Chronologie historique
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VIIe s. Établissement des Croates et premiers royaumes
1102 Unis à la couronne hongroise
1527 Habsbourg, Vénitiens et Ottomans
1809 Napoléon et le réveil national croate
1918 La première expérience yougoslave
1941 La Seconde Guerre mondiale
1945 La Croatie dans la fédération yougoslave communiste
1986 La croisade grand-serbe de Milosevic
1991 La guerre et l’indépendance de la Croatie
1995 La victoire militaire croate et le retour de la paix
2000 « L’après-Tudjman »

La première expérience yougoslave

1918

L’Etat des Slovènes, des Croates et des Serbes. Alors que la Première Guerre mondiale touche à sa fin, le 29 octobre, le Sabor proclame l’indépendance du Royaume Triunitaire de Croatie-Slavonie-Dalmatie, lequel rallie l’éphémère « L’Etat des Slovènes, des Croates et des Serbes ». Il se donne Zagreb pour capitale et rassemble les territoires sud-slaves de l’Autriche-Hongrie moribonde (Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine et Voïvodine).

 

Le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes. Un mois plus tard, le 1er décembre, cet État s’unit aux royaumes de Serbie et du Monténégro sous le sceptre de la dynastie serbe des Karageorgevic. Le Sabor, qui n'est pas consulté, ne ratifiera jamais l'accord et sera bientôt aboli, malgré une tradition millénaire. Le nouvel Etat ainsi constitué prend le nom de « Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes » (ou Royaume SHS).

Répression militaro-policière. Le chef du parti paysan républicain, Stjepan Radic, s’y oppose alors avec véhémence. La contestation populaire manifestée en Croatie est matée par l’intervention brutale des troupes serbes. Fruit des traités de Versailles, le nouvel État, centralisé à Belgrade, tentera sans jamais y parvenir à concilier les traditions politiques croates et serbes, par trop divergentes, forgées au cours des siècles précédents au sein de la monarchie austro-hongroise, pour les premiers, et de l'empire ottomans, pour les seconds. Débute alors une période de répression et d’hégémonie serbe qui s'appuie sur l'appareil administratif et militaro-policier.

 

Profondes disparités économiques. L'Etat nouvellement crée accumule de profondes disparités : Un taux d'illettrisme en 1921 allant croissant du nord au sud, de 8,8 % en Slovénie à 83,8 % en Macédoine. En outre, en 1919, la Croatie détient à elle seule 60,4 % du capital du Royaume, la Slovénie 20,7 %, la Serbie 5,8 %, la Voïvodine 5,1 %, la Bosnie 4,6 %, le Monténégro 0,8 %. Dans ce contexte, en imposant d'entrée de jeu un taux de change de 1:4 entre couronnes autrichiennes et dinars serbes, dont le pouvoir d'achat est quasiment égal, le régime de Belgrade suscite l'exaspération des épargnants croates et slovènes qui y dénoncent une spoliation massive.

1919

Création du Parti communiste yougoslave.
Irrédentisme italien. Le poète profasciste Gabrielle d’Annunzio pénètre à Rijeka (Fiume) le 11 septembre à la tête de ses légionnaires et s’empare du port croate, objet de revendications irrédentistes italiennes.

1920

Par le traité de Rapallo (12 novembre), l’Italie obtient d’importants territoires croates (Istrie, Zadar et ses environs, les îles de Cres, Losinj et Lastovo) et slovènes, soit quelque 10 000 km². Rijeka est proclamée ville libre, mais sera annexée par Mussolini en 1924 à la suite du pacte de Rome, conclu avec Belgrade. Elle ne redeviendra croate qu’en mai 1945, au sein de la Yougoslavie titiste. La répression fasciste entraînera, en dix ans, la mort de 2000 Croates et Slovènes et conduira à l'internement de 20 000 autres. Dans les territoires croates sous occupation italienne, la répression sanglante conduite, l'année suivante, par Mussolini contre la "République de Labin", autoproclamée par les mineurs de cette bourgade d'Istrie avec le soutien de la population croate, est considéré comme le premier acte de résistance armé en Europe contre le fascisme.

