Le Monde,
28/03/2002
SUPPLÉMENT
"CROATIE" (5)
La Méditerranée
davant la ruée
Le
pays compte sur ses atouts naturels et les partenariats avec létranger
pour reconquérir les touristes européens
Contrairement
aux autres régimes communistes dEurope de lEst, la Yougoslavie
encourageait le tourisme en provenance de lOuest et satisfaisait ainsi ses
besoins en devises fortes. A la fin des années 1980, 10,5 millions de visiteurs
débarquaient chaque été sur les plages de la côte dalmate,
le territoire de lactuelle République croate. Ils nétaient
plus que deux millions au lendemain de la guerre dindépendance, en
1992 et 1993.
«
Il sagit dun secteur toujours en convalescence », explique Pave
Zupan Ruskovic, la ministre croate
du tourisme, mais « les chiffres se sont beaucoup améliorés
au cours des deux dernières années et on a recensé 7,9 millions
de visiteurs en 2001, dont 6,5 millions détrangers
». Les Allemands arrivent en tête au palmarès (1,3 million),
suivis de près par les Italiens et très loin devant les Français
(75 000), dont le nombre connaît pourtant une forte progression. Pave Zupan
Ruskovic regrette la persistante frilosité tricolore à lendroit
de son pays, dautant plus que « les Français sont dexcellents
clients, qui viennent avant tout découvrir le patrimoine culturel du pays
». Son ministère entend promouvoir de façon plus insistante
la Croatie sur le marché hexagonal, où la cote de la côte
dalmate sinscrit en hausse, comme en témoignent les ventes de guides
touristiques, qui se sont emballées au cours des derniers mois.
DES ATOUTS MULTIPLES
|
Dubrovnik
|
Les quelque
1 200 îles et îlots qui parsèment les rives méditerranéennes
de la République balkanique regorgent de ruines romaines et de chapelles
byzantines et les palais vénitiens abondent derrière les remparts
de Dubrovnik, à quelques heures de voiture de Vienne ou de Milan. La beauté
architecturale le dispute à la grandeur des paysages, depuis les sommets
des Alpes Dinariques jusquaux criques cristallines. Ces atouts, conjugués
à un faible coût de la vie, feront bientôt accourir lEurope
entière, mais « le développement du tourisme
doit se montrer respectueux de notre environnement, qui séduit les visiteurs
las des côtes espagnoles ou italiennes », poursuit la ministre. Ses
services étudient les moyens de relancer un secteur économique qui
fournit environ 15 % du PIB et rapporte quelques 3,4 milliards deuros. Les
deux principales régions touristiques, lIstrie, au nord, et la Dalmatie
au sud, connaissent des situations différentes : la première, jamais
totalement délaissée par les vacanciers et épargnée
par le conflit, lutte pour se hisser au meilleur niveau européen, la seconde,
désertée pendant plusieurs années et au potentiel sérieusement
endommagé (aéroport
de Dubrovnik saccagé, hôtels réquisitionnés) a
dû repartir de zéro.
"Adopter la
culture dun système concurrentiel" |
|
|
Jadran
Turist et Istraturist
sont deux entreprises aux destins parallèles qui illustrent lamélioration
du secteur hôtelier en Istrie. Anciennes sociétés dEtat
propriété la première de Tvornica
Duhana Rovinj (« Fabrique de Tabac de Rovinj ») et la
seconde de Zagrebacka Banka,
elles ont toutes deux signé un accord avec le géant espagnol Sol
Meliá, qui se charge de la gestion des différents établissements.
« Environ 45 % de nos capacités sont désormais au niveau de
Sol Meliá », annonce Renco Miletic, le président dIstraturist,
qui négocie actuellement son rachat par lentreprise ibérique.
« Nous confions la commercialisation de nos chambres à la société
espagnole, qui peut mieux négocier que nous avec les grands voyagistes.
