22/03/2004
FINAL
A5-0206/2004
RAPPORT
contenant
une proposition de recommandation du Parlement européen
à l'intention du Conseil sur la demande d'adhésion
à l'Union européenne présentée
par la Croatie
(2003/2254(INI))
Commission
des affaires étrangères, des droits de
l'homme, de la sécurité commune et de
la politique de défense
Rapporteur:
Alexandros Baltas
329.364
Sommaire
Voir le rapport
Baltas du 22 mars 2004 au format PDF (160 Ko)
Voir le rapport
Baltas du 19 novembre 2001 au format PDF (130 Ko)
Voir le rapport
Baltas du 29 novembre 2000 au format PDF (57 Ko)
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RÉGLEMENTAIRE
Au cours de la séance du 17 novembre
2003, le Président du Parlement a annoncé qu'il avait
renvoyé la proposition de recommandation, présentée
par Alexandros Baltas au nom du groupe PSE sur la demande
d'adhésion à l'Union européenne présentée par la Croatie
(B5-0476/2003) conformément à l'article 49, paragraphe
1, du règlement, pour examen au fond, à la commission
des affaires étrangères, des droits de l'homme, de
la sécurité commune et de la politique de défense.
Au cours de sa réunion du 26 novembre
2003, la commission a décidé d'élaborer un rapport
conformément à l'article 49, paragraphe 3, et l'article 104
sur ce sujet et a nommé Alexandros Baltas rapporteur
(2003/2254(INI)).
Au cours de ses réunions des 19 février,
16 et 17 mars 2004, elle a examiné le projet de rapport.
Au cours de la dernière de ces réunions,
elle a adopté la proposition de recommandation par
42 voix contre 1.
Étaient
présents au moment du vote : Elmar Brok (président),
Baroness Nicholson of Winterbourne, Geoffrey Van Orden
et Christos Zacharakis (vice-présidents), Alexandros
Baltas (rapporteur), Anne André-Léonard (suppléant
Ole Andreasen), Per-Arne Arvidsson, Bastiaan Belder,
Philip Claeys, Rosa M. Díez González, Andrew Nicholas
Duff (suppléant Bob van den Bos), Glyn Ford, Michael
Gahler, Gerardo Galeote Quecedo, Jas Gawronski, Vitaliano
Gemelli (suppléant Franco Marini), Anne-Karin Glase
(suppléant Hugues Martin conformément à l'article 153,
paragraphe 2, du règlement)), Alfred Gomolka, Vasco
Graça Moura (suppléant Amalia Sartori), Richard Howitt,
Giorgos Katiforis (suppléant Jannis Sakellariou), Efstratios
Korakas, Joost Lagendijk, Catherine Lalumière, Armin
Laschet, Jules Maaten (suppléant Paavo Väyrynen), Nelly
Maes (suppléant Elisabeth Schroedter), Cecilia Malmström,
Philippe Morillon, Pasqualina Napoletano, Arie M. Oostlander,
Reino Paasilinna (suppléant Jan Marinus Wiersma), Lennart
Sacrédeus (suppléant David Sumberg), Jürgen Schröder,
Ioannis Souladakis, Ursula Stenzel, The Earl of Stockton
(suppléant Alain Lamassoure), Ilkka Suominen, Hannes
Swoboda, Charles Tannock, Maj Britt Theorin (suppléant
Demetrio Volcic), Joan Vallvé, Luigi Vinci, Karl von
Wogau et Matti Wuori.
Le rapport a été déposé le 22 mars 2004.