Le Parti paysan s'impose en Croatie. Le Parti paysan de Radic remporte une victoire écrasante en Croatie et s'impose largement comme le principal parti croate. La synthèse de son programme social, national et pacifiste est résumée dans son objectif : l'instauration d'une "république croate neutre et paysanne", d'autant qu'il ne reconnaissait pas la dissolution du Royaume Triunitaire de Croatie-Slavonie-Dalmatie.

De son côté, Svetozar Pribicevic, le leader serbe de Croatie, qui avait été l'un des piliers de la coalition croato-serbe d'avant-guerre, se rallie au centralisme de Belgrade et devient le principal allié du gouvernement serbe.

1921

Constitution centralisatrice. La nouvelle Constitution renforce la politique centralisatrice de Belgrade en divisant l’État en 33 unités administratives qui ignorent les frontières historiques des entités constitutives du Royaume. Tandis que la déception des Croates ne cesse de grandir, ceux-ci se détournent du "yougoslavisme", mouvement pourtant né en Croatie au siècle précédent, qui prônait l'union, sur un pied d'égalité, des Slaves du Sud. Le ressentiment est atisé par la politique discriminatoire et de répression systématique dont ils font l’objet, comme les bastonnades policières, inconnues avant 1918. La grande majorité des Croates se rassemble autour de ses thèses républicaines et fédéralistes de Stjepan Radic, chef charismatique du parti paysan républicain, qui entame un long combat politique et pacifique contre le centralisme de Belgrade.

Déclaré illégal, le Parti communiste est interdit.

1922

Appel à la SDN. Fervent partisan de l'instauration d'une Croatie indépendante, Radic en appelle à la Société des Nations, dont il espère le soutien sur la base des Quatorze points du président Wilson.

1923

Aux élections parlementaires, le Parti paysan de Radic (HSS) remporte, en Croatie, un véritable plébiscite et s'impose comme le deuxième parti du royaume SHS, juste derrière les radicaux serbes, au pouvoir à Belgrade.

1924

L'influence politique grandissante de Radic lui vaut d'être emprisonné; son parti, le HSS, est alors interdit.

1925

Le régime organise des élections anticipées, mais face au fort mécontentement populaire, il se rétracte et autorise le HSS, réhabilité, à y prendre part : celui-ci obtient 67 mandats, contre 70 auparavant, tandis que le gouvernement n'obtient que 49 % des suffrages. A son tour Radic fait un geste en reconnaissant le Royaume SHS.

Réunissant des membres du parti radical serbe et du parti paysan croate, un éphémère gouvernement de coalition est formé au sein duquel Radic, fraîchement libéré de prison, se voit accorder le portefeuille symbolique de ministre de l’Éducation.

1927

Alliance Radic-Pribicevic. Aux dernières élections avant l'instauration de la dictature, le HSS obtient 61 mandats, et plus de 90 % des voix en Croatie. La majorité (parti radical serbe), elle, perd un quart de ses sièges.

Mais le revirement du leader serbe de Croatie et président du Parti démocrate serbe, S. Pribicevic, change la donne et ouvre la voie, veut-on croire, à une fédéralisation du royaume. Déçu du centralisme radical dont il fut, depuis 1918, l'un des plus actifs défenseurs, il apporte son soutien inattendu au leader charismatique croate, S. Radic, avec lequel il conclut une alliance, la Coalition démocrate-paysanne (SDK).

1928

Attentat contre Radic au Parlement. Les partisans du centralisme y cependant voient une menace mortelle. L'un d'eux, un élu du Parti Radical serbe, Punisa Racic, réclame, pour corriger "l'erreur de 1918" que l'on rebaptise l'Etat en "Grande Serbie" et professe des menaces à l'encontre des leaders croates. Le 20 juin, en pleine séance du Parlement à Belgrade, il met ses menaces a exécution et tire à bout portant sur Stjepan Radic, mortellement blessé, tue deux autres élus croates, Pavle Radic et Djuro Basaricek (ce dernier s'interpose devant Pribicevic et reçoit la balle destinée au leader serbe de Croatie), et en blesse deux autres, Ivan Pernar et Ivan Grandja. Figure emblématique du combat démocratique pour la souveraineté la Croatie, Stjepan Radic, décède le 8 août. Il restera comme l'un des plus grands hommes politiques croates. Ses funérailles nationales à Zagreb rassemblèrent 300 000 personnes.

