intégration
à lUnion, le sommet de Zagreb sest ouvert ce matin. Le chef
de lÉtat français en a profité pour rappeler détermination
européenne de prendre ses responsabilités dans la région.
ZAGREB
- Le président Jacques Chirac a proposé aux anciennes républiques
yougoslaves et à lAlbanie «un véritable partenariat
individualisé de stabilisation et dassociation».
«Nous
sommes ici entre nous, entre membres de la même famille européenne
et, dune certaine manière, le problème de chacun est le problème
de tous», a déclaré le chef dÉtat français,
président en exercice de lUE, à louverture du sommet
réunissant pour la première fois les Quinze de lUnion européenne
et six pays des Balkans.
Cinq ans
après les accords de Dayton sur la Bosnie-Herzégovine, qui navaient
été signés à Paris que pour faire plaisir à
la France, Jacques Chirac, sest adressé aux représentants
de Belgrade, Ljubljana, Sarajevo, Skopje, Tirana et Zagreb sans jamais mentionner
le nom des États-Unis.
«Le
sommet de Zagreb, a-t-il dit, marque la détermination de lUnion européenne
dans son combat pour la démocratie, la paix et la réconciliation
sur notre continent, il marque une nouvelle étape dans laffirmation
des valeurs que nous avons en partage.»
Rappelant
que dès le premier semestre de 2000, lEurope des Quinze avait reconnu
aux pays des Balkans occidentaux la qualité de «candidats potentiels
à ladhésion», Jacques Chirac leur a confirmé:
«Oui, votre place, votre avenir, sont au sein de lUnion européenne
qui est aujourdhui plus unie et, de ce fait, plus forte.»
Il a appelé
à louverture dun «dialogue politique régional»
permettant de régler «les questions héritées du passé,
telles que celles des frontières, des minorités, des réfugiés,
ainsi que tout problème dont la solution doit obéir au principe
de bon voisinage».
Au passage,
le président français à salué l«évolution
majeure» qua marqué «le changement démocratique»
dans lex-Yougoslavie avec «la chute» du président Slobodan
Milosevic.
«Nous
espérons tous, a-t-il dit, une nouvelle victoire de la démocratie
aux élections législatives du 23 décembre en Serbie, car
nous savons que la consolidation de la démocratie en République
fédérale de Yougoslavie est indispensable pour assurer la stabilité
dans toute la région».
(Avec AFP)
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