PROPOSITION
DE RECOMMANDATION DU PARLEMENT EUROPÉEN À
L'INTENTION DU CONSEIL
sur
la demande d'adhésion à l'Union européenne
présentée par la Croatie
(2003/2254(INI))
Le
Parlement européen,
–
vu la proposition de recommandation à l'intention
du Conseil présentée par Alexandros Baltas
au nom du groupe PSE sur la demande d'adhésion
à l'Union européenne présentée
par la Croatie (B5-0476/2003),
–
vu sa résolution législative du 12 décembre
2001 sur la proposition de décision du Conseil
et de la Commission concernant la conclusion de l'accord
de stabilisation et d'association entre les Communautés
européennes et leurs États membres, d'une
part, et la République de Croatie d'autre part(1),
–
vu sa résolution législative du 12 décembre
2001 sur la proposition de décision du Conseil
concernant la conclusion et l'application d'un accord
intérimaire entre la Communauté européenne,
d'une part, et la république de Croatie, d'autre
part(2),
–
vu les conclusions du Conseil européen de Copenhague
de 1993, qui établit les critères à
respecter par les pays qui souhaitent adhérer
à l'Union européenne,
–
vu sa résolution législative du 6 octobre
2000 sur la proposition de décision du Conseil
modifiant la décision 2000/24/CE afin d'étendre
la garantie accordée par la Communauté
à la Banque européenne d'investissement
aux prêts en faveur de projets en Croatie(3),
–
vu sa résolution législative du 15 novembre
2000 sur la proposition modifiée du règlement
du Conseil concernant l'aide à l'Albanie, à
la Bosnie-Herzégovine, à la Croatie,
à la République fédérale
de Yougoslavie et l'ancienne République yougoslave
de Macédoine et modifiant le règlement
CEE n° 3906/89, la décision 97/256/CE et
le règlement CEE n° 1360/90(4),
–
vu la résolution 827 du Conseil de sécurité
des Nations unies du 25 mai 1993, établissant
le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie,
–
vu la résolution 1503 du Conseil de sécurité
des Nations unies,
-
vu sa résolution du 20 novembre 2003 sur le
processus de stabilisation et d'association en faveur
de l'Europe du Sud-Est: deuxième rapport annuel(5),
–
vu l'accord de stabilisation et d'association signé
par la Croatie le 29 octobre 2001,
–
vu l'accord intérimaire signé par la
Croatie le 29 octobre 2001,
-
vu la demande d'adhésion de la Croatie à
l'Union européenne soumise le 21 février
2003,
-
vu le programme CARDS et son volet annuel adopté
par la Commission en juin 2003 en faveur de la Croatie,
-
vu le rapport de la Commission sur le processus de
stabilisation et d'association en faveur de l'Europe
du Sud-Est - deuxième rapport annuel (COM(2003)139),
-
vu la déclaration de la conférence ministérielle
à Venise, pour une pêche durable et responsable
en Méditerranée, les 25-26 novembre 2003,
-
vu les conclusions des Conseils européens de
Thessalonique (20-22 juin 2003) et Bruxelles (12-13
décembre 2003) concernant la Croatie ,
-
vu les conclusions du Conseil Affaires extérieures
du 13 octobre 2003 et du 9 décembre 2003 concernant
la Croatie,
-
vu l'article 49, paragraphe 3, et l'article 104 de
son règlement,
-
vu le rapport de la commission des affaires étrangères,
des droits de l'homme, de la sécurité
commune et de la politique de défense (A5-0206/2004),
A.
saluant avec satisfaction la demande d'adhésion
de la Croatie à l'Union européenne et
soulignant la vocation européenne de la Croatie
et le caractère symbolique de la demande d'adhésion
provenant d'un autre pays de l'ex-Yougoslavie,
B.
affirmant que la volonté de la Croatie d'adhérer
à l'Union européenne pourrait servir
d'exemple supplémentaire et d'incitation pour
les autres pays de la région des Balkans,
C.
indiquant que cette demande d'adhésion constitue
une suite logique aux étapes déjà
franchies par la Croatie en vue d'atteindre le plus
haut degré possible de rapprochement entre ce
pays et l'Union européenne, comme l'ont été
la signature de l'Accord d'association et de stabilisation,
et l'établissement et la progressive mise en
œuvre des réformes légales nécessaires
qui doivent permettre la pleine incorporation de l'acquis
communautaire,
D.