Vladko Macek succède à Radic à la tête du HSS.

En guise de protestation à l'assassinat de Radic, Tito, le chef du PC croate, organise des manifestations hostiles au régime serbe. La SDK, réunissant toujours les leaders croates et serbes, récuse quant à elle l'application des lois du Parlement de Belgrade dans les territoires anciennement austro-hongrois, déclarant ses décisions nulles et non avenues.

Cet épisode met fin au parlementarisme yougoslave de l'entre-deux-guerres, qui était dès le début voué à l'échec : en appuyant son appareil militaro-policier et bureaucratique quasi uniquement sur les Serbes (38 % de la population), le régime ne pouvait s'assurer durablement une hégémonie incontestée.

1929

Naissance de la Yougoslavie et proclamation de la dictature. Le 6 janvier, le roi Alexandre suspend la Constitution, interdit les partis politiques et proclame la dictature. Le « Royaume des Serbes, Croates et Slovènes » est bientôt rebaptisé « Royaume de Yougoslavie ». Les références nationales propres sont proscrites au profit du terme commun "yougoslave". Or il apparaît vite comme une manœuvre destinée à poursuivre la même politique hégémonique. Coupable d'alliance avec la Parti paysan croate, Svetozar Pribicevic, le leader des Serbes de Croatie est interné.

Radicalisation politique. Apparaissent alors en Croatie aux deux extrêmes du bloc démocratique et pacifiste incarné par le Parti paysan croate, deux options politiques marginales partisanes de la résistance armée : le Parti communiste, appelant à l'insurrection populaire dans le but de créer une Yougoslavie fédérale, et les Oustachas (insurgés) profascistes, d'Ante Pavelic, prônant le terrorisme comme moyen d'action destiné à instaurer une Croatie indépendante.

1931

Instauration de 9 banovines. Le roi Alexandre promulgue une nouvelle Constitution qui instaure neuf provinces (banovine). De nouveau, les frontières ne respectent pas les entités historiques : ainsi les Serbes, qui ne forment alors que 39 % de la population, constituent la majorité de la population dans six des neuf provinces. Les élections, auxquelles les partis politiques traditionnels ne peuvent prendre part en raison des conditions prohibitives qui leur sont imposées, aboutissent à la formation d'un "parlement" de représentants de corporations (fonctionnaires, avocats, commerçants, prêtres...).

Le HSS continue à faire l'objet de persécutions.

1932

L'insurrection armée menée par les oustachas dans la région de Lika se solde par un échec, malgré le soutien du parti communiste yougoslave qui appelle alors à la création d'une "Croatie indépendante".

1933

Malgré une action politique qui demeure indéfectiblement attachée aux principes démocratiques et à la lutte non-violente, Vladko Macek, le leader du Parti paysan, est à son tour condamné à trois ans de prison et interné.

1934

Attentat contre le roi Alexandre. En déplacement à Marseille, le roi Alexandre de Yougoslavie est assassiné par un membre de l’ORIM (Organisation révolutionnaire intérieure de Macédoine) dans un attentat mis au point en collaboration avec le mouvement "révolutionnaire" Oustacha. Celui-ci compte alors quelques centaines de membres, exilés dans des camps d’entraînement dans l'Italie de Mussolini et en Hongrie.

1935

Libéré de prison, Macek remporte 37,4 % des voix aux élections (dont 97 % des suffrages croates) et obtient même 400 000 voix en Serbie. Face à lui, le candidat du régime, Jevtic est crédité de 60,6 % des suffrages. Afin de se prémunir des violences policières de plus en plus répétées à son encontre, le HSS instaure son propre service de protection civil et rural.