» Son groupe englobe sept hôtels, quatre résidences et cinq
camps de vacances, qui ont tous réussi à « passer dune
culture dentreprise publique au système concurrentiel, ce qui nous
a donné une longueur davance sur nos concurrents, mais nous pâtissons
toujours dun manque dinfrastructures et dun cadre fiscal inadéquat
», analyse-t-il.
"Une réputation
comparable à celle de Saint-Tropez" |
|
|
Ivan Soric,
le président de Jadran Turist, dirige une entreprise qui compte 8 000 lits,
répartis entre six hôtels et deux complexes touristiques, plus 10
500 places de camping. Elle est surtout présente dans la région
de Rovinj, « un port de plaisance qui jouit dune réputation
comparable à celle de Saint-Tropez en France », précise Ivan
Soric. Le président aussi se félicite de laccord signé
avec Sol Meliá, qui lui permet de capter une clientèle familiale
exigeante grâce à lintroduction danimations de qualité
dans ses établissements.
En Dalmatie, de nombreux hôtels traversent
une période délicate : labsence de clients ne leur permet
pas de réparer les dégâts de la guerre dindépendance.
Le ministère du tourisme envisage la privatisation des établissements
publics comme une solution possible.
"Retrouver notre
place parmi les liaisons aériennes mondiales" |
|
|
Même
cause, mêmes effets, le principal aéroport de la région, situé
à Dubrovnik, pourrait lui aussi être cédé au privé.
Il comptait 1,5 million de passagers en 1987 : son directeur, Tonci Peovic, espère
en voir transiter 520 000 cette année. Aujourdhui propriété
des collectivités locales et de lEtat, il subira une profonde transformation
avant un éventuel changement de statut. Une première phase de remise
en état, achevée en 1998 pour un coût de 8,7 millions deuros,
devrait être rapidement suivie par la construction dun nouvel aérogare
et la réfection de la piste datterrissage. « Dubrovnik retrouvera
rapidement sa place sur les routes aériennes mondiales, confie Tonci Peovic,
qui se réjouit du projet de la compagnie aérienne Lufthansa «
dachever ou de commencer des vols transcontinentaux ici », (Dubrovnik
Francfort New York et retour, par exemple).
Le directeur de lOffice
national du tourisme de Croatie, Niko Bulic, se montre optimiste pour lensemble
des régions croates : « A long terme, nous visons dix à onze
millions de visiteurs par an. Nous pourrions en attirer le double, mais nous voulons
préserver notre patrimoine et ne pas répéter les erreurs
commises ailleurs », explique-t-il. Le pays comptant 30 % de lits de
moins quen 1990,« la Croatie ne développera son potentiel quavec
le concours du secteur privé », poursuit Niko Bulic, qui confie quil
« participe à des négociations avec le Club Méditerranée.
Nous privilégions linstallation chez nous de grandes chaînes
internationales aux compétences prouvées. »
ATTRAIT MÉRIDIONAL
"La deuxième
concentration de châteaux au monde" |
|
|
Mais la
Méditerranée nest pas la Croatie : le directeur de lOffice
du tourisme de Zagreb, Mario Zmajevic, admet que lart de vivre méridional
se perçoit jusque dans la capitale, mais il souligne aussi les vertus «
austro-hongroises » de Zagreb, «
comparable en de nombreux points à Vienne, dont elle égale le romantisme
». Avec un faible taux de criminalité et dotée dun très
riche patrimoine architectural, cette ville voit son nombre de touristes croître
denviron 15 % par an.
« Nous possédons la deuxième plus grande concentration de
châteaux au monde, après la Vallée de la Loire. On en compte
en effet pas moins de 42 à moins dune heure de route », assure
Mario Zmajevic, qui veut attirer un plus grand nombre de touristes dEurope
occidentale grâce à ces richesses culturelles. Il espère notamment
recevoir plus de Français : « Il y a trente ans, sur les routes de
campagne de Yougoslavie, les seules plaques étrangères étaient
celles des voitures françaises. Les Français fuient les endroits
bondés. La Croatie a tout pour les séduire. »
>>>
Retour au début
Cette
communication a été entièrement réalisée par la société InterFrance
Média, qui est seule responsable de son contenu. |
|