étant d'avis que l'ancrage de la Croatie à
l'Union européenne donnera un nouveau souffle
à la région et contribuera à son
développement,
E.
comprenant que le rapprochement de la Croatie de l'Union
européenne et la stimulation que cela génère
dans la région des Balkans reflètent
le rôle-clé que l'Union peut continuer
de jouer en faveur de la paix, de la stabilité
et de la prospérité dans la région;
et que l'Union, à travers sa propre expérience
historique et récente, connaît l'influence
positive que la perspective d'une potentielle adhésion
engendre dans tous les pays qui aspirent à devenir
candidats,
F.
considérant que les élections législatives
du 23 novembre 2003 se sont déroulées
d'une manière correcte et conformément
aux normes à respecter par tout pays démocratique,
G.
saluant la nouvelle loi constitutionnelle sur les droits
des minorités nationales qui constitue un cadre
nécessaire et utile pour réglementer
leur statut,
H.
prenant note que le nouveau gouvernement, comme d'ailleurs
le gouvernement précédent, soutient l'adhésion
de la Croatie à l'Union européenne,
I.
notant que les réformes entreprises par la Croatie
au cours des dernières années dans le
domaine économique ont favorisé une meilleure
performance de l'économie croate (le taux de
croissance est passé de 4,1% du PNB en 2001
à 5,2% en 2002, l'inflation est passée
de 7,4% en 2000 à 2,3% en 2002),
J.
notant que la Croatie bénéficie déjà
de l'accord intérimaire UE-Croatie qui favorise
l'ouverture du marché européen et exerce
un impact positif sur l'économie croate, tout
en regrettant que l'accord de stabilisation et d'association,
signé le 29 octobre 2001, ne soit pas encore
entré en vigueur à ce jour,
K.
conscient en tout cas que la signature de cet accord
a encouragé l'adoption de réformes législatives
d'une grande importance et a contribué directement
au renforcement de la coopération en matière
de développement économique et social,
et à la définition de cadres de dialogue
politique et de coopération dans les questions
de justice et affaires intérieures,
L.
saluant avec satisfaction le fait que la Croatie ait
été le premier pays du Sud-Est de l'Europe
à avoir ratifié le statut instituant
la Cour pénale internationale et qu'elle ait
en outre refusé de conclure un accord bilatéral
avec les Etats-Unis concernant la Cour pénale
internationale; note que la coopération de la
Croatie avec le Tribunal pénal international
pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) n'a pas été
satisfaisante dans tous les cas, ce qui a terni l'image
du pays au sein de la communauté internationale
et a influé sur le processus de ratification
de l'accord de stabilisation et d'association par certains
Etats membres mais se félicite de l'engagement
du nouveau gouvernement à coopérer pleinement
avec le Tribunal,
M.
soutenant la position commune adoptée par le
Conseil le 16 avril 2003 qui vise à appuyer
une mise en œuvre effective du mandat du TPIY,
interdisant les déplacements des personnes qui
commettent des actes d'entrave à la justice,
N.
considérant que la participation active de la
Croatie au Pacte de Stabilité a favorisé
la coopération régionale, mais que des
efforts ultérieurs s'avèrent nécessaires
de la part de tous les pays concernés pour renforcer
le climat de sécurité et de confiance
réciproque,
O.
affirmant que la perspective de l'adhésion pourra
servir de levier pour continuer les réformes
nécessaires à la modernisation du pays
et surtout pour la consolidation des institutions démocratiques,
de l'Etat de droit, du respect des droits de l'homme
et des minorités,
P.
accueillant favorablement l'accord conclu par le nouveau
gouvernement avec la minorité serbe, souligne
l'importance des mesures favorisant le retour de tous
les réfugiés et rappelle, à cet
égard, les engagements pris par la Croatie dans
le cadre des accords de Dayton, de Paris et d'Erdut,
Q.
considérant que la décision du gouvernement
croate concernant la création d'une zone écologique
de protection de pêche dans l'Adriatique a causé
des tensions politiques dans ses relations avec la
Slovénie et l'Italie,
R.