1936

Rapprochement avec l'axe. Belgrade entame son rapprochement avec l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste. Ainsi, en 1936, le chef du gouvernement yougoslave, Milan Stojadinovic, rencontre Hitler, puis, l'année suivante, Mussolini.

1937

Prenant modèle sur l'Allemagne et l'Italie, le chef du gouvernement de Belgrade, Milan Stojadinovic, instaure ses unités de "Chemises bleues" dont le salut reprend celui des nazis.

Tito prend la tête du PC yougoslave. Josip Broz, dit Tito, devient secrétaire général du PC yougoslave. Son nom est néanmoins encore largement méconnu de l'opinion publique. A l'époque c'est en effet encore l'écrivain croate Miroslav Krleza qui est, et de loin, la figure emblématique de la gauche croate.

1938

Plébiscite du HSS. Le parti paysan, dirigé par Macek, est plébiscité aux législatives en Croatie et remporte 44,9 % des suffrages dans l'ensemble de la Yougoslavie. Il prend alors part à la constitution du gouvernement yougoslave.

Disparités nord-sud. Tandis que l'effondrement des cours des céréales à partir de 1926 met un coup d'arrêt brutal au processus d'industrialisation naissant, les disparités au sein de la Yougoslavie sont loin d'être effacées à la veille de la Seconde Guerre mondiale : la production industrielle par habitant s'éleve à 3320 dinars en Slovénie, 1560 en Croatie, 846 en Serbie, 683 en Bosnie et 156 en Macédoine, soit un rapport de 1 à 22 du nord au sud.

La Yougoslavie unitaire apparaît de plus en plus comme l'homme malade de l'Europe dont la survie ne tient plus qu'à l'ordre international issu de la Grande Guerre.

1939

De nouveau l'Europe s'enfonce dans la guerre : Hitler a annexé l'Autriche en 1938 et occupé la Tchécoslovaquie, tandis que Mussolini s'empare de l'Albanie.

Banovine de Croatie. Dans ce contexte tourmenté, malgré l’opposition des milieux grand-serbes, le Prince régent Paul donne son aval à l’accord Cvetkovic-Macek, entre le premier ministre serbe et le leader croate, qui établit une « Banovine de Croatie » au sein du royaume yougoslave. Gouvernée par un ban, ce vice-royaume jouit d’une très large autonomie et rassemble toutes les provinces croates hormis l’Istrie, alors italienne. La Banovine englobe également les territoires de population croate en Bosnie-Herzégovine. Son existence éphémère prendra toutefois fin avec l'éclatement de la Seconde guerre mondiale, qui touche la Yougoslavie en avril 1941.


La Seconde Guerre mondiale

1941-1945

Occupation allemande et italienne. Le 6 avril, l’Allemagne attaque la Yougoslavie à la suite de la remise en question du Pacte tripartite signé par le régent Paul. Le pays est envahi en quelques jours. Les troupes serbes de l’armée royale n'opposent pratiquement aucune résistance mais se rendent coupables, après la débâcle, des premiers massacres de civils, notamment à l’encontre de populations musulmanes et croates en Bosnie-Herzégovine.

Création d'un Etat croate satellite de l'Axe. Après le refus de Macek de diriger un État croate satellite de l’Allemagne, les puissances de l’Axe installent le 10 avril à Zagreb un « État indépendant de Croatie » et placent à sa tête Ante Pavelic, le leader du mouvement Oustacha, rentré d'exil. Divisé en zones d’occupation allemande et italienne, cet État comprend toute la Bosnie, mais cède à l’Italie mussolinienne la majeure partie de la Dalmatie et l’Istrie. Le Sabor, non consulté, est dissous.

 

Guerre civile et mondiale. Démembrée, la Yougoslavie est le théâtre d’une sanglante et complexe guerre qui, sur fond de conflit mondial, oppose à la fois collaborateurs et résistants locaux, mais également les tenants d'intérêts nationaux particuliers.

Collaborateurs croates et serbes. A la politique de terreur menée par Ante Pavelic, notamment à l’égard des Serbes et des opposants (Juifs, Croates), fait écho celle pratiquée par les tchetniks royalistes serbes de Draza Mihajlovic à l'encontre des Croates et des musulmans bosniaques, et ce alors même que l'un comme l'autre bénéficient du soutien de l’Axe. C'est aussi le cas des unités fascistes du Zbor, commandés par le Serbe Dimitrije Ljotic.

Partisans de Tito. Enfin, les Partisans yougoslaves de Tito, qui les combattent, bénéficient quant à eux du soutien grandissant des Alliés. Implantés essentiellement en Bosnie-Herzégovine et en Croatie jusqu'à la capitulation italienne, en 1943, ils rassembleront des combattants de toutes nationalités.

 

Oustachis et partisans croates. Face à environ 60 000 oustachis sur lesquels s’appuie le régime de Pavelic, la résistance croate s’organise dès l’insurrection armée du 22 juin 1941. Celle-ci marque le début d’un mouvement dont l’ampleur croissante supplantera, en 1943, l’effectif militaire oustachi. Parmi les Partisans de Tito, originaires de toute la Yougoslavie, les Partisans croates comptent alors plus de 100 000 hommes et disposent de leur propre état-major, le ZAVNOH. Incarnant la « Croatie libre », celui-ci est dirigé par l’écrivain Vladimir Nazor et le secrétaire général du parti communiste croate, Andrija Hebrang, dans le cadre du Conseil populaire antifasciste de libération yougoslave (AVNOJ) instauré en 1942.

Sur l’ensemble du territoire yougoslave, Tito compte alors quelque 300 000 Partisans, principalement regroupés en Croatie, Bosnie-Herzégovine et Slovénie, et répartis en 26 divisions : 11 croates, 7 bosniaques, 5 slovènes, 2 serbes et 1 monténégrine. Après l’entrée de l’Armée rouge à Belgrade en octobre 1944 et la dislocation des forces tchetniks de Mihajlovic, le mouvement des Partisans prend également de l’ampleur en Serbie, jusqu’alors protectorat allemand administré par le général et collaborateur serbe, Milan Nedic. (Voir aussi La Résistance en Croatie)

Révolte de Villefranche. Durant la guerre, un événement de portée militaire limitée mais singulier se déroule le 17 septembre 1943, à Villefranche-de-Rouergue : la « révolte des Croates », mutinerie contre les nazis des unités croato-bosniaques enrôlées de force et stationnées dans le sud de la France occupée.

Pertes humaines durant la guerre. Le bilan humain de quatre années de guerre est lourd. La guerre civile entre partisans communistes, tchetniks serbes, oustachas croates et bosniaques, d'une part, et de l'autre, les combats contre l’occupant allemand et italien, causèrent la mort de 1 million de personnes. Les victimes serbes forment près de la moitié d'entre-elles, les victimes croates, près d'un tiers.

Outre les victimes civiles et militaires des faits de guerre, ce bilan comprend également les victimes tuées dans les camps de concentration comme dans les campagnes d'épuration à la fin de la guerre. C'est notamment le cas des 50 000 à 100 000 Serbes, Juifs, Tziganes et Croates tués dans le camp oustachi de Jasenovac ou des dizaines de milliers de Juifs gazés en Serbie, premier pays d'Europe déclaré Judenfrei, en 1941, par l'état-major nazi.

Ce fut encore le cas de dizaines de milliers de civils croates fuyant vers les armées alliées en Autriche en mai 1945 et massacrés à Bleiburg par les unités, principalement serbes, des Partisans yougoslaves, qui se rendirent coupables du plus grand crime de l'après-guerre en Europe.

La Croatie dans la fédération yougoslave communiste

1945

La République populaire de Croatie devient l’une des six composantes de la nouvelle Yougoslavie, dirigée par le chef de la Résistance yougoslave, le communiste d’origine croate Josip Broz, dit Tito.