prenant acte de la déclaration de la conférence
ministérielle pour le développement durable
des pêches en Méditerranée qui
stipule, inter alia, que la création des zones
de pêche permet d'améliorer la conservation
et le contrôle des pêcheries et contribue
à une meilleure gestion des ressources et à
un engagement commun pour combattre la pêche
IUU; qu'il convient, sans préjudice des droits
souverains des Etats et en accord avec les dispositions
pertinentes du droit international d'approfondir la
réflexion sur les modalités de création
des zones de protection de pêche, en tenant compte
des précédants existant pour arriver
à une approche concertée, régionale,
fondée sur le dialogue et la coordination,
S.
réaffirmant que l'élargissement est un
processus évolutif et ouvert à tout pays
européen qui respecte les critères énoncés
à l'article 6 du Traité sur l'Union européenne
et qui remplit les critères de Copenhague,
T.
reconnaissant que la demande d’adhésion
de la Croatie à l’Union européenne
est un défi que la Croatie est prête à
relever, souligne qu'une décision positive aurait
un effet significatif sur les autres pays de l'Europe
du Sud-Est,
1.
adresse au Conseil les recommandations suivantes :
a)
souligner la nécessité que la Croatie
satisfasse aux engagements découlant des accords
de Dayton et de Paris, en particulier, en ce qui concerne
le retour des réfugiés ;
b) inviter la Croatie à poursuivre le dialogue
avec ses voisins en vue d’arriver à un
accord concernant le tracé des frontières
entre la Slovénie et la Croatie et sur les questions
en suspens avec l'Italie ;
c) encourager la Croatie à maintenir sa participation
à l'Organisation "Alpe Adria" afin
d'améliorer la coopération transfrontalière
avec l'Italie, la Slovénie et la Hongrie et
à renforcer des nouveaux programmes de coopération
transfrontalière avec la Bosnie, la Serbie et
le Monténégro ;
d) inviter la Croatie à contribuer au renforcement
ultérieur du Pacte de stabilité des pays
de l'Europe du sud-est dans le but de développer
la sécurité et la confiance réciproque
entre tous les pays de la région ;
e) rappeler la nécessité du respect du
droit international et l'importance de préserver
les relations de bon voisinage, en adoptant une attitude
de compromis et de dialogue dans la poursuite d'un
projet concernant la création d'une zone écologique
de protection de pêche dans l'Adriatique ;
f) demander à la Croatie d'améliorer
davantage la coopération avec le Tribunal pénal
international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), rappelant
l'importance qu'y attache l'Union européenne;
g) encourager la Croatie à adopter les mesures
nécessaires pour empêcher l'entrée
ou le passage en transit sur son territoire des personnes
recherchées par le TPIY, conformément
à la position commune adoptée le 16 avril
2003 par le Conseil;
h) saluer la tenue de procès intérieurs
contre les suspects de crimes de guerre, souligne que
des procédures juridiques devraient être
instituées contre les suspects, indépendamment
de leur origine ethnique, et qu'il doit y avoir une
seule norme de responsabilité pénale
appliquée à tous ceux qui doivent répondre
de crimes de guerre devant un tribunal croate;
i) demander aux autorités croates de continuer
la politique d'encouragement pour le retour des réfugiés
par :
-
la mise en œuvre effective du cadre juridique,
notamment concernant la restitution des propriétés,
en particulier au niveau local,
- des mesures d'encouragement de caractère
économique, comme l'accès au logement,
les opportunités d'emploi, le soutien financier
aux travaux de reconstruction,
- la création d’un climat socio-psychologique
de confiance et d'accueil, favorable à l'égard
des réfugiés et des personnes déplacées
;
j)
insister sur l'indépendance de la justice et
encourager les autorités croates à poursuivre
la stratégie qui a été réformée
en 2002 visant à la réforme du système
judiciaire ; la Croatie devrait, en particulier en
ce qui concerne les procès intérieurs
pour crimes de guerre, appliquer la législation
adoptée récemment qui prévoit
des mesures de protection adéquates pour les
témoins ;
k) assister par tous les moyens les autorités
croates dans leurs efforts de mise en œuvre de