1946

Procès Stepinac. Proclamation de la République Populaire Fédérative de Yougoslavie (RPFY). Procès stalinien du cardinal Stepinac, défenseur des Juifs durant l’occupation et ardent opposant à Pavelic, mais partisan de l’indépendance de l’église catholique croate vis-à-vis du PC dirigé par Tito.

1948

Froid avec Moscou. Rupture Tito-Staline.
La même année disparaît mystérieusement Andrija Hebrang, résistant et leader communiste croate, partisan d’une Croatie communiste indépendante, limogé et emprisonné après la guerre par Tito.

1950

Début l’expérience autogestionnaire.

1956

Mouvement des Non-alignés. Signature à Brijuni (Croatie) de la déclaration des Non-alignés par Tito, Nehru et Nasser. Le mouvement réunira, notamment en Asie et en Afrique, de nombreux pays refusant la logique binaire de confrontation des deux blocs issus de la Guerre froide.

1963

La RFPY devient la République Socialiste Fédérative de Yougoslavie (RFSY), tandis qu'à l'échelon inférieur, la "République populaire de Croatie" cède la place à la "République socialiste de Croatie".

1966

Purges et dégel relatif. Après deux décennies d’implacable répression face à toute manifestation identitaire croate au sein de la Yougoslavie fédérale, Aleksandar Rankovic, patron des services secrets et chef de file des partisans de l’hégémonie serbe, est limogé par Tito. Néanmoins, le rôle de la Serbie devient de plus en plus dominant dans les structures fédérales yougoslaves.

 

Chasse aux dissidents politiques. A la fin des années 60, on assiste à un relatif assouplissement de la répression anti-croate mais aussi anti-albanaise de la redoutable UDB-a. Auparavant, la police politique yougoslave, s'était rendue responsable de nombreux assassinats de dissidents croates en exil. Ce climat hostile ainsi que les conséquences économiques désastreuses de l’expérience autogestionnaire poussent de très nombreux Croates à émigrer vers les pays occidentaux : un tiers des Croates (représentant 70 % de l'ensemble du contingent émigré yougoslave) vivent désormais hors des frontières de l'ancienne Yougoslavie.

1967

Déclaration sur la langue littéraire croate. Exprimant leur opposition à la politique centralisatrice du PC yougoslave visant à fondre le serbe et le croate en un idiome hybride ("serbo-croate") censé préfigurer l'unité linguistique de la Yougoslavie, les institutions culturelles croates jettent un pavé dans la marre en signant une Déclaration sur l’identité propre de la « langue littéraire croate ». A la même époque, on assiste à un véritable renouveau de l’affirmation culturelle de la Croatie à tous les échelons de la société.

1971

Le "Printemps croate". Réclamant davantage de libertés et favorable à une démocratisation accrue de la société que prône la direction réformatrice du PC croate, les étudiants et les ouvriers déclenchent une grève générale en Croatie. Tito répond en limogeant la direction communiste croate (Dabcevic-Kucar et Tripalo). Coupant court à ses élans réformateurs, il brise net le mouvement populaire du « Printemps croate ». Victimes de purges massives, de nombreux intellectuels, étudiants ou journalistes sont emprisonnés. Parmi eux, Drazen Budisa, Sime Djodan, Vlado Gotovac, Stipe Mesic, Franjo Tudjman, Marko Veselica, mais aussi Savka Dabcevic-Kucar et Mika Tripalo, figures les plus éminentes de la contestation. Vingt ans plus tard, lorsque la Croatie accédera à l’indépendance, elles reviendront sur le devant de la scène politique.

1974

Assouplissement de la Fédération. La Yougoslavie adopte une nouvelle Constitution fédérale accordant davantage d’autonomie aux républiques fédérées. Leur droit à « l’autodétermination jusqu’à la sécession » gagné par les armes à la Libération y est réaffirmé dans son préambule. Il constituera en 1991 la base juridique qui autorisera la Croatie, comme la Slovénie, de proclamer son indépendance.

1980

Mort de Tito. Josip Broz, dit Tito, chef des Partisans yougoslaves pendant la guerre, fondateur de la deuxième Yougoslavie, fédérale et communiste, puis Président à vie, meurt le 4 mai. Une présidence collégiale à rotation annuelle est mise en place, permettant à chaque entité fédérée d’accéder à la tête de l’État.