structures administratives efficaces pour assurer l'application
des réformes ;
l) insister sur la liberté et l'indépendance
des médias et encourager les autorités
croates à peaufiner les dispositions législatives
concernant la loi sur la radiotélévision
croate (HRT) afin d'en exclure les possibilités
d'ingérence politique et la rendre entièrement
conforme aux standards européens ;
m) encourager la participation active de tous les citoyens
et des organisations non gouvernementales dans la consolidation
de la démocratie, prenant soin de garantir les
droits des minorités ethniques et des Roms ;
n) se féliciter de la nomination des représentants
de la minorité serbe au gouvernement croate
ainsi que de l'élection des huit représentants
des minorités ethniques au Parlement croate,
rendue possible en vertu de la nouvelle loi électorale
amendée qui a ainsi augmenté leur nombre
par rapport à la composition du Parlement précédent
;
o) encourager la Croatie à poursuivre les réformes
économiques et structurelles afin de développer
et garantir une économie de marché viable
tout en attirant l'attention sur la nécessité
d'assurer la transparence et d'accélérer
le processus de privatisation ;
p) inviter les nouveaux pays membres à s'impliquer
activement dans les orientations européennes
de la Croatie, mettant à profit leur connaissance
de la région et faisant bénéficier
la Croatie de leurs expériences dans cette période
de réformes ;
q) demander aux Etats membres qui ne l'auraient pas
encore fait de ratifier l'Accord de stabilisation et
d'association signé par la Croatie et l'Union
européenne le 29 octobre 2001;
r) inviter la Croatie à poursuivre la lutte
contre la corruption qui doit être épaulée
par la mise en œuvre effective d'une législation
y afférente ;
s) demander au Conseil d'envisager une assistance accrue
de l'Union en mobilisant, en appui des programmes CARDS,
SAPARD et ISPA, ainsi que des instruments tels que
Twinning et TAIEX, des ressources financières
additionnelles par le biais de la BEI, de la BERD et
des institutions financières internationales,
ainsi que des sources d'investissements privés
afin de favoriser le plus efficacement possible le
processus des réformes et assurer le financement
de réseaux et d'infrastructures dans les secteurs
clés de l'économie du pays ainsi que
la réinstallation des réfugiés
;
t) promouvoir l'information sur l'Union européenne,
ses valeurs, ainsi que les avantages et obligations
que comporte l'adhésion ;
u) approuver la détermination de la Croatie
à lier son avenir à celui de l’Union
européenne, à ses normes et fonctions
démocratiques ainsi qu'à ses valeurs,
communes à tous les peuples européens
;
2.
charge son Président de transmettre la présente
recommandation au Conseil et, pour information, à
la Commission ainsi qu'au gouvernement et au parlement
de Croatie.
EXPOSÉ
DES MOTIFS
La demande d'adhésion de la Croatie à
l'Union européenne, déposée le
21 février 2003 a une valeur de symbole car
c'est le premier pays de la région des Balkans
occidentaux, éprouvé par la récente
guerre, qui a opté d'une manière manifeste
pour le projet d'intégration européenne.
Cette perspective ouvre de nouvelles opportunités
dans tous les domaines, mais avant tout permet d'ancrer
durablement la Croatie à l'Europe dont elle
fit toujours partie.
Au
cours des dernières années la Croatie
a procédé à des réformes
économiques et politiques visant à la
démocratisation du pays et à la modernisation
de son économie. Le passage à l'économie
de marché représente en soi un défi
de taille qui a été aggravé par
les conséquences de la guerre. Aujourd'hui,
la performance de l'économie croate inspire
de l'optimisme avec une croissance d'environ 5% de
PNB, un taux d'inflation qui est passé de 7,4%
en 2000 à 2,3% en 2002, mais il reste encore
beaucoup à faire et les réformes doivent
être poursuivies avec fermeté (inter allia
le processus de privatisation, la réforme de
l'enseignement et les soins de santé).
La
Croatie a fait aussi d'importantes avancées
dans l'alignement de sa législation à
celle de l'Union européenne dans plusieurs domaines,
conformément aux orientations stipulées
dans le processus d'association et de stabilisation.