La croisade grand-serbe de Milosevic

1986

La thèse de la Grande Serbie. S'inspirant des thèses expansionnistes grand-serbes rétrogrades - « Nacertanije » [le Plan] (Garasanin, 1844), « Jusqu’à l’extermination » (Stojanovic, 1902), « l’expulsion des Arnaoutes » (Cubrilovic, 1937) ou « la Serbie homogène » (Moljevic, 1941) - l’Académie serbe des Sciences et des Arts rédige le fameux « Mémorandum ». Texte programmatique justifiant l'hégémonie de la Serbie sur les autres républiques yougoslaves, il servira de base idéologique à l’action politique et guerrière du leader serbe, Slobodan Milosevic, qui parviendra au pouvoir l’année suivante. Bien que les Serbes ne représentent que 36 % de la population, le Mémorandum prône la mainmise de la Serbie sur les deux tiers de la Yougoslavie (Grande Serbie). Pour les historiens, il porte en germe les causes de la dislocation yougoslave et de l’agression armée serbe à partir de 1990.

1988/89

La campagne nationaliste. Par un putsch, Milosevic abolit l’autonomie du Kosovo et de la Voïvodine, 28 mars 1989, et place ses partisans à la tête du Monténégro. A ses ordres, le bloc serbe paralyse ainsi le fonctionnement de la présidence collégiale yougoslave en s'arrogeant la moitié des huit voix du collège. Dans le même temps, la Slovénie et la Croatie font l'objet d'une campagne nationaliste d’une extrême violence orchestrée par Milosevic. Le 4 mars, les partisans de la Grande Serbie, dont beaucoup viennent de Serbie même, organisent avec le soutien de Belgrade un premier meeting nationaliste à Petrova Gora, en Croatie. Pour la première fois, on y entend publiquement scander "Ici, c'est la Serbie". Et l'on y voit des centaines de nationalistes serbes arborer des emblèmes tchetniks, les collaborateurs serbes des nazis, suscitant l'émoi en Croatie, compte tenu du souvenir pénible des crimes qu'ils y ont commis durant la Seconde Guerre mondiale. En juin, un meeting plus important encore est organisé à Knin.

1990

Scission au sein de la Ligue communiste yougoslave. Refusant le diktat de Milosevic en passe de prendre les rênes de la Yougoslavie, les délégués slovènes et leurs homologues croates, emmenés par Ivica Racan, claquent la porte du XIVe congrès de la Ligue communiste yougoslave en janvier.

Le SDS, parti démocratique serbe, partisan de la Grande Serbie, est fondé à Knin (Croatie) le 17 février, tandis que les meetings ultra-nationalistes serbes se multiplient en Croatie. Un "état-major des forces serbes" est inauguré à Glina le 6 mai.

Premières élections libres. Le 22 avril et le 6 mai, les deux tours des premières élections (législatives) libres depuis l’entre-deux-guerres se tiennent en Croatie. Ne conservant que 105 élus sur 356, le parti communiste croate d'Ivica Racan est battu par le HDZ (centre-droit) de Franjo Tudjman, qui obtient 58% des sièges au Parlement de la République socialiste de Croatie. Les partis des Serbes de Croatie obtiennent quant à eux 23 mandats. Ancien général de Tito entré en dissidence depuis les années 1960, Tudjman est élu le 30 mai Président de la République par le Sabor, désormais restauré et pluraliste. Le 22 juin est proclamé Jour de la résistance antifasciste.

Proclamation de la "Krajina" serbe en Croatie. Le 1er juillet une "région autonome serbe de Krajina", avec pour "capitale" Knin, est unilatéralement proclamée par les séparatistes serbes sur le territoire de 6 communes à majorité ou forte minorité serbe (Benkovac, Knin, Obrovac, Gracac, Donji Lapac, Korenica). Le 8 juillet, le leader du Mouvement serbe du Renouveau, Vuk Draskovic, appelle Milosevic à "franchir la Drina" (rivière à la frontière serbo-bosniaque) car la Serbie "est partout où se trouvent des tombes serbes".