Le travail législatif doit se poursuivre et
s'accompagner de la mise en œuvre effective des
lois. C'est un travail ardu et plein d'embûches
car les structures administratives et leurs capacités
sont encore limitées et le "know-how"
ne s'acquiert pas d'un jour à l'autre. Il faudra
beaucoup de persévérance et du temps
pour que la Croatie se dote des moyens nécessaires
à assurer la consolidation de l'Etat de droit
et de la démocratie. Mais la voie est déjà
frayée et il y a de bons auspices.
La
Croatie pourrait se convertir en une "locomotive"
de progrès dans la région des Balkans.
Ses succès économiques et les progrès
dans la mise en place de la démocratie sont
observés par d'autres pays voisins qui souhaitent
rejoindre un jour l'Union. La réussite croate
pourrait servir de modèle et d'incitant à
ces pays dans la perspective de leur adhésion
à l'Union. Ce scénario serait le plus
désirable pour assurer la stabilité et
la prospérité de cette région.
La
Croatie affronte encore de son côté plusieurs
défis dont trois, de l’avis du rapporteur,
sont les plus pressants :
1.
Le retour des réfugiés : un problème
d'une dimension politique, sociale et psychologique.
Pour obtenir des résultats tangibles il faudrait
prendre soin de tous ces aspects : assurer le logement
est une condition sine qua non pour favoriser le retour
des réfugiés. Toutefois, "ce minimum
" n'est pas facile à garantir dans la situation
de pénurie de logements, quant aux travaux de
reconstruction, ils ne sont pas encore finalisés
(27.000 logements en attente de reconstruction) et
le processus de restitution des biens n'est pas achevé.
Le gouvernement croate a mis en place le cadre juridique
afférent aux droits de location/occupation qui
ont été annihilés lorsque les
détenteurs de ces droits ont quitté leur
habitation pendant le conflit, mais celui-ci concerne
seulement les zones d'intérêt national
particulier. Il est urgent qu'une solution soit trouvée
à la question des droits d'occupation en dehors
de ces zones. Il faudrait aussi encourager le gouvernement
croate, suivant les recommandations de la Cour européenne
des Droits de l'Homme, à revoir le bien-fondé
des décisions de déchéance du
droit d'occupation.
Un
autre facteur dissuasif au retour des réfugiés
c'est le manque de perspectives d'emploi. Malgré
la restructuration constante et le besoin de main-d'œuvre,
les opportunités offertes aux réfugiés
sont inférieures à la demande, aux soutiens
psychologiques nécessaires ainsi qu'à
la qualité de l'accueil. Toutes les initiatives
civiles qui peuvent y contribuer devront être
encouragées. Un effort éducatif accru
serait aussi le bienvenu.
Il
convient également de saluer le geste symbolique
du Président Mesic qui, lors de sa première
visite officielle à Belgrade, a présenté
ses excuses à tous ceux à qui les citoyens
de Croatie avaient, à un moment donné,
infligé des souffrances ou des dommages, en
violation des lois et abusant de leur position. Pour
sa part, le Président Marovic a présenté
ses excuses pour tous les méfaits commis par
des citoyens de Serbie ou du Monténégro
contre quiconque en Croatie. Il s'agissait d'un acte
politique particulièrement important pour la
réconciliation entre les deux pays.
Il
y a également lieu de mentionner que le Premier
Ministre Dr Ivo Sanader a rendu visite à la
minorité serbe à la fête de Noël
serbo-orthodoxe. Il a également rencontré
la minorité italienne et prononcé son
discours en italien, un autre geste symbolique de la
politique positive à l'égard des minorités
du nouveau gouvernement.
Un
accord a été conclu avec 3 députés
du SDSS (Parti national minoritaire serbe) et avec
les autres partis minoritaires, qui sont soutenus par
le gouvernement du Premier Ministre Sanader.
2.
L'autre sujet de préoccupation concerne la coopération
de la Croatie avec le Tribunal Pénal International
pour l'ex-Yougoslavie.