Suppression de l'étoile rouge. Un Conseil national serbe, créé le 25 juillet, adopte une Déclaration de souveraineté et d'autonomie du peuple serbe [de Croatie]. Le même jour, la Croatie amende sa constitution, redéfinit les attributions de son gouvernement, tandis que l'étoile rouge et l'iconographie communiste sont supprimées du blason historique croate, échiqueté rouge et blanc, qui prend alors la forme qu'il a aujourd'hui. Le 16 août, les séparatistes serbes décident de la tenue d'un "référendum" sur l'autonomie serbe, du 19 août au 2 septembre, uniquement dans les 11 communes à majorité serbe où ne vit qu'un quart des Serbes de Croatie.

Début du conflit. A partir du 17 août, des groupes séparatistes serbes dressent des barricades sur les routes dans les environs de Knin, ainsi que dans d’autres régions où la minorité serbe (12 % de la population de la Croatie en 1991) est majoritaire ou simplement importante. Soutenus et armés par Belgrade et forts de l'appui logistique des unités de l’armée yougoslave stationnées sur place, ils coupent d'importantes voies de communication entre le nord et le sud du pays et prennent le contrôle de vastes territoires. Chaque tentative des forces de police croate visant à rétablir l'ordre rencontre systématiquement l'hostilité dissuasive de l'armée yougoslave, qui officiellement "s'interpose".

Proposition confédérale croato-slovène. Le 10 septembre, la Croatie et la Slovénie proposent un plan commun de transformation de la Fédération yougoslave en confédération d'Etats souverains, ultime tentative de sauvetage de la fédération moribonde. Le même mois, les séparatistes serbes proclament « l’autonomie » des territoires croates sous leur contrôle. Armés par la Serbie, ils radicalisent leur action par des actes de violences et des attentats terroristes. A partir de la mi-octobre, la Dalmatie est coupée du reste de la Croatie après le dynamitage de la voie ferrée qui la relie à Zagreb, via Knin.

Les Serbes en Croatie. Le 21 décembre, les séparatistes serbes proclament unilatéralement et sans l'aval des autorités nationales une "région autonome serbe de Krajina" réunissant onze communes croates rurales à majorité ou forte minorité serbe, dont ils ont pris le contrôle avec l'aide et le soutien de l'armée yougoslave, à majorité serbe. Cette "région autonome serbe" est censée s'étendre sur plus de 7000 km², soit près de 13 % du territoire croate (c'est-à-dire la moitié du territoire qui sera occupé par l'armée et les paramilitaires serbes, un an plus tard et jusqu'en 1995). Ces onze communes n'abritent cependant que 195 000 habitants (4 % de la population), dont 147 000 Serbes de Croatie - soit un quart de leur nombre total, 582 000. En effet, la plupart d'entre eux demeurent en dehors de cette "région autonome" étant donné que près de la moitié des membres de la communauté serbe de Croatie (47 %) résident dans les principales villes croates. Pourtant, ceci n'empêchera pas, quelques mois plus tard, l'armée serbe d'en faire la cible de ses bombardements aveugles, touchant indistinctement la population urbaine, qu'elle soit croate ou d'origine serbe.

 

Nouvelle Constitution croate. Le 22 décembre, le Sabor adopte la nouvelle Constitution croate qui, à l'instar de celle de la République socialiste de Croatie, jusque-là en vigueur, prévoit également la possibilité de recourir à l’indépendance. On peut y lire notamment que "La République de Croatie se constitue comme État national du peuple croate ainsi que de ses citoyens membres d'autres peuples et minorités : Serbes, Musulmans, Slovènes, Tchèques, Slovaques, Italiens, Hongrois, Juifs et autres, auxquels est garantie l’égalité avec les citoyens de nationalité croate, de même que le respect de leurs droits nationaux conformément aux normes démocratiques qui sont celles de l’ONU et des Etats du monde libre".

 
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