La
Croatie n'a pas encore exécuté le mandat
d'arrestation du général Ante Gotovina,
accusé de crime de guerre. Toutefois, le nouveau
gouvernement croate a pris l'engagement ferme de coopérer
pleinement avec le Tribunal et il y a déjà
des premiers signaux encourageants. Le 11 mars, deux
généraux à la retraite Ivan Cermak
et Mladen Markac condamnés par le TPIY se sont
présentés volontairement au tribunal.
Le bureau du Procureur a salué leur reddition
volontaire en jugeant positive la manière dont
le gouvernement croate a mené cette affaire.
Il
faut aussi souligner la détermination des autorités
croates à accélérer les poursuites
à l’encontre des criminels de guerre devant
les tribunaux nationaux et leurs efforts pour garantir
l’impartialité de l’appareil judiciaire
dans le jugement de ces criminels.
3.
Le troisième problème concerne l'extension
de la juridiction croate sur l'Adriatique. Le projet
croate sur la création d'une zone économique
exclusive en Adriatique a suscité de vives tensions
chez les voisins de la Croatie (Slovénie et
Italie) qui n'ont pas été consulté
à cette occasion. Ce projet appelé"
zone écologique de protection de pêche",
fut proclamé par le Parlement croate le 3 octobre
2003. Bien qu'il y ait des raisons qui expliquent une
telle initiative, (vulnérabilité écologique
et biologique de cette zone et nécessité
de la protéger), la décision unilatérale
prise par la Croatie a fait entrave à la pratique
de dialogue et de consultation qui constitue l'un des
points centraux dans la gestion des problèmes
qui ont un impact régional et sont, de par nature,
sensibles pour tous les pays concernés.
C'est
un point particulièrement important car l'adhésion
réussie de la Croatie à l'Union européenne
exigera d'elle une aptitude adéquate au dialogue
avec les autres. La Croatie devra être encouragée
à mettre tout en œuvre afin de préserver
les relations de bon voisinage. Rappelons que le tracé
de la frontière maritime avec la Slovénie
n'est toujours pas résolu et que les problèmes
dans les relations avec l'Italie concernant, inter
allia, la restitution des propriétés
des exilés italiens "Esuli" et le
traitement des minorités italiennes attendent
aussi une solution satisfaisante. Les relations avec
la Serbie et le Monténégro s'améliorent
bien que la question des minorités et du retour
des réfugiés soit encore source de tensions.
La Serbie et le Monténégro ont subordonné
l'accord inter-Etats sur les droits des minorités
à la solution au problème des réfugiés
serbes de Croatie.
Le
gouvernement croate a continué à entretenir
des relations franches et transparentes avec la Bosnie-Herzégovine,
dans le respect total de la souveraineté et
de l'intégrité territoriale de cette
dernière. Lorsque plusieurs centaines de Croates
ont quitté Drvar pour la Croatie après
avoir été expulsés des logements
qu'ils occupaient au début de l'année
2002, le gouvernement croate a soigneusement coordonné
sa position avec celle des autorités de Bosnie-Herzégovine.
En outre, deux accords importants ont été
signés en juin 2002 sur la lutte contre le terrorisme
et le crime organisé.
La
Croatie participe activement à plusieurs initiatives
régionales et sous-régionales telles
que le Pacte de Stabilité, l'initiative Adriatique
et Ionienne, la "Quadrilatérale" (regroupant
l'Italie, la Hongrie, la Slovénie et la Croatie),
elle jouit du statut d'observateur dans le processus
de coopération dans l'Europe du sud-est. Elle
est membre de l'OSCE et du Conseil de l'Europe. En
tant que membre du Partenariat pour la paix de l'OTAN,
elle coopère activement avec cette organisation
pour préparer sa future adhésion.
La
Croatie est sans doute sur la bonne voie mais il ne
faut pas sous-estimer l'effort qui sera nécessaire
pour satisfaire aux critères de Copenhague,
préparer l'adhésion et, à la fin,
en tirer tout le bénéfice. En dernière
instance, c'est le peuple croate qui par son soutien
marquera le rythme des changements. Le nouveau gouvernement
issu des élections législatives du 23
novembre 2003 a déclaré son intention
de poursuivre les réformes déjà
en cours avec fermeté et détermination.
Il est certain que la perspective d'adhésion
est un levier pour impulser ces réformes. L'aide
économique de l'Union contribuera à soutenir
ce processus. L'expérience acquise par l'Union
dans le soutien des réformes aux pays de l'Europe
centrale et orientale pourra aussi être utilisée
afin d'accroître l'efficacité de l'action
communautaire. A part les programmes CARDS, SAPARD
et ISPA et l’assistance prévue par l’accord
de stabilisation et d’association, la mise à
la disposition de la Croatie d'instruments tels que
Twinning et TAIEX, sont des preuves concrètes
de la volonté de l'Union d'encourager le processus
des réformes en Croatie. La vocation européenne
de la Croatie est reconnue et saluée. L'importance
de l'ancrage de ce pays à l'Union européenne
pour la stabilité de la région des Balkans
ne fait nul doute.
En
conclusion, c’est la Croatie qui détient
définitivement la clé de son avenir communautaire,
sachant qu’elle sera jugée objectivement
sur ses actes et appréciée pour ses mérites.
PROPOSITION
DE RECOMMANDATION B5-0476/2003
déposée conformément à
l'article 49, paragraphe 1, du règlement
par
Alexandros Baltas
au
nom du groupe PSE
sur
la demande d'adhésion à l'UE présentée
par la Croatie
Le
Parlement européen,
–
vu sa résolution législative sur la proposition
de décision du Conseil et de la Commission concernant
la conclusion de l'accord de stabilisation et d'association
entre les Communautés européennes et
leurs États membres, d'une part, et la République
de Croatie, d'autre part (1172/2001 - COM (2001) 371
- C5-0565/2001 - 2001/0149(AVC)),
–
vu l'accord de stabilisation et d'association signé
par la Croatie en octobre 2001,
–
vu la demande d'adhésion à l'UE présentée
par la Croatie le 21 février 2003,
–
vu les conclusions du Conseil européen de Thessalonique,
–
vu le programme annuel pour la Croatie adopté
par la Commission européenne en juin 2003,
–
étant donné que la Commission rendra
son avis concernant l'ouverture des négociations
d'adhésion sur la base des réponses apportées
par les autorités croates au questionnaire sur
la situation politique, économique et administrative,
–
vu l'article 49, paragraphe 1, de son règlement,
A.
considérant qu'en présentant sa demande
d'adhésion à l'UE, la Croatie a réaffirmé
sa vocation européenne,
B.
considérant que cette demande d'adhésion
est un exemple fort pour tous les autres pays de la
région,
C.
considérant que la transition politique, économique,
juridique et administrative constitue un défi
sans pareil pour la Croatie et qu'elle aura une incidence
majeure sur le développement et la stabilité
de l'ensemble de la région,
D.
considérant que des efforts renouvelés
et une détermination sans faille sont nécessaires
dans les domaines fondamentaux que sont la réforme
du système judiciaire, la liberté des
médias, le respect des droits des minorités
et le retour des réfugiés,
1.
recommande à la Commission d'encourager les
autorités croates à ne ménager
aucun effort pour résoudre tous les différends
territoriaux encore en suspens avec les pays voisins
et à trouver une solution mutuellement satisfaisante
avec la Slovénie en ce qui concerne le projet
controversé de création d'une zone économique
exclusive dans la mer Adriatique;
2.
recommande à la Commission de rappeler à
la Croatie la nécessité de tout mettre
en œuvre pour coopérer avec le Tribunal
pénal international pour l'ex-Yougoslavie;
3.
insiste pour que les conditions appliquées à
la Croatie soient les mêmes que pour les autres
pays candidats afin que les critères politiques
et économiques requis pour l'ouverture de négociations
soient réunis;
4.
charge son Président de transmettre la présente
recommandation au Conseil et, pour information, à
la Commission.
(1)
JO C 177 E du 25.7.2002, p.122.
(2) JO C 177 E du 25.7.2002, p.123.
(3) JO C 178 du 22.6.2001, p. 297.
(4) JO C 223 du 8.8.2001, p.175.
(5) P5_TA(2003)0523.
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